« insulter », définition dans le dictionnaire Littré

insulter

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

insulter

(in-sul-té) v. a.
  • 1Attaquer par un coup de main, en parlant d'une place de guerre et de fortifications. Les troupes du roi insultèrent en 1677 avec tant de courage et de bonheur la contrescarpe de Valenciennes, qu'elles emportèrent la ville même, Richelet. On insulta le chemin couvert du front de la basse ville, quoique cette entreprise parût prématurée et hasardée, Voltaire, Louis XV, 11. D'abord il insulta la Jamaïque, où tout fut mis à feu et à sang, Raynal, Hist. phil. XIII, 74.
  • 2Attaquer quelqu'un de fait ou de parole d'une manière offensante. J'appelle insulter la majesté de Jésus-Christ, demeurer en sa présence dans des postures immodestes, Bourdaloue, Myst. Pass. de J. C. t. I, p. 184. Que tout, jusqu'à Pinchêne, et m'insulte et m'accable : Aujourd'hui, vieux lion, je suis doux et traitable, Boileau, Épît. V. Quoi ! madame ! un barbare osera m'insulter ! Racine, Iphig. III, 6. Quelque rival indigne… Insulte mon amour, outrage mon honneur, Voltaire, Scythes, II, 5. Connaissez qui je suis et qui vous insultez, Voltaire, Sophon. III, 3.
  • 3 V. n. Insulter en bravant avec affectation. N'entrez point dans la ville de mon peuple quand il sera ruiné ; ne lui insultez point, comme les autres, dans son malheur, Sacy, Bible, Abdias, I, 13. M. de Grignan a raison de triompher, de vous insulter sur cette première campagne de son fils ; la pensée du contraire me fait suer, Sévigné, 6 déc. 1688. Il [l'incrédule] se met au rang des gens désabusés, il insulte en son cœur aux faibles esprits, Bossuet, Anne de Gonz. Ce même Agamemnon à qui vous insultez, Racine, Iphig. II, 5. Elle regarda le ciel avec mépris et arrogance, comme pour insulter aux Dieux, Fénelon, Tél. VIII. Il fuit honteusement et se cache ; l'autre le poursuit et lui insulte, Fénelon, Fable XV, les Deux lionceaux. Ses ministres [de l'Église] ne doivent pas lui insulter par une pompe déplacée et si éloignée de son esprit, Massillon, Confér. Us. des reven. ecclés. Tout ce qui était encore sur l'amphithéâtre et dans le cirque le reçut avec des huées ; on l'entourait, on lui insultait en face, Voltaire, Zadig, 19.

    Insulter en prenant avantage de la faiblesse, de la misère, de la douleur, etc. Ne voit-on pas qu'on se moque, lorsqu'on dit de pareilles choses, et qu'on insulte en soi-même à la crédulité d'un faible lecteur, Bossuet, 1er avert. § 44. Mon fils audacieux insulte à ma ruine, Racine, Mithr. II, 5. Voudrait-il insulter à la crainte publique ? Racine, Iphig. I, 2. Moi qui, contre l'amour fièrement révolté, Aux fers de ses captifs ai longtemps insulté, Racine, Phèd. II, 2. Nos superbes vainqueurs insultant à nos larmes, Racine, Esth. I, 4. Le traître ! il insultait à ma confusion ! Racine, ib. III, 1. Tous les spectateurs insulteront à notre honte, Massillon, Avent, Jugem. Les imitateurs des passions des grands insultent à leurs vices en les imitant, Massillon, Pet. car. Exempl. des gr. Le ministère anglais ne croyait pas avoir besoin de l'empereur pour les obtenir [certaines sécularisations] ; on insulta à ses offres en les rendant publiques, Voltaire, Louis XV, 7. Ah ! que dites-vous ? pourquoi insulter à mes derniers moments ? répondit Rustan d'une voix languissante, Voltaire, Blanc et noir.

  • 4Se révolter. Insultant contre le premier qui s'opposait à son avis, Pascal, Prov. II.

    Vieilli en ce sens.

  • 5S'insulter, v. réfl. S'adresser des insultes l'un à l'autre. Ils se sont insultés publiquement.

REMARQUE

" Ce mot est fort nouveau, mais excellent pour exprimer ce qu'il signifie. M. Coeffeteau l'a vu naître un peu devant sa mort, et il me souvient qu'il le trouvait si fort à son gré, qu'il était tenté de s'en servir, mais il ne l'osa jamais faire, à cause de sa grande nouveauté, Vaugelas, Rem. t. II, p. 979. " Ce mot est excellent en effet ; mais il remonte beaucoup plus haut que ne le pensait Vaugelas, puisqu'on en a des exemples du XIVe siècle.

HISTORIQUE

XIVe s. Et leur sembloit bien que il povoient insulter et reprocher aux Roumains, Bercheure, f° 44, recto.

XVIe s. Mieux eust il fait soy contenir en sa maison, royallement la gouvernant ; que insulter en la mienne, hostillement la pillant, Rabelais, Garg. I, 46. France, France fut là dedans à voix commune mise en cry, et les portes de la ville, malgré les Espaignols, ouvertes aux François, et à grand tumulte toute la commune insultée [révoltée] contreles Espaignols, Jean D'Auton, Annales de Louis XII, p. 56, dans LACURNE.

ÉTYMOLOGIE

Lat. insultare, de in, en, sur, et saltare, sauter (voy. SAUTER).