« rayon », définition dans le dictionnaire Littré

rayon

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

rayon [1]

(rè-ion) s. m.
  • 1Jet isolé de lumière. J'appelle rayon de lumière, ou simplement rayon, la ligne droite tirée de l'objet lumineux, ou éclairé, par laquelle se transmet l'action qui le rend visible, Malebranche, Rech. vér. éclairc. sur l'opt. t. IV, p. 427, dans POUGENS. Ô toi, soleil !… à de si noirs forfaits prêtes-tu tes rayons ? Racine, Théb. I, 1. Apollon, dépouillé de tous ses rayons, fut contraint de se faire berger, Fénelon, Tél. II. Aussitôt que Phébus eut répandu ses premiers rayons sur la terre, Fénelon, ib. IV. Comme un dernier rayon, comme un dernier zéphyre Anime la fin d'un beau jour, Chénier, Iambes. Les expériences newtoniennes démontrent… qu'un rayon solaire est réellement composé de sept rayons qui portent chacun une couleur invariable, Bonnet, Coul. corps, Œuv. t. X, p. 377, dans POUGENS. C'est un principe de l'optique que les rayons se courbent en s'approchant de la perpendiculaire, quand ils passent d'un milieu plus rare dans un plus dense, Sennebier, Ess. art d'observ. t. II, p. 121, dans POUGENS. On sait que le rayon violet échauffe moins le thermomètre que le rayon indigo ; celui-ci moins que le bleu ; ce nouveau rayon moins que le suivant, et ainsi de suite jusqu'au rouge, Thenard, Traité de chim. t. I, p. 94, dans POUGENS.

    Rayon direct, celui qui arrive à l'œil en ligne droite ; rayon rompu, celui qui s'écarte de cette ligne en passant d'un milieu dans un autre ; rayon réfléchi, celui qui, rencontrant une surface, est renvoyé par elle suivant une nouvelle direction ; rayons parallèles, ceux qui conservent toujours entre eux la même distance qu'à l'origine ; rayons convergents, ceux qui, partant de divers points, aboutissent à un même centre ; rayons divergents, ceux qui, partant d'un même point, s'écartent les uns des autres.

    Rayon visuel, rayon réfléchi par l'objet et parvenant à l'œil.

    Rayons chimiques, rayons qui, invisibles à l'œil, se manifestent par leur action chimique. Dans le spectre solaire, il y a, au delà du rouge, des rayons calorifiques, et, au delà du violet, des rayons chimiques.

    Rayon extraordinaire, celui qui, dans la double réfraction, s'éloigne de la direction de la réfraction ordinaire.

  • 2 Par analogie, il se dit du mouvement de la chaleur. Des rayons de calorique.
  • 3 Fig. Émanation, lueur, apparence. Le premier rayon de la liberté a fondu toutes les statues qui avaient été érigées aux mauvais princes, Guez de Balzac, le Prince, V. Et des rayons de joie éclairant ses appas, Tristan, Marianne, V, 2. La tienne [ton âme], encor servile avec la liberté, N'a pu prendre un rayon de générosité, Corneille, Cinna, IV, 7. Une céleste flamme D'un rayon prophétique illumine mon âme, Corneille, ib. V, 3. Quelque lieu d'où ton sang tire son origine, Tu dois être un rayon de l'essence divine, Rotrou, Bélis. III, 4. Enfin il y a eu un rayon de bonheur sur les Grignan depuis le gain de ce procès…, Sévigné, 9 déc. 1688. N'admirez-vous pas l'éclat et la puissance que donne la réverbération du soleil [la faveur royale] ?… n'aurons-nous jamais un rayon ? Sévigné, 21 oct. 1676. Le premier rayon d'espérance vint de la princesse palatine ; honteuse de n'envoyer que cent mille livres au roi et à la reine de Pologne, elle les envoie du moins avec une incroyable promptitude, Bossuet, Anne de Gonz. Les rois doivent pour leur repos, autant que pour la décoration de l'univers, soutenir une majesté qui n'est qu'un rayon de celle de Dieu, Bossuet, Mar.-Thér. On est bien aise de savoir que des proches sont dans la splendeur, parce qu'il doit en rejaillir sur nous quelque rayon, Bourdaloue, Pensées, t. II, p. 487. Quand, sur ton sommet enflammé [le Sinaï], Dans un nuage épais le Seigneur enfermé Fit luire aux yeux mortels un rayon de sa gloire, Racine, Athal. I, 4. Monsieur [à sa mort] n'eut qu'un rayon de connaissance d'un instant, et ce rayon ne revint plus, Saint-Simon, 93, 224. Le moindre rayon de vérité qui s'échappe au travers de la nue éclaire suffisamment les grands esprits, tandis que la vérité entièrement dévoilée ne frappe pas les autres, Fontenelle, Bernoulli. C'est dans les monarchies que l'on verra autour du prince les sujets recevoir ses rayons, Montesquieu, Esp. V, 12. Le rayon de la vie en ses yeux étincelle, Delille, Trois règ. III.
  • 4 Par analogie, certaines choses qui partent d'un centre commun et vont en divergeant. Une étoile à cinq rayons.

