« rayer », définition dans le dictionnaire Littré

rayer

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rayer [1]

(rè-ié) v. a.
  • 1Il se conjugue comme payer. Faire des raies. Rayer de la vaisselle en la nettoyant. Rayer du papier avec le crayon pour écrire droit. Certaines variétés de pyroxène qui ont si peu de dureté qu'elles se laissent souvent rayer par l'ongle, Beudant, Inst. Mém. scienc. t. VIII, p. 263.

    Terme de vénerie. Rayer les voies d'une bête, faire une raie derrière l'empreinte du talon d'une bête, pour l'indiquer aux chasseurs.

    Terme d'artillerie. Faire des rayures dans un canon, dans un fusil.

  • 2Effacer, à l'aide d'une raie qu'on passe sur l'écriture. Il a été rayé de dessus l'état de la maison du roi, Sévigné, 134. Babouc, après avoir rêvé [sur le cas d'un marchand qui vendait sa marchandise trop cher], le raya de ses tablettes [où il l'avait inscrit comme condamné], Voltaire, Babouc. Odet de Chatillon, cardinal, évêque de Beauvais, s'était fait protestant comme son frère, et s'était marié ; le pape l'avait rayé du nombre des cardinaux, Voltaire, Mœurs, 171. L'aimable auteur du Télémaque retranchait des répétitions et des détails inutiles dans son roman moral, et rayait le titre de poëme épique que quelques zélés indiscrets lui donnent, Voltaire, Temple du Goût. Louvois le raya [Charles Perrault] de la petite académie des médailles ; ce ministre n'aimait pas Colbert, et la haine qu'il portait au protecteur reflua sur le protégé, qui ne l'était plus, D'Alembert, Éloges, Ch. Perrault. Les inscriptions sont rayées du consentement des parties intéressées et ayant capacité à cet effet, ou en vertu d'un jugement en dernier ressort ou passé en force de chose jugée, Code Nap. art. 2157.

    Fig. Mais sitôt que d'un trait de ses fatales mains La Parque l'eut rayé [Molière] du nombre des humains, Boileau, Ép. VII.

    Fig. Rayez un tel, cela de vos papiers, de vos registres, ne comptez pas sur un tel, sur cela. Et rayez-moi de vos papiers, Scarron, Virg. IV. Moi, votre ami ? rayez cela de vos papiers, Molière, Mis. I, 1. Si vous daignez lire mon rogaton théologique [où Voltaire défend la Providence générale], je vous prie d'être bien persuadée que je ne crois point du tout à la providence particulière ; les aventures de Lisbonne et de Saint-Domingue l'ont rayée de mes papiers, Voltaire, Lett. Mme de Choiseul, 2 sept 1770.

    On lui a rayé sa pension, on l'a supprimée.

  • 3Compter comme nul. Tout ce que je pus faire, c'est de rayer ce discours [un propos imprudent de Ch. de Sévigné tenu à Gourville] de sur les tablettes de Gourville, Sévigné, mercr. des Cendres, 1680. Il faut rayer ce grand exemple [Saül et David], par lequel M. Jurieu a voulu montrer indéfiniment que le peuple fait les rois, Bossuet, 5e avert. 39. Ils sont obligés de rayer du nombre de leurs jours tous ceux qu'ils ont passés dans cet état duquel il ne leur reste aucune idée, Buffon, De la vieillesse et de la mort.

HISTORIQUE

XIe s. Li sans touz clairs parmi le cor lui raie [coule], Ch. de Rol. CXLVI.

XIIIe s. Li san li raioit par andeus les costés [par les deux côtés], et estoit navrés en deux lius, H. de Valenciennes, IV. Fille, à Dieu [je] vous commant, par qui li soleus raie [rayonne], Berte, VIII. Oies noires qui sont raïes d'autre color, Latini, Trésor, p. 205. Li articles qui est royés, Liv. des mét. 363. Briefment, que vous en conteroie ? Autre soleil leans ne roie Que cil charboucles [escarboucle] flamboians, la Rose, 20654. Il n'afiert pas à clerc, qu'il veste robe roiée, Beaumanoir, XI, 43.

XIVe s. Que mestier d'œuvre rayez estoit plus soutis [subtil] que le mestier de lanure planive, et que celuy qui bien sçavoit faire rayez sçavoit bien faire draps pleins, Ordonn des rois, t. II, p. 397.

XVe s. Puisqu'il n'est de gaiges raié, Orléans, Rond.

XVIe s. Ces yeux, comme deux flambeaux, rayant dans le cœur par une douce lumiere, Yver, p. 594. S'estant esveillé en sursault tout emeu du bruit et de la clarté de la lune, qui rayoit dedans la chambre, Amyot, César, 81. Il les cassa sur l'heure, et les fist rayer de dessus l'estat du roy, Carloix, V, 32. En rayant cette difference, Est. de la Roche, Arismetique, f° 48.

ÉTYMOLOGIE

Berry, rayer, rayonner, rayée de soleil ; provenç. rajar, raiar, rayar ; esp. radiar ; ital. radiare ; du lat. radiare, de radius, rayon (voy. RAIS). Rayer a signifié donner un rayon, faire comme un rayon de liquide et par conséquent couler, tracer un rayon, et de là une raie, rayer.