« outil », définition dans le dictionnaire Littré

outil

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

outil

(ou-ti ; l'l est toujours muette ; au pluriel, l's se lie : des ou-ti-z ingénieux) s. m.
  • 1Tout instrument de travail dont se servent les artisans. Celui qui ne peut faire son métier, faute d'outil, n'est pas pour cela moins bon artisan, Malherbe, le Traité des bienf. de Sénèque, IV, 21. Il y a plus d'outils que d'ouvriers, La Bruyère, II. Mme la duchesse de Choiseul a porté l'humanité jusqu'à consacrer une somme d'argent pour transporter à Taïti un grand nombre d'outils de nécessité première, des graines, des bestiaux, Bougainville, Voyage, t. II, p. 100 dans POUGENS.
  • 2 Terme d'ébéniste. Outil en ondes, machine composée d'une roue, avec une échelle au-dessous, et des ressorts qui font agir un fer taillant, dont les menuisiers en placage se servent pour faire leurs moulures en ondes sur les bois durs.
  • 3Outil crochu, ciseau tranchant, à l'usage des sculpteurs et des marbriers ; il est d'acier fin par un bout, qui est à demi courbé en crochet.
  • 4Outil plat, chez les lapidaires, petit cylindre, d'acier ou de cuivre, attaché au bout d'un long fer, dont ils se servent pour graver les pierres précieuses ; du côté de la pierre, la section du cylindre est plate et unie.
  • 5 Terme de tourneur. Outil de côté, se dit d'espèces de ciseaux à deux biseaux, un par le bout et un par le côté.

    PROVERBE

    Un méchant ouvrier ne saurait trouver de bons outils, c'est-à-dire un homme malhabile ne tire aucun parti de ce qu'il a sous la main. On dit dans un sens analogue : Un bon ouvrier se sert de toute sorte d'outils.

SYNONYME

OUTIL, INSTRUMENT. Outil se dit de ce qui sert aux arts mécaniques, instrument de ce qui sert dans les opérations qui ne sont pas exécutées par les artisans : des instruments de chirurgie. Cependant outil, mais c'est en poésie et anciennement, a été dit par Régnier des instruments de musique : Laissons le luth, la lyre et les outils divers, Régnier, Sat. IV.

HISTORIQUE

XIIe s. Les ustils as ovriers qui firent les degrés, Besague et cuignies, en unt od els portez, Th. le mart. 144. Kar rebuchié furent lur hustilz de fer, les uns et les altres, jesque al aguillon, Rois, p. 44.

XIIIe s. Il est ordené ou dit mestier, que nus [nul] du mestier, soit mestre ou vallès, ne puet ne ne doit penrre les ostiex à son voisin, ne retenir, se ce n'est de sa boine volenté, Liv. des mét. 56. Et si ne soit tisserans nus [nul] si hardis, qui venge [vende] l'oeustille à home deforain [étranger] pour porter hors de ceste vile…, Tailliar, Recueil, p. 428. Ne harnas, ne oeustil, ne beste, Tailliar, ib. p. 425. Se je reconnois devant justice que j'aie le ceval d'aucun en m'estable, ou ses ostix de quoi il doit ouvrer, Beaumanoir, XXXVII, 2.

XVe s. Et touz outieulx pour charpenter, Deschamps, Poésies mss. f° 356.

XVIe s. Les utils [organes] qui servent à descharger le ventre ont …, Montaigne, I, 98. La science est un util de merveilleux service, Montaigne, I, 159. C'est un util de merveilleux service que la memoire, et sans lequel le jugement fait bien à peine son office, Montaigne, II, 17. Et quant à la parole, estimant que c'estoit un second corps et un util necessaire à tout homme qui veut manier de grandes affaires…, Amyot, Caton, 2. Puis qu'entre mille mensonges n'y a qu'une verité, mille opinions de mesme chose, une seule veritable, pourquoy n'examinerai-je avec l'outil de la raison, quelle est la meilleure, plus vraye, raisonnable, honneste, utile, commode ? Charron, Sagesse, II, 2. Mains qui font de la plume Un outil de bourreau qui destruit et consume, D'Aubigné, Tragiques, éd. LALANNE, p. 142.

ÉTYMOLOGIE

Berry, util ; wall. usteie, s. f. ; bourg. uti ; pic. otieu. Comme l's est dans les plus anciennes formes et dans le wallon, on ne peut y voir une lettre épenthétique, et il faut rejeter le latin utensile, qui d'ailleurs aurait donné ousil et non ostil. Diez, rapprochant le comasque usedêl et le milanais usadej, qui signifient ustensiles de cuisine, et qui viennent de l'italien usare, user, se servir, voit dans ostil une formation analogue. Mais comme l'a long de usare aurait difficilement disparu, il imagine une forme usitellum, dérivée de usitare, se servir. C'est bien du côté d'usus qu'il faut chercher, mais non tout à fait de cette façon : le bas-latin avait usibilia, ustensiles (texte du IXe siècle) ; au lieu d'usibilia, on a probablement dit usitilia, d'où ustil. C'est vers le XVe et le XVIe siècle que la forme sans s a pris le dessus ; il est possible qu'alors on ait imaginé une assimilation entre ostil et utile.