« hardiesse », définition dans le dictionnaire Littré

hardiesse

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hardiesse

(har-di-è-s') s. f.
  • 1Qualité de celui qui est hardi, qui ose beaucoup. Et ce masque trompeur de fausse hardiesse Nous déguise sa crainte et couvre sa faiblesse, Corneille, Nicom. III, 4. Fortune aveugle suit aveugle hardiesse, La Fontaine, Fabl. X, 14. Avant lui [Louis XIV], la France, presque sans vaisseaux, tenait en vain aux deux mers ; maintenant on les voit couvertes depuis le levant jusqu'au couchant de nos flottes victorieuses, et la hardiesse française porte partout la terreur avec le nom de Louis, Bossuet, Marie-Thér. On sait fort bien que la hardiesse, accompagnée de quelque bonheur, peut prendre impunément l'ascendant partout, Bourdaloue, 10e dim. après la Pentec. Dominic. t. III, p. 205. Les gens qui ont la hardiesse de dire la vérité, Fénelon, Tel. XX. Il avait acquis plus de hardiesse à ne point ménager les préjugés ordinaires, Fontenelle, Delisle. Ils ne portent dans ces places où ils entrent sans lumières et sans connaissances comme sans vocation, qu'une folle estime d'eux-mêmes et une téméraire hardiesse de décider, Rollin, Hist. anc. Œuv. t. III, p. 375. C'est au théâtre anglais que je dois la hardiesse que j'ai eue de mettre sur la scène les noms de nos rois et des anciennes familles du royaume, Voltaire, Lett. sur Zaïre.
  • 2En un sens défavorable, témérité, insolence. La hardiesse de ses manières me déplaît. N'ayez donc plus la hardiesse de dire que vos décisions sont conformes à l'esprit et aux canons de l'Église, Pascal, Prov. XI. Pour moi, dût l'empereur punir ma hardiesse…, Racine, Brit. V, 5. À ce coupable excès porter la hardiesse ! Voltaire, Zaïre, V, 8.
  • 3Licence. Excusez si je prends la hardiesse de… Il est temps que j'arrête une fois pour toutes cette hardiesse que vous prenez de me traiter d'hérétique, qui s'augmente tous les jours, Pascal, Prov. XVII.

    Familièrement. Cet homme prend des hardiesses qui ne lui appartiennent pas, il s'émancipe trop.

  • 4Nature hardie, caractère hardi, en parlant des choses. Hardiesse d'une entreprise. La hardiesse d'une doctrine, d'une opinion. Le sort va de mes coups servir la hardiesse, Ducis, Lear, V, 1.

    Il y a des hardiesses dans cet ouvrage, il y a des choses hasardées dans cet ouvrage.

  • 5Il se dit du style, des expressions. Une grande hardiesse de style. Souvent dans son orgueil un subtil ignorant Blâme des plus beaux vers la noble hardiesse, Boileau, Art p. IV. Toujours de grandes et de belles idées, toujours vérité et variété dans les images ; hardiesse, ou plutôt audace dans les figures ; propriété, naïveté, noblesse, énergie dans la diction ; vivacité, nouveauté dans les tours ; continuité d'harmonie, il y aurait bien là de quoi faire un auteur divin, D'Olivet, Rem. Rac. p. 54.
  • 6En certains arts, exécution hardie. Une grande hardiesse de pinceau, de ciseau. Cette écriture est d'une grande hardiesse. Le jeu de ce musicien est plein de hardiesse. Attaquer la note avec hardiesse.
  • 7Il se dit du caractère d'ouvrages d'art qui présentent quelque chose d'inaccoutumé et qui n'avait pas été fait jusque-là. La hardiesse d'un pont, d'une voûte.
  • 8Licence que se permet un écrivain, un artiste. Il y a des hardiesses heureuses dans cet ouvrage. On ne peut trop leur redire [aux écrivains en prose] qu'ils sont obligés d'avoir une attention infinie à la propriété des termes ; quant aux poëtes, sachons-leur gré de leurs hardiesses, lorsqu'elles sont dictées par le goût et avouées par le bon sens, D'Olivet, Rem. sur Racine, § 42. Ces sortes de hardiesses font un merveilleux effet dans la poésie, lorsqu'elles sont placées à propos et de loin à loin, D'Olivet, ib. § 41. Ne répétez pas ces hardiesses ; qu'elles soient rares, qu'elles soient nécessaires ; si elles sont inutilement prodiguées, elles feront rire, Voltaire, Mél. littér. Changem. arrivés à l'art dramatique.

SYNONYME

HARDIESSE, TÉMÉRITÉ. Pour transformer la hardiesse en témérité, il suffit d'y adjoindre une épithète péjorative : aveugle hardiesse, folle hardiesse.

HISTORIQUE

XIVe s. Premierement quant est en paour et en hardiesce, la vertu qui est ou moien est fortitude, Oresme, Eth. 48. Et je di que passions sont concupiscence, ire, paour, hardiece, envie, joye…, Oresme, ib. 42.

XVe s. Les nobles François… leur coururent sus par si grand vertu et hardiesse que tous les espouvanterent, Bouciq. I, 24.

ÉTYMOLOGIE

Hardi ; provenç. ardideza ; ital. arditezza. La plus ancienne langue disait hardement.