« noter », définition dans le dictionnaire Littré

noter

Définition dans d'autres dictionnaires :

Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

noter

(no-té) v. a.
  • 1Faire une note sur quelque chose. Vous ne savez point Ce qu'en mon manuscrit j'ai noté sur ce point, Régnier, Sat. X. Je noterai cela, madame, dans mon livre, Molière, Femm. sav. IV, 4.
  • 2 Fig. Remarquer. Mais, monsieur, me dit-elle, aurez-vous point soupé ? Je vous pri', notez l'heure…, Régnier, Sat. X. Certains fille un peu trop fière Prétendait trouver un mari… Point froid et point jaloux ; notez ces deux points-ci, La Fontaine, Fabl. VII, 5. Pour faire naître une occasion de noter ses fautes passées, Bossuet, Lett. 273. Voici un échantillon des lettres que je lui ai quelquefois écrites, et dont il est à noter que jamais, dans aucune de ses réponses, elle n'a paru piquée en aucune façon, Rousseau, Confess. X.
  • 3 Fig. Marquer d'une manière défavorable. Sans parler de ce qu'on a dit de la Chimène du théâtre, celui qui a composé l'histoire d'Espagne en français l'a notée dans son livre, de s'être tôt et aisément consolée de la mort de son père, Corneille, Cid, Avertissement. Je ne finirais jamais, si je voulais rapporter tous les titres dont il [Saint-Charles] les note [les comédiens], Bossuet, Coméd. 35. Aërius est noté dans les écrits des saints Pères comme l'auteur d'une hérésie, Bossuet, Hist. I, 11. Les Juifs eux-mêmes, à la poursuite desquels il [Jésus] a été crucifié, n'ont conservé dans leurs anciens livres la mémoire d'aucune action qui notât sa vie, Bossuet, ib. II, 12. L'iniquité est entrée comme un torrent ; on ne peut plus noter les impies, on ne peut plus les fuir, on ne peut plus les retrancher, tant ils sont forts, Bossuet, Sermons, Sur l'Église, 3. Le roi eut la bonté de représenter à M. de Sens l'intérêt de sa famille, aux dépens de laquelle il ne devait pas faire une action, belle pour lui, mais qui la noterait pour toujours [de n'être pas noble], Saint-Simon, 92, 210. Ennuyé d'être toujours noté pour avoir fait le moins d'ouvrage, Rousseau, Hél. V, 7.

    Par antiphrase. Vous êtes noté d'amitié pour moi, et c'est à Genève un crime irrémissible, Rousseau, Lett. à M. Moultou, Corresp. t. V, p. 221, dans POUGENS.

    Noter d'infamie, couvrir de honte. Parmi les sœurs… on ne recevra aucune fille dont la race soit notée d'infamie, Bossuet, Règl. filles propag. foi, I, 7.

  • 4Ecrire de la musique avec les notes. Ils [les Chinois] ont de la musique, et ils ne savent pas noter un air, encore moins chanter en parties, Voltaire, Lett. Chine, 5. On peut bavarder tant qu'on veut sur cet art sans y rien entendre ; et tel qui se mêle d'écrire fort doctement sur la musique, serait bien embarrassé de faire une bonne basse sous un menuet et même de la noter, Rousseau, 1er dial. Il est constant que les Grecs et les Romains notaient leur déclamation, et qu'ils l'accompagnaient d'un instrument, Condillac, Conn. hum. II, I, 3. C'est sans doute pour ces sortes de sons que Molière avait imaginé des notes, mais le projet de noter le reste de la déclamation est impossible, Condillac, ib. II, I, 6. La musique nota ses chants [de la religion], la peinture la représenta dans ses douloureux triomphes, Chateaubriand, Génie, III, I, 1.

    Absolument. L'ennui d'un long travail me donne des distractions si grandes, que je passe plus de temps à gratter qu'à noter, Rousseau, Confess. IV.

  • 5Se noter, v. réfl. Être noté, remarqué. Il y a des choses qui se notent.

    Être écrit en notes de musique. Quoique notre déclamation ne puisse pas se noter, il me semble qu'on pourrait en quelque sorte la fixer ; il suffirait qu'un musicien ait assez de goût pour observer, dans le chant, à peu près les mêmes proportions que la voix suit dans la déclamation, Condillac, Conn. hum. II, I, 6.

HISTORIQUE

XIIe s. Bien unt e clerc e lai sa parole escultée, E l'apostolies l'out par tuz les puinz notée, Th. le mart. 58. De pluisurs altres choses unt entr'els desputé, Dunt um ne m'a encore acointié n'acerté, Ne tut ne puet pas estre en mun livre noté, ib. 114. Tant com je vive, n'en ma vertu serai, Au branc d'acier vos noterai [chanterai] tel lai Dont ja n'arez à tel jor le cuer gai, Raoul de C. 197.

XIIIe s. En tix marciés [tels marchés] ne pot on noter nule loiaté, Beaumanoir, XXXIV, 47. Et poi [peu] voit-on de compaignie Que on n'i note vilonie, Lai du conseil. Ne t'accompaigne pas avec tes anemis ; car, se tu fais mal, il le noteront ; et, se tu fais bien, il le dampneront, Latini, Trésor, p. 360.

XVe s. Il faut noter que tous les hommes qui jamais ont esté grans… ont commencé fort jeunes, Commines, I, 10. Il n'est ja mestier de vous si encoulper [inculper] du peril que ceste prophetie notte, Perceforest, t. IV, f° 53.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. et espagn. notar ; ital. notare ; du lat. notare.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

NOTER. Ajoutez :
6Se noter, s'infliger à soi-même une note, une marque. Louis, électeur palatin, s'y opposa [à la proposition de violer le sauf-conduit donné à Luther dans la diète de Worms], comme à une chose qui flétrirait éternellement la nation germanique, et dit avec indignation que l'on ne devait pas souffrir que, pour rendre service aux prêtres, toute l'Allemagne se notât d'infamie en manquant à la foi publique, Hist. du concile de Trente, de Fra Paolo, trad. de le Courayer, t. I, p. 33.