« amorce », définition dans le dictionnaire Littré

amorce

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

amorce

(a-mor-s') s. f.
  • 1Appât pour prendre certains animaux. Mettre l'amorce à l'hameçon.
  • 2 Fig. Tout ce qui fait mordre à, tout ce qui attire. Se laisser prendre à l'amorce des voluptés. Et quand l'âme une fois a goûté son amorce [de l'amour], Corneille, Hor. III, 4. Mais au lieu de goûter ces grossières amorces, Corneille, Cinna, V, 3. Permettez cependant qu'à ces douces amorces Je prenne un nouveau cœur et de nouvelles forces, Corneille, Pomp. IV, 3. Je verrai leur amour, j'éprouverai sa force, Sans flatter leurs désirs, sans leur jeter d'amorce, Corneille, Rodog. III, 3. L'hymen où je prétends ne peut trouver d'amorces Au milieu d'une ville où règnent les divorces, Corneille, Sertor. IV, 2. Que pour lui cette gloire eût eu trop peu d'amorces, Corneille, D. San. III, 1. Plus j'y vois de hasard, plus j'y trouve d'amorce, Malherbe, V, 4. Sa grace et sa vertu sont de douces amorces Qui, pour tirer les cœurs, ont d'effroyables forces, Molière, l'Étour. III, 2. Craignez d'un vain plaisir les trompeuses amorces, Boileau, Art poét. I. Il ne suffit pas d'ôter aux passions les amorces qui les irritent, Massillon, Pécheresse.
  • 3Poudre avec laquelle on enflamme la charge d'un fusil, d'un canon, d'une mine. Je brûle d'abord une amorce dans un pistolet, Rousseau, Ém. I. L'amorce brûla les moustaches du plus jeune spahi, Chateaubriand, Itin. 57. L'amorce est déjà conduite, et la mine prête à jouer, La Bruyère, 8.

    Prendre une ville sans brûler une amorce, sans tirer un coup de fusil. Puységur eut la gloire de l'occupation de toutes les places espagnoles des Pays-Bas sans brûler une amorce, Saint-Simon, 408, 108. Tessé croyait déjà tenir le bâton de maréchal, quoiqu'il n'eût jamais vu d'action, ni peut-être brûlé une amorce, Saint-Simon, 91, 202.

  • 4 Technologie. Dissolution d'or, d'argent ou de platine, dans laquelle on trempe les planches, lames ou vases de cuivre qu'on veut plaquer.

    Une petite quantité d'eau qu'on verse dans une pompe, pour qu'elle fonctionne.

HISTORIQUE

XVIe s. Ce sont amorces pour escumer l'argent des bourses, Calvin, Inst. 957. Ces amorces [promesses] les firent retourner à la charge avec une nouvelle vigueur, Mém. s. du G. ch. 29. Pensans que ce fussent les mesmes ruses, et les mesmes amorces de bonne esperance et de belles paroles…, Amyot, Timol. 16. Il appelle la volupté la principale amorche et le plus grand appast de mal faire que les hommes ayent, Amyot, Caton, 5. Ce jeune homme et ses compagnons ne faillirent pas, dès qu'ils ouïrent siffler l'amorce [de la mine], de prendre leur course, D'Aubigné, Hist. II, 135. Il despescha au comte du Ludde pour faire marcher les parties qui restoient de l'entreprise, comme ceci n'estant que l'amorce, D'Aubigné, ib. 170. Et au lieu qu'on envoie communement quelques sergens et harquebusiers pour faire brusler l'amorce, à ce mestier furent employez trente gentilshommes, D'Aubigné, ib. II, 280. Il les falut netoier à la merci des canonnades, desquelles on eschapoit une partie par le moien d'une clochette qui sonnoit quand l'amorce brusloit, D'Aubigné, ib. III, 144. Ledit seigneur se voulut venger, parquoy dressa une amorse [piége, embuscade] à ceux de la ville, Du Bellay, M. 117.

ÉTYMOLOGIE

Amors, participe passé de l'ancien verbe amordre, mordre à ; proprement, chose à laquelle on mord ; wallon, amoise, amorce dans le sens de pierre d'attente ; le simple est dans l'italien, morsa, pierre d'attente. Dans le XVIe siècle, on disait esmorce à côté de amorce. Le provençal a amorzar, amorsar, amorcer, amorzamen, amorcement ; ce qui suppose un substantif amorsa. L'orthographe amorce est mauvaise ; il faudrait écrire amorse. L'Académie devrait faire ce changement, autorisé d'ailleurs par d'anciennes orthographes en français ou en provençal.