« friser », définition dans le dictionnaire Littré

friser

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

friser [1]

(fri-zé) v. a.
  • 1Donner la forme de boucle aux cheveux. Friser ses cheveux aux fers, au fer, avec des fers, avec le fer. Fer à friser.

    Friser quelqu'un, lui friser les cheveux. Se faire friser par un coiffeur. Un laquais de la maison qui avait pris de l'amitié pour moi me frisa ; j'avais d'assez beaux cheveux, Marivaux, Pays. parv. 1re part.

    Se friser, friser à soi. Se friser la moustache.

    Fig. Un bel esprit méprise une histoire nue ; il veut l'habiller, l'orner de broderie, la friser, Fénelon, t. XXI, p. 232.

  • 2Friser le poil de certaines étoffes. Friser de la ratine, du drap.
  • 3Friser une serviette, la plier de façon qu'elle fasse de petites ondes.
  • 4 Terme d'horlogerie. Ôter la petite pointe des dents des roues.
  • 5 Terme de danse. Friser la cabriole, agiter les pieds avec vitesse tandis qu'on est en l'air.
  • 6 Fig. et familièrement. Raser la surface, effleurer en passant, ne toucher que superficiellement, comme fait le friseur quand il frise. La balle lui a frisé le bras. Il frise le bord des précipices et passe les mauvais ponts avec une assurance admirable, Guez de Balzac, liv. VII, lett. 38. Maints coups perdus frisent l'oreille, Scarron, Virg. V. Progné me vient enlever les morceaux, Caracolant, frisant l'air et les eaux, Elle me prend mes mouches à ma porte, La Fontaine, Fabl. X, 7. Comme le mouvement des roues était fort rapide, et qu'il fallait friser le but en tournant, pour peu que l'on manquât à prendre le tour, le chariot était mis en pièces et celui qui le conduisait pouvait être dangereusement blessé, Rollin, Hist. anc. Œuv. t. v, p. 84, dans POUGENS.

    Friser quelqu'un, passer fort près de lui.

    Terme de musique. Passer légèrement l'archet sur la corde d'un instrument, la toucher finement.

    Terme de jeu de paume. Friser la corde, se dit de la balle quand, passant très peu au-dessus de la corde, il s'en faut de très peu qu'elle ne soit arrêtée dans le filet ou que le coup ne soit perdu.

    Fig. Friser la corde, être bien près de subir quelque perte. L'abbé de Gamaches mourut en la peine [de devenir cardinal], après avoir frisé la corde d'être rappelé et disgracié, Saint-Simon, 354, 164. Nous étions trente et un, M. Bailly a eu quinze voix, et M. de Condorcet seize : Il a frisé la corde, disait M. d'Alembert, La Harpe, Corresp. t. III, p. 312, dans POUGENS.

  • 7Courir de très près le risque de. Elles [Mmes de Maintenon et des Ursins] jurèrent la perte de ce prince [duc d'Orléans] ; il se peut dire qu'il la frisa de bien près, Saint-Simon, 202, 197.

    Friser la corde, se dit de quelqu'un qui court le risque d'être pendu.

    Approcher de. Ces odes-là frisent bien le Perrault, Rousseau J.-B. Ép. II, 2.

    Friser l'impertinent, se montrer presque tel. Au fond les airs que je me donne Frisent l'impertinent, le suffisant, le fat, Destouches, Glor. II, 9.

    Friser la quarantaine, la cinquantaine, avoir bien près de quarante, de cinquante ans.

  • 8 V. n. Être frisé. Ses cheveux frisent naturellement.
  • 9 Terme d'imprimeur. Faire paraître les caractères doublement imprimés sur la feuille ; grand défaut dans l'impression.
  • 10Une corde, dans un instrument de musique, est dite friser quand la vibration en est troublée par un contact avec un corps étranger ou par quelque chose de semblable, par exemple la détorsion du boyau ou des spirales de cuivre qui l'entourent dans les cordes basses du piano, ou quand elle fait des vibrations assez grandes pour sonner sur la touche ou sur la corde voisine.
  • 11Se dit de l'action du sucre raffiné ou candi, lorsqu'il se précipite en cristaux menus.
  • 12 Terme de relieur. Il se dit de l'or qui devient inégal. Le plus léger des plis est préjudiciable ; Au lieu de se brunir, l'or frise et se guilloche, Lesné, la Reliure, p. 62.
  • 13 Terme de jeu de paume. Ils la touchent [la paume] en biaisant de leur raquette, ce qu'ils nomment couper ou friser, Descartes, Diopt. 1.
  • 14Se friser, v. réfl. Être frisé. Ses cheveux se frisent facilement.

    Se faire une frisure. Se parfume, se frise, et de façons nouvelles Veut avoir par le fard du nom entre les belles, Régnier, Sat. V. Elle ne voudra pas condamner par un exemple contraire les veuves qui commencent à se friser, Guez de Balzac, liv. VII, lett. 6.

  • 15 Terme de vétérinaire. Se friser, se dit du cheval qui, en marchant, touche incessamment avec le pied qui est en l'air le pied qui est sur le sol.
  • 16Se friser, passer fort près l'un de l'autre. Ils se sont frisés dans la rue.

HISTORIQUE

XVIe s. Sous l'œil palle de la nuict J'ay fait ma course premiere, Frizant la mer, qui reluit Sous la tremblante lumiere, Du Bellay, J. II, 37, recto. Je vous promets et voue, à la mode romaine, Immoler trois aigneaux frisez de noire laine, Du Bellay, J. III, 69, recto. …Ains que du premier poil la toison colorée Eust frizé son menton d'une barbe dorée, Du Bellay, J. IV, 72, verso. En mille crespillons les cheveux se friser, Du Bellay, J. VI, 27, recto. Adieu le soing de friser les cheveux, Du Bellay, J. VII, 55, recto. Ils receurent en moquerie ce qu'ils avoient pris au commencement en admiration, assavoir qu'on leur donneroit en brief un nouveau roi bien frisé, qui les mettroit au siecle d'or, D'Aubigné, Hist. III, 288. Mesmes les plus frisez de la cour, desarmez, meprisans tout peril, se trouvoient souvent aux tranchées, Castelnau, 157. La conqueste de la duché de Luxembourg qui fut rafflée et frisée en un rien, Brantôme, Cap. fr. t. I, p. 404. Il n'y a personne qui ne sache que, sans sa belle conduite [du connétable de Montmorenci] au camp d'Avignon, l'empereur frisoit [conquérait] la Provence, Brantôme, ib. t. II, p. 122.

ÉTYMOLOGIE

Esp. frisar, friser les draps. Il est probable que ce mot vient d'un radical germanique : frison, frisle ; angl. frisle, crépu ; si cependant on pensait que le sens de boucler y est détourné et que le sens primitif est orner, voy. FRISE 1.