« gaieté », définition dans le dictionnaire Littré

gaieté

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

gaieté ou gaîté

(ghé-té ; anciennement il était de trois syllabes, ghé-ye-té, comme on le voit par ces vers : Mais je vous avouerai que cette gaieté Surprend au dépourvu toute ma fermeté, Molière, D. Garc. v, 6. Mais que de gaieté de cœur On passe aux mouvements d'une fureur extrême, Molière, Amph. II, 6. ) s. f.
  • 1Belle humeur. À mon sens la gaieté vaut presque la sagesse, Imbert, Jaloux sans amour, I, 6. Ce pauvre diable ainsi parlant Mettait en gaieté tout l'hospice, Béranger, Ange gardien. Quelques pages plus loin, vous retrouverez la vivacité impétueuse de Lovelace, son incorrigible folie, et cette gaîté non plus du vice, mais du remords qui cherche à s'étourdir, Villemain, Litt. fr. XVIIIe siècle, 1re leçon.

    Avoir de la gaieté dans le style, écrire d'une manière agréable et enjouée.

    Vivacité de belle humeur franche et communicative. Les hommes mêmes n'ont pas en Perse la gaieté qu'ont les Français, Montesquieu, Lett. pers. 34. Le vrai caractère de la gaieté italienne, ce n'est pas la moquerie, c'est l'imagination, Staël, Corinne, VII, 2. Cette gaieté qui ne tenait en rien à la moquerie, mais seulement à la vivacité de l'esprit, à la fraîcheur de l'imagination, Staël, ib. II, 2.

    Pointe de vin. On commençait à être en gaieté.

    Ce cheval a de la gaieté, il a de la vivacité.

    On dit aussi : ce cheval est gai.

  • 2Paroles, actions gaies, folâtres. Ce sont des jeux de mains et des gaietés incroyables, Sévigné, 264. Cent escapades aussi fortes passèrent pour des gaietés et des gentillesses agréables, Saint-Simon, 259, 219.

    Une gaieté, petite pièce de théâtre ou autre, destinée à faire rire. Une petite gaieté qu'il s'était permise au théâtre de Fontainebleau, en y tournant en ridicule, dans un prologue de sa façon, les gentilshommes de la chambre, les lui avait aliénés, Marmontel, Mém. VI. Verre en main, Jean le vigneron Chantait les gaietés de Piron, Béranger, Nourrice.

  • 3De gaieté de cœur, loc adv. De propos délibéré et sans sujet. Les personnes qui écrivent de gaieté de cœur et seulement pour dire des gentillesses, ne sont pas excusables de ne m'avoir pas fait cet honneur [de ne m'avoir pas écrit], Voiture, Lett. 19. Il m'attaque de gaieté de cœur pour se faire connaître de quelque façon que ce soit, Molière, l'Impromptu, 3. C'est une licence que prennent messieurs les poëtes de mentir de gaieté de cœur, Molière, Comtesse d'Esc. 1. Troubler de gaieté de cœur la fortune d'une personne, Sévigné, 384. Les juges du chevalier de la Barre ont été des monstres sanguinaires de gaieté de cœur, Voltaire, Roi de Prusse, 268. Celui qui va se battre de gaieté de cœur, Rousseau, Hél. I, 57. Leur ineptie, comme le dit très bien Votre Majesté, fera gagner aux Allemands et aux Hollandais l'argent que la France perdra de gaieté de cœur, D'Alembert, Lett. au roi de Pr. 16 fév. 1782.

HISTORIQUE

XVIe s. …Pour domter la gayeté trop grande de leurs appetits, Calvin, Instit. 144. Boisverd voulut couvrir sa pauvreté [son peu d'hommes] d'une gayeté de cœur, jettant au devant de soi 80 arquebusiers pour faire fumée sur le haut de la levée, D'Aubigné, Hist. I, 266. Puis tournant sur son chemin, il prit Sahurne d'une mesme gaieté, D'Aubigné, II, 114. Qui pourra penser que le tiers estat aie en mesme temps au cœur la gaieté des armes, la peur au visage, et la faim entre les dents ? D'Aubigné, ib. 252. Ils trouvoient fort mauvais que l'on allast ainsi voluntairement de guayeté de cœur commencer la guerre à ces peuples, Amyot, Crass. 31.

ÉTYMOLOGIE

Gai ; provenç. gayeza ; anc. cat. gaeza ; ital. gaiezza.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

GAIETÉ. - HIST. Ajoutez :

XIIe s.i Chevels ot blons, molt avenant, Ielz [yeux] vers et pleins de gaieté, Benoit de Sainte-Maure, Roman de Troie, V. 5377. (On voit par là que ce mot, qui, dans l'historique, n'a des exemples que du XVIe siècle, remonte aux plus anciens temps de la langue.)

XIIIe s. Les dames vont devant plaines de gaieté, Brun de la Montaigne, V. 1394, éd. P. Meyer, Paris, 1875.