« mille », définition dans le dictionnaire Littré

mille

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

mille [1]

(mi-l') adj. numéral des deux genres qui ne prend point la marque du pluriel
  • 1Dix fois cent. Mille hommes. Mille un fagots. Mille deux, mille trois, mille vingt. Deux mille. Dix mille. Cent mille. Après mille ans et plus de guerre déclarée, La Fontaine, Fabl. III, 13. Quoi ! pour noyer les Grecs et leur mille vaisseaux…, Racine, Iph. V, 4. Si un chef n'a eu que le bonheur de faire égorger deux ou trois mille hommes, il n'en remercie pas Dieu ; mais, lorsqu'il y en a eu environ dix mille exterminés par le feu et par le fer, et que, pour comble de grâce, quelque ville a été détruite de fond en comble, alors…, Voltaire, Dict. philos. Guerre.
  • 2Un grand nombre. Mille autres accidents bourreaux de notre vie, Régnier, Sat. XI. Mille songes affreux, mille images sanglantes, Ou plutôt mille amas de carnage et d'horreur, Corneille, Hor. I, 3. M. Coëffeteau disait : après mille fatigues et mille peines ; M. de Malherbe condamne cette façon de parler ; mais c'était à tort, puisqu'elle est usitée généralement de tout le monde, Vaugelas, Nouv. rem. p. 437, dans POUGENS. Mme de Chaulnes, qui vous fait mille amitiés, Sévigné, 525. Mme de Villars m'a chargée de mille et mille tendresses pour vous, Sévigné, 310. On lui dit mille fois que la franchise n'était pas une vertu de la cour, Fléchier, Duc de Mont. Et si par un chemin il [l'ennemi] entre en tes États, Qu'il en sorte par plus de mille, Racine, Esth. III, 3. Ô bienheureux mille fois L'enfant que le Seigneur aime ! Racine, Athal. II, 9. Sans hésiter, je donnerais mille vies pour obtenir la paix, Maintenon, Lett. au card. de Noailles, 14 juillet 1707. On faisait quelquefois souffrir mille morts à un innocent pour lui faire avouer un crime qu'il n'avait pas commis, Voltaire, la Princ. de Babyl. 10. Tu dis au temps d'enfanter, Et l'éternité docile, Jetant les siècles par mille, Les répand sans les compter, Lamartine, Harm. II, 1.

    Mille gens, et, elliptiquement, mille. Moi ! je serais cocu ?- Vous voilà bien malade ! Mille gens le sont bien…, Molière, Éc. des f. IV, 8. La cour de Claudius, en esclaves fertile, Pour deux que l'on cherchait en eût présenté mille, Racine, Brit. I, 2. Mille autres mieux que moi pourront vous en instruire, Racine, Bérén. III, 3.

  • 3Les Mille et une nuits, titre d'un recueil de contes arabes. Les Mille et un jours, titre d'un recueil de contes orientaux.

    Par extension. Mille et une, s'est dit pour un très grand nombre. Vous avez vu apparemment cette phrase dans une des mille et une brochures qu'on a faites contre mon ami, et vous la répétez au hasard : je vous jure, monsieur, qu'elle n'est pas de lui, Voltaire, Un chrét. contre 6 juifs, ch. 17.

  • 4Pris substantivement. Mille multiplié par vingt, par cent donne tant.

    On dit aussi le nombre mille, le numéro mille.

  • 5 S. m. Un mille, mille objets d'une certaine nature. Un mille de fagots. Cela se vend tant le mille.

    En termes de paveur, grand mille, onze cent-vingt-deux pavés que l'on vend pour mille. Cette manière de compter se nomme usage de rivière ; le mille ordinaire est de mille vingt, MORISOT.

    Populairement, des mille et des cents, une grande quantité.

REMARQUE

1. Dans la supputation ordinaire des années, quand mille est suivi d'un ou de plusieurs autres nombres, on retranche la dernière syllabe : l'an mil huit cent soixante deux, et non pas mille. On n'emploie mil que quand la date commence par cet adjectif numéral et Mercier a donné pour titre à son ouvrage : L'an deux mille quatre cent quarante. Mais Béranger a écrit par licence : Bénissons Dieu, Qui met chaque chose en son lieu : Celles-ci sont pour l'an trois mil ; Ainsi soit-il, Ainsi soit-il !

2. L'adjectif bon et peut-être aussi l'adjectif beau se placent au féminin pluriel devant mille livres (monnaie), dans le langage familier : Quarante bonnes mille livres de rente sont quelque chose de bon, Dancourt, le Chevalier à la mode, III, 1. Cet emploi ne serait pas permis avec un autre nombre : on ne dirait pas trois bonnes cents livres.

HISTORIQUE

XIe s. Set cenz chameauz et mil autours muez, Ch. de Rol. 111.

XIIe s. De l'or d'Espegne vaut dis mille mangons, Ronc. 29. Cil devant sont cent milie o [avec] escuz, ib. 45. De mil souspirs que je li doi par dete, Couci, VI. Bien aurons cent mile homes dedans quarante jours, Sax. XXVII.

XIIIe s. Seigneur, sachiés que mil et cent et quatre-vins et dis huit ans après l'incarnation Jhesu-Crist ot un saint home…, Villehardouin, I. Et sont en sa compaigne plus de mil et sept cent, Berte, IX. [Je] Ne vous feroie mal pour mil mars d'or pesé, ib. CXIV.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. espagn. et portug. mil ; ital. mille ; du lat. mille, que Corssen rattache à un radical sanscrit mil, réunir, rassembler.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

1. MILLE. Ajoutez :
6 Populairement, mettre dans le mille, réussir en plein ; locution tirée du jeu de tonneau, où le palet qui tombe dans la gueule de la grenouille figurée sur la table du jeu, amène le mille, qui est le plus fort numéro.
7Arbre de mille ans, le baobab, adansonia digitata, L., BAILLON, Dict. de botan. p. 257.