« tabac », définition dans le dictionnaire Littré

tabac

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

tabac

(ta-ba ; au plur. des ta-bâ ; le c se lie : du ta-ba-k à priser) s. m.
  • 1Genre de la famille des solanées.

    Nom vulgaire et spécifique de la nicotiane tabac (solanées), servant aussi à désigner quelques autres espèces, telle que la nicotiane paniculée. Il arrive des malheurs même aux noms attachés aux plantes, témoin la nicotiane, qui ne s'appelle plus que tabac, Fontenelle, Morin. On a surtout cultivé le tabac dans cette province [la Virginie] et dans le Maryland ; c'est un commerce immense, et un nouveau besoin artificiel, Voltaire, Mœurs, 153. Le tabac demande une terre médiocrement forte, mais grasse, unie, profonde, et qui ne soit pas trop exposée aux inondations, Raynal, Hist. phil. XVIII, 9.

    Huile de tabac et huile volatile de tabac, nom donné parfois à la nicotianine.

  • 2Nom des différentes préparations que l'on fait subir aux feuilles séchées de cette plante, pour les usages qui consistent à en introduire la poudre dans les fosses nasales, à les mâcher, ou à les brûler afin d'en aspirer la fumée. C'est la passion des honnêtes gens ; et qui vit sans tabac n'est pas digne de vivre, Molière, Fest. I, 1. On n'attend pas même qu'on en [tabac] demande, et l'on court au-devant du souhait des gens ; tant il est vrai que le tabac inspire des sentiments d'honneur et de vertu à tous ceux qui en prennent, Molière, ib. Le tabac est divin, il n'est rien qui l'égale, Th. Corneille, Festin de Pierre, I, 1. Nous défendons à tous ecclésiastiques de faire coutume d'user du tabac en poudre, notamment et en tous cas dans les églises, pour exterminer cette indécence scandaleuse de la maison de Dieu, Bossuet, Ordonn. synodale, 1698. [Une femme qui] Fait même à ses amants, trop faibles d'estomac, Redouter ses baisers pleins d'ail et de tabac ? Boileau, Sat. X. Sa Majesté… voulant prévenir les accidents du feu qui pourraient arriver si les officiers mariniers, matelots et soldats qui y servent avaient la liberté de prendre du tabac en fumée, veut et ordonne que tout officier marinier, matelot ou soldat… soit privé d'un mois de solde et mis aux fers pendant huit jours, Ordre du roi, 1681, dans JAL. Il soutint, sous la présidence de M. Fagon, premier médecin, une thèse contre le tabac, dont le style et l'érudition furent généralement admirés et les préceptes fort peu suivis, Fontenelle, Berger. Eh bien, monsieur, boire et prendre du tabac, c'est ce qui fait aujourd'hui le mérite de la plupart des jeunes gens, Dancourt, Chev. à la mode, I, 5. Toujours barbouillée de tabac : on ne la prendrait pas pour une femme de province, Lesage, Turcaret, IV, 2. La première ferme de tabac fut en France de trois cent mille livres par an ; elle est aujourd'hui de seize millions, Voltaire, Mœurs, 153. La plante à laquelle l'usage semble avoir fixé le nom de tabac, fut apportée en France dès le règne de François II par Jean Nicot, ambassadeur de France auprès de Sébastien, roi de Portugal : insensiblement sa vertu fut connue et séduisit ; il en entrait assez considérablement dans le royaume en 1629, pour attirer l'attention du gouvernement ; une déclaration du mois de décembre soumit le petun, car alors il s'appelait ainsi, à payer 30 sols par livre de droits à son entrée dans le royaume, Forbonnais, Financ. de la France, t. I, p. 213. C'est au principe âcre, principe très voisin des huiles, que le tabac doit ses propriétés, Thenard, Traité de chim. t. III, p. 395, dans POUGENS.

    Tabac du régent, tabac à priser préparé avec des aromates.

    Tabac d'Espagne, tabac à priser parfumé.

    Tabac combustible, celui qui supporte, sans s'éteindre, le plus grand intervalle de temps entre deux bouffées consécutives. Tabac incombustible, celui qui s'éteint aussitôt qu'il a été allumé ou un instant après.

    Familièrement. Je n'en donnerais pas une prise de tabac, une pipe de tabac, je n'en fais aucun cas.

    Fig. et populairement, tomber dans le tabac, tomber dans la détresse.

  • 3Les tabacs, manufacture et administration des tabacs. Par là, tout s'aplanit dans la littérature… un jeune homme, dans les lettres, avance, fait son chemin, comme dans les sels et les tabacs, Courier, à MM. de l'Académie.
  • 4Il s'est dit pour tabagie. [Lesdits lieutenants généraux de police] auront la visite des halles, foires et marchés, des hôtelleries, auberges, maisons garnies, cabarets, cafés, tabacs et autres lieux publics, Brillon, Dict. des arrêts, Édit, oct. 1699, t. V, p. 186.
  • 5Faux tabac, la nicotiane rustique.
  • 6Tabac des montagnes ou des Vosges, nom vulgaire de l'arnica.

    Tabac marron, espèce de morelle.

  • 7Tabac d'Espagne, nom vulgaire d'un papillon, l'argyne paphie, lépidoptères diurnes de Fabricius, Europe.

ÉTYMOLOGIE

Picard, toubake ; espagn. tabaco ; ital. tabacco ; angl. tobacco ; allem. tabak, tobak, tubak. Les messagers que Christophe Colomb envoya dans l'île de Guahani, qu'il nomma San-Salvador, racontèrent qu'ils avaient rencontré plusieurs naturels qui tenaient en main un petit tison d'herbes dont ils aspiraient la fumée ; l'herbe brûlée se nommait cohiba, et le tison était appelé tabaco ; on a pris la partie pour le tout, et ce dernier mot seul a prévalu, Maxime du Camp, Revue des Deux-Mondes, 1868, 1er août, p. 709. La prononciation a varié quelque temps entre tabac et tobac ; et Colletet, dans ses épigrammes, a dit : Autant vaut prendre du tobac Dans une pipe parfumée.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

TABAC.
2Ajoutez :

Tabac de caporal, tabac caporal, tabac à fumer ordinaire.

5Faux tabac, la nicotiane rustique. Ajoutez : Dit aussi tabac rustique, tabac femelle, tabac du Mexique ; on le cultive avec succès dans les départements du sud-ouest ; c'est l'espèce la moins délicate (nicotiana rustica, L.).

Tabac des Savoyards, nom vulgaire de l'arnica des montagnes.