« éclair », définition dans le dictionnaire Littré

éclair

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

éclair

(é-klêr) s. m.
  • 1Lumière vive et soudaine qui, s'échappant du sein des nuages, précède ordinairement le bruit du tonnerre et est produite par les masses d'électricité atmosphérique, quand elles se transportent, à travers l'air, d'un nuage à un autre, ou d'une partie à une autre d'un même nuage. Pareille à ces éclairs qui dans le fort des ombres Poussent un jour qui fuit et rend les nuits plus sombres, Corneille, Hor. III, 1. Ni les éclairs ni le tonnerre N'obéissent point à vos dieux, Racine, Esth. I, 5. Les éclairs sont moins prompts, Voltaire, Mérope, V, 6.

    Fig. Le propre jour du triomphe du défenseur de Lille fut celui même de l'éclair qui précéda la foudre lancée contre celui qui n'avait pas voulu le secourir, Saint-Simon, 224, 8.

    Éclairs en nappes, éclairs très étendus, diffus et formés par une lumière qui illumine une grande partie du ciel.

    Éclairs de chaleur, ceux qui paraissent à peu près dans l'horizon et qui ne sont suivis d'aucun bruit, parce que le nuage où ils se montrent est trop éloigné pour que le son se fasse entendre.

    Éclairs fulminants, éclairs linéaires formés par un trait de lumière blanche ou purpurine, et parcourant en zigzag une grande étendue du ciel ; ils sont les plus dangereux.

    Éclairs sphériques, éclairs en forme de globes de feu et marchant lentement dans l'espace ; ils sont rares.

  • 2 Par extension, toute apparition subite et rapide de la lumière. Un éclair de soleil à travers la pluie. Ou d'un plomb qui fuit l'œil et part avec l'éclair, Je vais faire la guerre aux habitants de l'air, Boileau, Épît. VI. Dieu propice, ô Bacchus, toi dont les flots divins Versent le doux oubli de ces maux qu'on adore ; Toi devant qui l'amour s'enfuit et s'évapore, Comme de ce cristal aux mobiles éclairs Tes esprits odorants s'exhalent dans les airs, Chénier, Élég. XXII. Un intervalle affreux, un farouche silence Pour un instant succède à ce terrible bruit ; Quand un coupable attend le coup de la vengeance, Telle est l'horrible pause entre l'éclair qui luit, Et la foudre qui part, et la mort qui la suit, Masson, Helv. VII.

    Les feux que semblent jeter les pierres précieuses et les cristaux, et qui, provenant de la réfraction de la lumière, ne durent qu'un instant. Cette parure lance des éclairs.

    Terme de chimie. Lumière étincelante qui paraît à la surface du bouton d'or et d'argent qui reste sur la coupelle. L'opération [de l'essai à la coupelle] est finie lorsque la surface a été bien nettoyée, qu'il ne se forme plus de crasse, et que l'argent devient tout à coup net et brillant ; c'est ce que les ouvriers nomment l'éclair, Dict. des arts et mét. Amst. 1767, mines. Ce qui s'appelle, en termes de l'art, faire l'éclair, ib. essayeur.

    Terme de mer. Éclair de harengs, éclat de lumière qui paraît sur mer, lorsque les harengs passent en troupes, et qui ressemble assez à la lumière des éclairs.

  • 3 Fig. Tout ce qui présente de l'éclat, de la vivacité. Hélas ! sans frissonner, quel cœur audacieux Soutiendrait les éclairs qui partaient de vos yeux ? Racine, Esth. II, 7. Des éclairs de ses yeux l'œil était ébloui, Racine, ib. II, 9. C'est ce corps endurci, ce port audacieux, Ce bras toujours armé, cet éclair de ses yeux, Ducis, Macb. II, 2. Les éclairs qui sortaient des yeux du vieillard le rendaient semblable à Dieu, Chateaubriand, Atala, 281.

    Il se dit aussi de ce qui brille dans le style. J'en avais reçu d'elle une [lettre] fort brillante et qui jetait partout des éclairs, Méré, Œuvres posth. t. II, p. 88.

  • 4Se dit pour caractériser tout ce qui se montre et disparaît promptement. Mais comme un jour d'hiver où le soleil reluit, Ma joie en moins d'un rien comme un éclair s'enfuit, Régnier, Sat. X. M. de L… a passé ici comme un éclair, Sévigné, 443. Pendant cet heureux temps passé comme un éclair, Je me couchais sans feu dans le fort de l'hiver, Molière, Sgan. 2. Mais plus prompt que l'éclair le passé nous échappe, Racine, Esth. II, 3. Godet, évêque de Chartres, se montrait rarement à la cour, et toujours comme un éclair, Saint-Simon, 34, 135.

    Un éclair de génie, une inspiration soudaine. Un éclair de passion, transport soudain.

    Comme un éclair, se dit de quelqu'un qui va très vite. Il baisa la main et partit comme un éclair, Hamilton, Gramm. 5. Ramenez-moi comme un éclair à Constantinople, et vous serez payé sur-le-champ, Voltaire, Cand. 27.

  • 5Nom donné sur les côtes de la Manche aux anomies (mollusques).
  • 6Sorte de gâteau.

HISTORIQUE

XIIIe s. Seur la terre aparurent li esclaire de tes tonnoires, Psautier, f° 92.

XVIe s. Jà la nuyt estoit si obscure qu'on ne voyoit combattre que à l'esclair du feu de l'artillerie, qui tiroit si très menu que tonnerre n'eust là esté ouy, Jean D'Auton, Annales de Louis XII, ms. dans LACURNE. Sans la joye de vous voir en telle santé que tous les votres doivent desirer, je n'eusse sceu porter cet esclair d'ung si grant bien si mal receu [la visite de son frère], Marguerite de Navarre, Lett. CXXIX. Ilz remplirent toute la plaine d'un esclair d'acier et d'une lueur de cuivre, Amyot, P. Aem. 30. Il se leva une tempeste de tonnerres effroyables et d'esclairs ardents parmy, Amyot, Timol. 38. L'esblouit de sa splendeur et de son esclair, Charron, Sagesse, p. 331, dans LACURNE. Force flambeaux luysans comme l'esclaire, Tant que la nue en faisoit la nuict claire, la Marguerite des Marguerites, f° 199, dans LACURNE.

ÉTYMOLOGIE

Voy. ÉCLAIRER. Bourguign. éclar. Le XIIIe s. a esclaire, et, dans un texte anglo-normand, esclair, Éd. le conf. v. 3500. Dans les anciens temps, espart, éclair, espardre, éclairer (du latin spargere, répandre) était le mot le plus usuel.