    Rayons d'une roue, bâtons qui vont du moyeu jusqu'aux jantes. Un rayon de la roue s'est rompu. Plutus est dans Paris… Tous viennent à genoux environner son char ; Les uns montent dessus ; les autres dans la boue Baisent en soupirant les rayons de la roue, Voltaire, Ép. XCIII.

  • 5 Terme de botanique. Rayons, les pédicules dont l'ensemble constitue une ombelle ; et, dans un assemblage quelconque de fleurs, celles qui occupent la circonférence du groupe.

    Rayons médullaires, lignes rayonnant du centre à la circonférence, à travers les couches ligneuses de la tige des dicotylédonées.

    Terme d'anatomie. Petites pièces osseuses, longues et grêles, soutenant les nageoires, et aussi stylets allongés qui, chez certains poissons, partent des vertèbres et des côtes, et supportent les chairs.

    Chez le cheval, on nomme rayons les divisions des membres : rayon de l'épaule, rayon de l'avant-bras, etc.

  • 6 Terme de géométrie. Demi-diamètre, ainsi dit parce que ces demi-diamètres partent du centre. L'obliquité de l'écliptique fut observée avec un quart de cercle de quinze coudées de rayon, Bailly, Hist astr. mod. t. I, p. 233.

    Fig. Mesurons le rayon de notre sphère et restons au centre, Rousseau, Ém. II.

    Rayon de courbure, le rayon du cercle osculateur d'une ligne courbe.

    Rayon vecteur, se dit, dans une courbe à foyers, de la droite qui va d'un foyer à un point de la courbe.

    Dans le système des coordonnées polaires, le rayon vecteur d'un point est la ligne droite qui va de ce point à l'origine des coordonnées.

    Par extension, à dix lieues, à quinze lieues de rayon, à dix lieues, à quinze lieues à la ronde.

    On dit de même : dans un rayon d'une lieue, à une lieue à la ronde.

  • 7Rayon de miel, morceau de gâteau de cire dont les cellules contiennent du miel ; ainsi dit à cause de la disposition en rayons des gâteaux des abeilles. Il [Samson] trouva un essaim d'abeilles dans la gueule du lion, et un rayon de miel, Sacy, Bible, Juges, XIV, 8.
  • 8Planches posées dans les armoires, dans les boutiques, dans les magasins, à l'effet de recevoir différents objets qu'on y range. Mettre les serviettes sur les rayons. Son bien ! n'en point garder était toute sa gloire ; Il ne remplirait point le rayon d'une armoire, Lamartine, Joc. Prol. 29.

    Tablettes où l'on place les livres dans une bibliothèque. Vous auriez l'honneur de reposer sur le même rayon entre Jean Hus, Socin, Zwingle, Luther et Calvin, Diderot, Mém. Promen. sceptique.

    Terme d'imprimerie. Planches disposées en forme de casier, pour mettre les casses lorsqu'elles ne servent pas.

  • 9 Terme de jardinage. Léger sillon tracé sur une planche, ou au bord d'une allée, avec le bout d'un bâton, pour disposer des plantes en ligne, ou pour y semer des graines menues.
  • 10 Terme de marine. Sortes de poignées qui débordent de la roue du gouvernail.

    Tringles qui servent de liaison aux pièces de la plate-forme des hunes.

  • 11 Terme d'anatomie. L'os du rayon, ou simplement le rayon, nom donné quelquefois au radius.
  • 12Nom d'une pièce de la coiffure des dames au XVIIe siècle. Plus de coiffures élevées jusqu'aux nues, plus de casques, plus de rayons…, Sévigné, 15 mai 1691. Les dames, en mettant leur rayon, agitent s'il faut faire un traité ou non, Maintenon, Lett. au duc de Noaill. 17 août 1710.

HISTORIQUE

XIVe s. En ung champ ou rayon d'une cha rue, Chron. de St-Denis, t. I, f° 215.

XVIe s. Et comme on voit souvent l'obscure nue Clere à moytié, par celestes rayons…, Marot, III, 77. La reverberation des rayons de la lune, qui donnoit contre les boucliers…, Amyot, Nicias, 39. François Ravaillac d'Angoumois, mettant le pied sur le raion d'une roue de derriere pour avancer son corps dans le carrosse…, D'Aubigné, Hist. III, 545. Je conseille, aiant tel plant en main, l'emploier, non à la taravelle, ains au raion ou fossé ouvert, De Serres, 165. L'os nommé rayon, autrement petit focile du bras, Paré, IV, 23. Il se fault contenter de la lumiere qu'il plaist au soleil nous communiquer par ses rayons, Montaigne, I, 250.

ÉTYMOLOGIE

Dérivé de rai (voy. RAIS) ; Berry, rion, rayon, raie de charrue, sillon.