« doubler », définition dans le dictionnaire Littré

doubler

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

doubler

(dou-blé) v. a.
  • 1Ajouter une chose à une autre de même valeur, augmenter d'une fois autant, multiplier par deux. Doubler le nombre, la dépense, la peine. Doubler ses capitaux.

    Doubler un corps de logis, joindre un autre corps de logis à la face de derrière de celui qui est déjà fait. Ce fut cette année qu'on doubla la galerie de Diane [à Fontainebleau], ce qui donna de beaux appartements, Saint-Simon, 97, 27.

    Doubler le pas, aller plus vite. J'allais doublant le pas comme un qui fend le vent, Régnier, Sat. X. Elle doubla le pas pour s'en approcher, Hamilton, Gramm. 10. Courons, doublons le pas, Pour le trouver [le bonheur], là-bas, là-bas, Béranger, Bonh.

    Terme de guerre. Doubler les rangs, mettre un seul rang sur deux. Doubler l'étape, faire étape double.

    Terme de marine. Doubler le sillage, faire plus de sillage.

    Terme de typographie. Répéter un mot, une ligne, un alinéa.

    Rejeter le mot final d'un vers à l'extrémité d'une autre ligne.

    Doubler les reins, se dit d'un cheval qui voûte le dos.

    Fig. Ne perds-je pas assez sans doubler l'infortune, Et perdre encor le bien d'avoir l'esprit égal ? Corneille, Agésil. II, 8.

  • 2 Terme de musique. Doubler une partie, la faire répéter à l'unisson ou à l'octave par un ou plusieurs autres instruments, sans changer l'harmonie, et uniquement pour renforcer le son. On a remarqué que le trio Veillons mes sœurs de Zémire et Azor n'est réellement qu'un duo, puisque la troisième partie y double constamment une des deux autres.
  • 3Garnir d'une doublure. Doubler un manteau, une robe.

    Doubler un vaisseau, le revêtir de planches, et aussi y mettre un doublage en cuivre.

  • 4Mettre en double. Doubler du fil, une serviette.
  • 5 Terme de théâtre. Remplir un rôle en l'absence du chef d'emploi. Doubler un rôle. Lorsqu'un acteur de province se présente pour doubler les premiers rôles, Voltaire, Lett. Richelieu, 27 mai 1767.

    Par extension, doubler un acteur.

    Fig. et absolument, servir en second. Le maréchal de Villeroy doubla comme maréchal sous M. de Luxembourg, et le maréchal de Joyeuse sous M. de Lorge, Saint-Simon, 22, 253.

  • 6 Terme de collége. Doubler une classe, en suivre les cours une seconde année.
  • 7 Terme de billard. Doubler une bille, la faire au doublé.

    Terme de jeu de paume. La balle a doublé, elle a touché deux fois la terre.

  • 8 Terme de marine. Doubler un cap, le franchir. Sous le règne de Jean II, prince éclairé, qui fit faire une application nouvelle de l'astronomie à la navigation, les Portugais doublèrent le cap qui est à l'extrémité de l'Afrique, Raynal, Hist. phil. I, 3. Nous voulions tous deux à la fois Doubler le même promontoire, Hugo, F. d'aut. 9. Cette locution vient de ce que, pour franchir un cap, on le longe deux fois.

    Doubler un autre bâtiment, le passer de vitesse.

    Terme de vénerie. Doubler ses voies, se dit d'un cerf qui par ruse revient sur ses pas.

  • 9 V. n. Devenir double. Leur nombre a plus que doublé.

    Terme de manége. Un cheval qui double des reins est celui qui fait plusieurs sauts de suite. En un autre sens, on dit qu'on double quand on quitte une ligne pour en suivre une autre.

    Terme de marine. Doubler sur les avirons, redoubler d'ardeur et de force dans la manœuvre des avirons, ce qui se commande ainsi : Doublez ! double !

    Terme de construction. Rapporter et sceller des bandes de pierre derrière les tranches de marbre.

  • 10Se doubler, v. réfl. Devenir double. En cette belle société, les douleurs se partagent et les joies se doublent, Guez de Balzac, liv. V, lett. 17.

HISTORIQUE

XIIe s. Par totens [par tout temps] doblent li felon les cols [coups] dont il bleciet chaent [tombent blessés], Job, 508. Et Tierris les ot [ouït] bien, sa force en a doplé, Ronc. p. 195. [Cela] Me fait dobler mes talens [mes désirs] De servir à [selon] mon pooir, Couci, XI.

XIIIe s. Car sa joie lui ert [sera] à cent doubles doublée, Berte, LXXXII. Angoisseux fui [je fus], moult troublez Por le peril qui fu doublez, la Rose, 1730. Tant eüst la langue doblée En diverses plicacions à trover escusacions, ib. 18324. Et se pains est aportés à charreite ou à cheval ou à asne dedens les bones [bornes] de la foire, sa coustume [taxe] ausi doublera, Liv. des mét. 311.

XIVe s. Si le limier double sa menée, c'est à dire qu'il s'efforce de crier et qu'il tire plus fort qu'il ne faisoit, Modus, ms. f° 21, dans LACURNE. Et supposé qu'il puist en ce point-ci regner, Et que Dieux si ne veille la vengence monstrer, Il est lassus poissans pour l'amende doubler, Guesclin. 15191.

XVe s. Par ces six notes qui sont appellées ut re mi fa sol la, l'on puet aprendre à chanter, acorder, doubler, quintoyer, tiercoier, tenir, deschanter, Deschamps, Poésies mss. f° 395.

XVIe s. Un fascheux corps vestu d'un satin gras, Un satin gras doublé d'un fascheux corps, Marot, III, 84. Haye, haye, dist le pilot, double le cap, et les basses. Doublé est, respondoyent les matelotz, Rabelais, Pant. IV, 22. Ils aiment mieux que l'injure leur soit doublée, que de penser comment ils rendront la pareille, Calvin, Instit. 1207. Voilà quand et quand à Villeneufve la garnison renforcée, les gardes doublées, D'Aubigné, Hist. II, 61. Terrefort en doublant le pas va se jetter en la tranchée, D'Aubigné, ib. II, 150. Estant pressé de partir si promptement, il n'avoit eu loisir de faire doubler [copier] lesdites informations, Du Bellay, M. 485. C'est ung passe temps que de veoir ung lievre doubler et redoubler, Palsgrave, p. 682.

ÉTYMOLOGIE

Bourguig. dôblai ; provenç. et espagn. doblar ; portug. dobrar ; ital. doppiare ; du latin duplicare, de duplex (voy. DOUBLE).

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

DOUBLER. Ajoutez :
11 Terme de filature. Mettre le fil en double. Nous nous servons, pour le retordage, du métier continu ; ce qu'il faut en machines à bobiner, à doubler, à gazer, est peu de chose à côté de cela…, Enquête, Traité de comm. avec l'Anglet. t. IV, p. 323.