« scandaliser », définition dans le dictionnaire Littré

scandaliser

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

scandaliser

(skan-da-li-zé) v. a.
  • 1Être une cause de chute, de péché. Dieu dit dans ses Écritures, que, si notre œil, notre pied ou notre main nous scandalise, nous devons les arracher et les couper, c'est-à-dire que, si les choses mêmes qui nous sont les plus chères, nous sont occasion de chute et de péché, il faut nous en séparer, Fléchier, Sermons, 3e dim. de l'avent.

    Scandaliser Jésus-Christ, commettre un péché scandaleux. Malheureux est celui qui scandalise Jésus-Christ même, en scandalisant le prochain, Bourdaloue, Sur le scandale, 1er avent, p. 92.

  • 2Donner, exciter du scandale. Votre vie scandalise tout le monde. Scandalisant Paris de ses vieilles tendresses, Arcas, sultan goutteux, veut avoir vingt maîtresses, Gilbert, le XVIIIe siècle. Qu'on chante et qu'on dise Quelque gaillardise Qui nous scandalise En nous égayant, Béranger, Cocag.
  • 3Ressentir une irritation comparée, par exagération, à celle que cause un scandale. Mme de Grignan vous fait les siens [compliments] de très bonne grâce ; je ne suis point accoutumée à la voir grosse, j'en suis scandalisée aussi bien que vous, Sévigné, Lett. à Bussy, 17 juin 1670. Cette indifférence scandalisa tous ceux qui la remarquèrent, Rousseau, Conf. VIII.
  • 4Se scandaliser, v. réfl. Se rendre soi-même un objet de scandale. On veut qu'il puisse demeurer dans cette occasion [de pécher], ou du moins qu'on ne puisse l'obliger à en sortir sans se scandaliser lui-même, Bourdaloue, Carême, Sur les tentations.

    Prendre du scandale, s'offenser. L'année dernière je ne m'aperçus point qu'on se scandalisât de voir, dans le Sertorius, Pompée mari de deux femmes vivantes, dont l'une venait chercher un second mari aux yeux mêmes de ce premier, Corneille, Sophon. Examen. Une telle action ne saurait s'excuser, Et tout homme d'honneur s'en doit scandaliser, Molière, Mis. I, 1. Il est bien ridicule de se scandaliser de la bassesse de Jésus-Christ, comme si cette bassesse était du même ordre duquel est la grandeur qu'il venait faire paraître, Pascal, Pens. XVII, 1, édit. HAVET. Il [le monde] se scandalise de leurs libertés les plus innocentes, Massillon, Avent, Conc.

HISTORIQUE

XIIIe s. Quant Diex commanda que li destres oil qui escandalisast fust ostez et gitez hors, Latini, Trésor, p. 459.

XVe s. Telles aventures sont tantôt eschandalisées et sçues, Froissart, III, IV, 35. Icelle femme tint vie dissolue et deshonneste avecques plusieurs hommes, tellement qu'elle en estoit moult diffamée et scandalisée, Du Cange, scandalizare.

XVIe s. Il ne faut point craindre à scandaliser [déshonorer] ceux qui scandalisent les autres, Marguerite de Navarre, Nouv. XLI. J'ay ouy parler d'une dame fort sujette à songer et rever toutes les nuits, disant la nuict tout ce qu'elle faisoit le jour ; si bien qu'elle mesme se scandalisa [se fit connaître] à l'endroit de son mary, qui se mit à l'ouyr parler, Brantôme, Dames gal. t. II, p. 431, dans LACURNE. Cleomenes, oyant un rhetoricien haranguer de la vaillance, s'en print fort à rire ; et l'autre s'en scandalisant…, Montaigne, III, 141.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. escandalisar ; espagn. escandalizar ; ital. scandalizzare ; du lat. scandalizare, de σϰανδαλίζειν, de σϰάνδαλον, scandale. On a dit aussi escandalir et scandaler.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

SCANDALISER.
5Anciennement, calomnier. Je craignais que cet homme [un gazetier]… ne m'eût scandalisé dans cette cour [la cour de Turin], les Aventures de M. d'Assoucy, t. II, p. 82, 2 vol. Paris, 1677.

Cette acception inusitée aujourd'hui se trouve au XVIe siècle.