« prouver », définition dans le dictionnaire Littré

prouver

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

prouver

(prou-vé) v. a.
  • 1Établir la vérité d'une chose par des raisonnements convaincants, par des témoignages incontestables ou par des pièces justificatives. Voyons donc comment vous prouvez ce que vous dites, et vous verrez ensuite comment je prouve ce que je dis, Pascal, Prov. XII. Les exemples qu'on prend pour prouver d'autres choses, si on voulait prouver les exemples, on prendrait les autres choses pour en être les exemples ; car, comme on croit toujours que la difficulté est à ce qu'on veut prouver, on trouve les exemples plus clairs et aidant à le montrer, Pascal, Pens. VII, 3, éd. HAVET. Je n'entreprendrai pas ici de prouver par des raisons naturelles ou l'existence de Dieu, ou la Trinité, ou l'immortalité de l'âme…, Pascal, ib. x, 5. Qu'ils viennent donc sur moi prouver leur zèle impie, Racine, Iphig. v, 3. La colonne rostrale, érigée dans Rome par les contemporains de Duillius, est sans doute une preuve de la victoire navale de Duilius ; mais la statue de l'augure Naevius, qui coupait un caillou avec un rasoir, prouvait-elle que Naevius avait opéré ce prodige ? Voltaire, Dict. phil. Histoire. Sauttern n'a pas besoin que je lui prouve ma confiance ; mais le public a besoin que je lui prouve que je la sais bien placer, Rousseau, Conf. XI.

    Être prouvé ceci ou cela, se dit d'une personne que l'on prouve être ceci ou cela. Le cardinal de Bouillon fut prouvé l'inventeur et celui qui avait mis de Bar en besogne de cette fabrication [d'un cartulaire], Saint-Simon, 384, 186.

    Absolument. Nous avons une impuissance de prouver invincible à tout le dogmatisme ; nous avons une idée de la vérité invincible à tout le pyrrhonisme, Pascal, Pens. VIII, 9.

  • 2 Par extension, montrer, marquer, donner lieu de connaître, avec un nom de chose pour sujet. Cette action prouve beaucoup de bonté.
  • 3Se prouver, v. réfl. Être prouvé. Tout ce qu'ont dit les anciens, soit bon, soit mauvais, est sujet à être bien répété ; et ce qu'ils n'ont pu eux-mêmes prouver sur des raisons suffisantes, se prouve à présent par leur autorité seule, Fontenelle, Oracles, 1, Préambule.

    PROVERBE

    Qui prouve trop ne prouve rien, c'est-à-dire souvent à force de vouloir persuader une chose, on la rend moins croyable.
    Ces deux personnages n'ont pas réussi : qui prouve trop ne prouve rien, dit je ne sais qui, Sévigné, 117. N'y ayant rien de plus assuré que cette règle de dialectique : qui prouve trop ne prouve rien, Bossuet, 5e avert. 27.

HISTORIQUE

XIe s. Se il ne pot prover sor saintz que melz [mieux] ne sot [il ne sut] juger…, Lois de Guill. 15.

XIIe s. Sur les chevaus provez [éprouvés] et asaiez, Ronc. p. 57. Sire compeing, c'est veritez provée, ib. p. 90. E li sainz comença mot à mot à prover, U li reis par ces leis voleit tendre e aler, Th. le mart. 57.

XIIIe s. Se bien ne vous prouvez [si vous ne vous comportez bien], de la dolor [je] mourrai, Berte, VII. Et je suis prest que je le te preuve de mon cors contre le tien, Ass. de Jér. 119. Il sanlleroit qu'il en fust subornés, et il meisme se proveroit à parjures, Beaumanoir, XL, 38. Por ces raisons proverent li sage, que la lune emprunte dou soleil la lumiere resplendissant qui vient jusqu'à nos, Latini, Trésor, p. 139.

XVIe s. Ils nient la vraye pieté pouvoir consister, si toutes ces choses ne sont crues, combien qu'ils n'en preuvent rien par la parole de Dieu, Calvin, Instit. Dédic. Qui mieux abreuve [ses témoins], mieux preuve, Loysel, 770.

ÉTYMOLOGIE

Berry, preuver ; bourg. prôvai ; picard, prover ; prov. proar ; espagn. probar ; port. provar ; ital. probare ; du lat. probare, qui a même radical que probus (voy. PROBE). Au XVIIe siècle, prouver et preuver étaient tous deux en usage (MARG. BUFFET, Observ. p. 77).