« abréger », définition dans le dictionnaire Littré

abréger

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

abréger

(a-bré-jé. L'é se prononce è quand il est suivi d'une voyelle muette : j'a-brè-ge) v. a.
  • 1Rendre bref, réduire à une moindre étendue, à une moindre longueur. Abréger le temps. Éclaircir et abréger le discours. Abréger une narration. Voulant abréger son humiliation. C'est un bienfait de Dieu d'avoir abrégé les tentations avec les jours de Madame, Bossuet, Duch. d'Orl. On croit qu'il expose les troupes : il les ménage en abrégeant le temps des périls par la vigueur des attaques, Bossuet, L. de Bourbon. Les plaisirs pris sans modération abrègent plus les jours des hommes que les remèdes ne peuvent les prolonger, Fénelon, Tél. XVII. Cours par un prompt trépas abréger ton supplice, Racine, Mithr. II, 6. Mais aussitôt ma main, à moi seule funeste, D'une infidèle vie abrégera le reste, Racine, Andr. IV, 1. Je la voyais bientôt, abrégeant son absence, revenir empressée, Ducis, Oth. I, 5. Le cardinal de Richelieu avait abrégé ses jours par les inquiétudes qui le dévorèrent, Voltaire, Mœurs, 177.
  • 2Faire un abrégé. Cet auteur a abrégé lui-même son livre.
  • 3Faire paraître moins long. La conversation abrége le chemin.
  • 4Faire brève une syllabe. Quelques personnes abrégent l'o dans rôti, et disent roti.
  • 5 V. n. Chemin qui abrége.
  • 6Faire court, s'exprimer en peu de mots. En abrégeant. Abrégeons. J'abrége et je poursuis. Pour abréger, la chose s'exécute, La Fontaine, Rich.
  • 7S'abréger, v. réfl. Devenir plus court. La vie, déjà si courte, s'abrége souvent par les excès de tout genre.

HISTORIQUE

XIIe s. Ne ne porreit mis cors soffrir Travail ne peine ne labor ; Kar dès or s'abregent mi jor ; Molt me vois mais afebleiant, Benoit de Sainte-Maure, II, 8223.

XIIIe s. Ains voil [je veux] ma parole abregier Por vos oreilles alegier, la Rose, 19671. Je ne puis souffrir à abregier le plain service qu'on tient de moi, Beaumanoir, XXVIII, 7. S'aucuns abrege le fief qui est tenu de li, Beaumanoir, XLV, 25. Se il viaut [veut] son plait abregier, Ass. de Jerus. I, 237.

XIVe s. Ils lui dirent qu'il abregeast ses paroles, le Menagier, I, 9.

XVe s. Temps sans honneur et sans vray jugement, Aage en tristour, qui abrege la vie, Deschamps, Temps présent. Elle [m'amie] m'a dit que je boy trop souvent Et que cela m'abregeroit la vie, Basselin, 31. N'abregeons point nostre vie Par trop nous atedier, Basselin, 46. On dit que ses ans il [le buveur] abbrege, Basselin, 38. Avancezvous, prenez votre robe, abregez-vous [hâtez-vous] ; qu'il ne vous trouve ici, car vous seriez mort et moi aussi, Louis XI, Nouv. 34. Pour abreger [bref], Louis XI, ib. 75.

XVIe s. Le ciel m'a esté si benin et si favorable que d'abrevier un long martyre, Yver, 592. Il vouloit bien abreger son chemin et passer par lieux bien habités, Amyot, Ant. 52. Notaires, c'est à dire ecrivains qui par notes et lettres abregées figurent toute une sentence, Amyot, Caton d'Ut. 35.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. et espagn. abreviar ; ital. abbreviare ; bas-lat. abbreviare ; de ad, indiquant la direction de l'action, et brevis, bref (voy. BREF).