« reléguer », définition dans le dictionnaire Littré

reléguer

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

reléguer

(re-lé-ghé. La syllabe lé prend un accent grave quand la syllabe qui suit est muette : je relègue, excepté au futur et au conditionnel : je reléguerai ; je reléguais, nous reléguions, vous reléguiez ; que je relègue, que nous reléguions, que vous reléguiez) v. a.
  • 1Confiner en un endroit déterminé, avec conservation des droits civils et politiques, à la différence du banni qui les perdait (Quippe relegatus, non exsul dicor… Nec mihi jus civis, nec mihi nomen abest, a dit Ovide, Tristes, II, 135). L'empereur ne le fit point condamner [Ovide] par un arrêt du sénat, et il se servit du terme de reléguer, qui, dans le droit romain, était plus doux que le terme bannir, Rollin, Hist. anc. liv. XXV, 1, 2, 2.
  • 2Dans le langage général, infliger le confinement en un lieu déterminé. S'il [le mort] est trouvé coupable de crimes qui soient d'un genre à pouvoir être expiés, il est relégué dans le Tartare pour un temps seulement, et avec assurance d'en sortir quand il aura été suffisamment purifié, Rollin, Hist. anc. Œuv. t. IV, p. 490, dans POUGENS. Le parlement de Paris vient d'être relégué dans une petite ville qu'on appelle Pontoise, Montesquieu, Lett. pers. 140. Dépouillé de tous ses biens, qui étaient immenses, il [Basile Galitzin] fut relégué sur le chemin d'Archangel, Voltaire, Russie, I, 5.

    Par extension. Ce n'est pas assez de faire une guerre heureuse contre ces barbares [les Turcs]… ce n'est pas assez de les humilier, il faudrait les reléguer pour jamais en Asie, Voltaire, Lett. à Catherine II, février 1769.

  • 3Mettre, tenir à l'écart. Il relégua son fils à la campagne. Pourquoi, de cette gloire exclu jusqu'à ce jour, M'avez-vous, sans pitié, relégué dans ma cour ? Racine, Brit. II, 3. Les deux princes ne furent pas plutôt en âge de régner, qu'ils reléguèrent Œdipe au fond de son palais, Barthélemy, Anach. Introd. part. 1.

    Fig. Ce n'est pas qu'on y jouât alors [dans la tragédie, chez les anciens] les passions des jeunes gens ; nous avons vu à quel rang on les reléguait [dans la comédie], Bossuet, Coméd. 18.

  • 4Fig. il se dit des choses qu'on met à l'écart. Il faut reléguer ces vieilleries au grenier. Il faut reléguer au rang des fables ces majestueux palais destinés à loger les incas dans le lieu de leur résidence et dans leurs voyages, Raynal, Hist. phil. VII, 6.
  • 5Se reléguer, v. réfl. Se retirer, se mettre à l'écart. Ses disciples [d'Edesius] l'empêchent d'aller, par une crainte indigne d'un philosophe [la persécution], se reléguer dans le fond d'une forêt, Diderot, Opin. des anc. philos. (éclectisme).

HISTORIQUE

XIVe s. Ne bannir ne releguer, Oresme, Thèse de MEUNIER.

XVIe s. Les Atheniens le bannirent et releguerent hors de leur ville pour cinq ans, Amyot, Thém. 43. L'heremite relegué aux deserts d'Arabie, Montaigne, IV, 156.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. relegar, releguar ; espagn. relegar ; ital. relegare ; du lat. relegare, de re, et legare, envoyer (voy. LÉGAT).