« hargneux », définition dans le dictionnaire Littré

hargneux

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

hargneux, euse

(har-gneû, gneû-z') adj.
  • 1Qui est d'humeur chagrine et disposé à tourmenter, à inquiéter les autres. Il arrive, il reprend, hargneux en ses façons, Régnier, Sat. V. Qu'une femme hargneuse est un mauvais voisin ! Corneille, Gal. du Palais, IV, 12. Eh ! madame… Si votre esprit est si hargneux Que le monde qui ne demeure Qu'un moment avec vous… Est déjà lassé de vous voir, La Fontaine, Fabl. VII, 2. La princesse d'Harcourt commença la première à devenir hargneuse, et Mme d'Armagnac aussi, Saint-Simon, 64, 62.

    Par extension. Il [l'albatros] paraît même n'être que sur la défensive avec les mouettes, qui, toujours hargneuses et voraces, l'inquiètent et le harcèlent, Buffon, Ois. t. XVIII, p. 5.

    Substantivement. L'intention du législateur avait sans doute été de corriger les querelleurs et les hargneux, en les assujettissant à ne pouvoir assouvir leur colère que comme les animaux, Saint-Foix, Ess. Paris, Œuv. t. IV, p. 366, dans POUGENS.

  • 2Il se dit des chevaux qui mordent ou qui ruent. Un cheval naturellement hargneux, ombrageux, rétif, produit des poulains qui ont le même caractère, Buffon, Quadrup. t. I, p. 56.

    Il se dit des chiens qui mordent. Le tout pour un âne rogneux, Pour un mouton pourri, pour quelque chien hargneux Dont j'aurai passé mon envie, La Fontaine, Fabl. X, 5. Un grand chien debout, maigre, hargneux, le nez presque en terre, de mauvaise humeur, Diderot, Salon de 1767, Œuv. t. XIV, p. 430, dans POUGENS.

PROVERBES

Chien hargneux a toujours l'oreille déchirée, c'est-à-dire il arrive toujours quelque accident aux gens querelleurs.

À cheval hargneux il faut une étable à part, c'est-à-dire il faut laisser seuls les gens hargneux.

SYNONYME

HARGNEUX, QUERELLEUR. Le hargneux est celui qui harcèle par de petites tracasseries ; le querelleur est celui qui fait des querelles ; la querelle est plus grave que la tracasserie. Hargneux implique la mauvaise humeur, mais n'implique pas, comme querelleur, la dispute avec colère.

HISTORIQUE

XIVe s. Qui a à faire à hargneux, douleur lui croist, Ménagier, II, 3.

XVIe s. Quand l'homme est sain ordinairement, il n'est pas si hargneux, que…, Amyot, Comm. discern. le flatt. de l'ami, 50. Je hais un esprit hargneux et triste, qui glisse par-dessus les plaisirs de la vie, et s'empoigne et paist aux malheurs, Montaigne, III, 312. Des hargnes ou grevures, qui sont tumeurs aux aines et aux bourses des testicules ; ce mot de hargne a esté donné à ceste maladie parce que ceux qui en sont vexés, coustumierement sont hargneux, c'est à dire mal-plaisans et criarts, Paré, VI, 14.

ÉTYMOLOGIE

Anc. franç. hargne, herne, hergne, mauvaise humeur, querelle ; Berry, hargne, querelle, et aussi giboulée : une hargne de gresi ; lorrain, harègne. Comme hargne signifie aussi hernie (du latin hernia), on a dit que l'infirmité physique avait donné son nom à l'infirmité morale ; mais les intermédiaires ne se rencontrent nulle part. Diez y voit l'ancien haut allemand harmjan, injurier, blesser. Le fait est que les mots hargner, harier, qui ont à peu près le même sens, peut-être harasser, peut-être l'ancien français haire, peine, chagrin, s'il n'est pas la haire prise métaphoriquement (voy. HAIRE à l'historique), semblent indiquer un radical har, analogue à l'anglais to harry, tourmenter, anglo-saxon, hergian.