« diffamer », définition dans le dictionnaire Littré

diffamer

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

diffamer

(di-ffa-mé) v. a.
  • 1Attaquer dans la réputation. On a essayé de le diffamer dans des libelles odieux. Pour mieux les diffamer et les rendre odieux, Rotrou, St Gen. IV, 7.

    Faire perdre la réputation. Reste de ces esprits jadis si renommés, Que d'un coup de son art Molière a diffamés, Boileau, Sat. X.

  • 2Déshonorer. Trouves-tu beau, dis-moi, de diffamer ma fille, Et faire un tel scandale à toute une famille ? Molière, Dép. am. III, 8. Au moins rien de honteux ne nous diffamera, Tristan, M. de Chrispe, II, 1. Écouter ton amour, obéir à sa voix, C'était m'en rendre indigne et diffamer ton choix, Corneille, Cid, III, 4. Emprunter le secours d'aucun pouvoir humain, D'un reproche éternel diffamerait ma main, Corneille, Médée, IV, 6. Ce long amas d'aïeux que vous diffamez tous Sont autant de témoins qui parlent contre vous, Boileau, Sat. V. Dieux vains dont le culte diffame Leurs insensés adorateurs, Gilbert, Ode au roi.
  • 3Défigurer, salir, gâter. Vieux en ce sens. Je vous croyais la bête, Dont à me diffamer j'ai vu la gueule prête, Molière, Pr. d'Él. I, 2. Le Parnasse surtout, fécond en imposteurs, Diffama le papier par ses propos menteurs, Boileau, Ép. IX.
  • 4Se diffamer, v. réfl. Se faire tort dans l'opinion publique, se salir. J'aime sur le théâtre un agréable auteur Qui, sans se diffamer aux yeux du spectateur, Plaît par la raison seule…, Boileau, Art p. III.

REMARQUE

Diffamer et les mots qui en dérivent devraient se prononcer diffâmer, etc. comme fâme, infâme. En le prononçant di-ffa-mer, comme on fait, on semble le rapprocher de affamer. C'est une confusion fâcheuse introduite par la négligence de la prononciation.

HISTORIQUE

XIIe s. Mais [nous nous plaignons] de ço qu'il nus ad à tel tort demenez, Comme malvaises genz huniz e defamez, Th. le mart. 135.

XIIIe s. Que nuls ne nule du dit mestier ne soustiengne, en leurs mesons ou estuves, bordeaus de jour ne de nuit, mesiaus ne meseles [lépreux], reveurs ne autres gens diffamez de nuit, Liv. des mét. 189. Si ne voil-ge mie blasmer Religion, ne diffamer, En quelque abit que ge la truisse [trouve], la Rose, 11054. Certes malement t'en diffames ; Lesse plorer enfans et fames, Bestes fiebles et variables ; Et tu soies fers et estables, ib. 6429. Si se sunt maint vanté de maintes, Par paroles fauces et faintes, Dont les cors avoir ne pooient, Lor non à grant tort diffamoient, ib. 9890. Li arbitres a resnable cause de soi demettre de l'arbitrage, quant il est difamés ou despisiés de l'une des parties qui se mistrent sor li, Beaumanoir, XLI, 17.

XIVe s. Ceulz qui sont notez et diffamez d'aucun vice ou crime, Oresme, Thèse de MEUNIER.

XVe s. Ainsi disoient les Escots en Escosse à la venue des seigneurs de France, et n'en faisoient nul compte, mais les hayoient en courage et les diffamoient en leur langage ce qu'ils pouvoient, Froissart, II, II, 228. Jules Cesar, qui fut si vaillant conquereur, tant comme il fut en la contrée d'Égypte, en fut très vilainement diffamé, Bouciq. IV, chap 7.

XVIe s. En ce faisant [un parjure] il ne tient point à nous qu'il [Dieu] ne soit diffamé de mensonge, Calvin, Instit. 290. Il se vautra dans la litiere des chevaux, se diffamant la face de telle sorte, que…, Yver, p. 643. Il luy coupa la queue… chascun le blasmoit fort d'avoir diffamé un si beau chien, Amyot, Alc. 14. Aristides par sa pauvreté a diffamé et rendu odieuse la justice, comme celle qui fait l'homme pauvre, Amyot, Arist. et Caton, 6. Bien peu souvent se departoit l'assemblée, que la tribune aux harengues ne fust souillée et diffamée de sang, Amyot, César, 36. Les soldats provençaux s'estans jettez parmi huict ou neuf vingts garces qu'ils pilloient et diffamoient de coups, D'Aubigné, Hist. I, 335. L'on ne vauldra jà mieulx de diffamer autruy, Leroux de Lincy, Prov. t. II, p. 339.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. diffamar ; espagn. difamar, disfamar ; ital. diffamare ; du latin diffamare ; de di, signifiant retranchement, et fama, renommée (voy. FAMEUX).

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

DIFFAMER. - REM. Ajoutez : La remarque sur la prononciation de diffamer n'est pas juste (voy. FAMÉ à l'étymologie). Pourtant il faut noter que l'a bref dans diffamer redevient long dans : tu diffames, c'est-à-dire quand l'f est suivie d'un e muet.