« barbouiller », définition dans le dictionnaire Littré

barbouiller

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

barbouiller

(bar-bou-llé, ll mouillées, et non pas bar-bou-yé) v. a.
  • 1Salir, souiller. Barbouiller d'encre une page. Il se barbouilla le front avec des mûres. Tous les vers dont il aura barbouillé le papier.
  • 2Étendre grossièrement une couleur avec une brosse. Barbouiller de noir le devant d'une boutique.

    Absolument, peindre grossièrement. Il barbouillera longtemps sans rien faire de reconnaissable, Rousseau, Ém. II. En étudiant ils s'habituent à barbouiller, Rousseau, ib. I. Je ne veux plus peindre ; mais je veux encore moins barbouiller, Guez de Balzac, Avis écrit.

    Fig. Barbouiller le cerveau, troubler la tête. [Gens qui] … de lièvres cornus le cerveau nous barbouillent, Régnier, Sat. IX. Où diable a-t-il donc pris ce vilain mal [l'hypochondrie] ? - On dit Que tous les voyageurs se barbouillent l'esprit, Hauteroche, Nobles de prov. II, 3.

  • 3Faire beaucoup d'écritures inutiles. Je ne barbouille que de misérables narrations, Sévigné, 447. Je me reproche fort d'avoir barbouillé deux tomes pour un seul homme, quand cet homme n'est pas vous, Voltaire, Lett. Prusse, 21.

    Absolument. Cet auteur ne fait que barbouiller.

    Écrire mal. Je ne puis lire son écriture, il barbouille.

  • 4Compromettre. Le roi le voulut voir ; le père de Chavigny en fut surpris, car le jansénisme l'avait fort barbouillé avec lui, Saint-Simon, 53, 134. Je la connais ; elle se croit offensée, et elle est femme à vous barbouiller terriblement dans le monde, Dancourt, le Chevalier à la mode, III, 2.
  • 5Parler, exprimer d'une manière confuse. Il nous barbouilla je ne sais quelle excuse.
  • 6 V. n. Prononcer d'une manière vicieuse ou peu distincte. Il ne peut pas dire quatre mots sans barbouiller.
  • 7Se barbouiller, v. réfl. Se barbouiller de confiture, de crème.

    Fig. Se barbouiller de grec et de latin, en surcharger confusément sa mémoire. Pour avoir employé neuf à dix mille veilles à se bien barbouiller de grec et de latin, Molière, F. sav. IV, 3.

    Fig. Cet homme s'est bien barbouillé, il a gravement compromis sa considération. Dans le monde, à vrai dire, il se barbouille fort, Molière, Mis. II, 5.

HISTORIQUE

XVIe s. Cet argument seroit desja assez amplement deduit, n'estoit que les papistes nous barbouillent mettans en avant le concile de Nicene, Calvin, Instit. 63. Mais comme en l'eau elle [la grenouille] barbouille, Si fais-tu en l'art poëtique, Marot, III, 52. Si furent seize conjurez en tout, qui une nuict se barbouillerent le visage de suye, Amyot, Cimon, 2. Comme qui diroit les barbouillez de suye, Amyot, ib. 3.

ÉTYMOLOGIE

Espagn. barbullar ; ital. barbugliare. De bar péjoratif (voy. BAR…), et l'ancien mot bouille, bourbier. Icelles femmes prindrent le cors du dit Vale et le porterent en ung boullon ou bourbier qui est en un boys près la dite maison, Du Cange, bulio. Bouille est le latin bulla, bulle de l'eau bouillante, et de là, l'eau d'un bourbier. Le portugais bolha prouve que les deux ll du latin ont pu se mouiller.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

BARBOUILLER. - HIST. Ajoutez : XIVe s. R. Berbouillé, couturiers de robe (1351), Varin, Archives administ. de la ville de Reims, t. III, p. 17 (Barbouillé est ici nom propre)

XVIe s. Ajoutez : Si tout le papier que j'ay autresfois barbouillé pour les dames…, Montaigne, I, 293. Toute cette fricassée que je barbouille ici n'est qu'un registre des essais de ma vie, Montaigne, IV, 252.