« respecter », définition dans le dictionnaire Littré

respecter

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

respecter

(rè-spè-kté) v. a.
  • 1Porter respect, honneur. Ils n'ont point appréhendé de tomber dans la haine pour éviter le mépris ; ils se sont fait craindre, ne pouvant se faire respecter, Guez de Balzac, De la cour, 2e disc. Le pape saint Léon, plus puissant qu'Aétius et que les armées romaines, se fit respecter par ce roi barbare et païen [Attila], et sauva Rome du pillage, Bossuet, Hist. I, 11. Respectez, leur disait-il [saint Grégoire de Nazianze, aux princes], votre pourpre, respectez votre puissance qui vient de Dieu, et ne l'employez que pour le bien, Bossuet, Mar.-Thér. M. de Montausier fut respecté parce qu'il était juste, aimé parce qu'il était bienfaisant, et quelquefois craint parce qu'il était sincère et irréprochable, Fléchier, Duc de Mont. Notre joie insulterait au peuple, qu'il faut respecter sans le craindre, Maintenon, Lett. au duc de Noail. 13 juin 1710. Pourquoi donc voulez-vous que par un sot abus Chacun respecte en vous un honneur qui n'est plus ? Boileau, Sat. V. Le latin dans les mots brave l'honnêteté ; Mais le lecteur français veut être respecté, Boileau, Art p. II. Sur d'éclatants succès ma puissance établie A fait jusqu'aux deux mers respecter Athalie, Racine, Ath. II, 5. Non, non : d'un ennemi respecter la misère, Sauver des malheureux, rendre un fils à sa mère… Seigneur, voilà des soins dignes du fils d'Achille, Racine, Andr. I, 4. Quoi, l'histoire ne doit-elle pas respecter les rois ? - Commines : Les rois ne doivent-ils pas respecter l'histoire et la postérité ? Fénelon, Dial. des morts mod. (Louis XI, Commines). Nous respectons les décisions du monde, Massillon, Panégyr. St Étienne. Encore M. Delisle avait-il jugé à propos de respecter jusqu'à un certain point les préjugés établis, et de n'user pas, à toute rigueur, du droit que lui donnaient ses découvertes, Fontenelle, Delisle. Si César n'avait point eu le gouvernement de la Gaule transalpine, il n'aurait point corrompu ses soldats, ni fait respecter son nom par tant de victoires, Montesquieu, Rom. 11. Opinion publique ! Des actions des rois maîtresse tyrannique ! Idole méprisable, et qu'il faut respecter, P. Lebrun, Marie St. IV, 8.
  • 2 Fig. Ne point toucher à, ménager, ne point interrompre. Respectez ces fatales maladies qui sont envoyées d'en haut, et où il se remarque quelque chose d'étranger et d'inconnu, Guez de Balzac, De la cour, 6e disc. Adieu, ma très chère… respectez votre côté, respectez votre tête, on ne sait où courir, Sévigné, 19 avr. 1689. Moi-même, résistant à mon impatience, Et respectant de loin leur secret entretien, J'ai longtemps, immobile, observé leur maintien, Racine, Bajaz. III, 2. Cet arbre… que la hache du laboureur a toujours respecté, Fénelon, Tél. XXIII. Il comptait tranquillement combien il lui restait encore de jours à vivre, et enfin, au dernier jour, combien d'heures ; car cette raison qu'il avait tant cultivée fut respectée par la maladie, Fontenelle, Carré.

    Il se dit aussi des personnes en un sens analogue. Jadis Priam soumis fut respecté d'Achille, Racine, Andr. III, 6.

  • 3Se respecter, v. réfl. Agir de manière à conserver l'estime de soi-même. Sa plus grande fierté [de Mme de Grancey] consistait à se respecter soi-même, à ne rien faire dont elle pût rougir en secret, Voltaire, Facét. Femm. soy. soum. Le premier des devoirs est de se respecter, Delavigne, la Pop. IV, 2.

HISTORIQUE

XIe s. Rois à corone ne doit estre loié [lié] ; Mès por avoir [argent] iert [sera] mes cors respeitié, li Coron. Looys, V. 1314.

XVIe s. Respectant et craignant sa raison et sa conscience, si qu'il ne puisse sans honte bruncher en leur presence, Montaigne, I, 279.

ÉTYMOLOGIE

Respect. L'ancienne langue avait respiter, mais qui voulait dire : donner répit.