« sourdre », définition dans le dictionnaire Littré

sourdre

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

sourdre

(sour-dr'), il sourd, ils sourdent ; il sourdait ; il sourdit ; il sourdra ; il sourdrait ; qu'il sourde ; qu'il sourdît ; sourdant ; point de participe passé v. n.
  • 1En parlant des eaux, sortir de terre. L'eau sourd. Que dirai-je des bains que produit le sein de la terre pour une infinité de maladies, et des eaux chaudes qui sourdent aux rives de la mer ? Malherbe, Traité des bienf. de Senèque, IV, 5. Là sourdait une eau qui avait la propriété de rajeunir : c'est ce qu'on appelle encore aujourd'hui la fontaine de Jouvence, La Fontaine, Psyché, II, p. 176. On trouve des eaux douces le long de la mer, en remontant vers Gaza ; il suffit de creuser avec la main dans le sable pour faire sourdre au bord même de la vague une eau fraîche, Chateaubriand, Itinér. 3e part.
  • 2Se dresser, s'agiter. Nous entendrons… Ces millions de morts, moisson du Fils de l'homme, Sourdre confusément dans leurs sépulcres, comme Le grain dans le sillon, Hugo, F. d'aut. 6.

    Fig. Entre le Clerc et son ami Coras, Deux grands auteurs rimant de compagnie, N'a pas longtemps sourdirent grands débats Sur le propos de leur Iphigénie, Racine, Épigr. I.

  • 3 Fig. Sortir, résulter. C'est une affaire dont on a vu sourdre mille inconvénients. De cette grâce [faite à Fleury de monter dans le carrosse du roi] sourdit une dispute de préférence et de préséance, Saint-Simon, 466, 122.
  • 4 Terme de marine. Se disait d'un nuage s'élevant à l'horizon.

    Sourdre au vent, se disait d'un navire marchant au plus près du vent.

REMARQUE

Buffon a dit sourdissent au présent de l'indicatif ; c'est un barbarisme : Les sources chaudes qui découlent des montagnes, ou sourdissent à l'intérieur des cavités de la terre, Théor. terr. part. hyp. Œuvr. t. IX, p. 361.

HISTORIQUE

XIe s. Quant de paiens li surdent les antgardes, Ch. de Rol. CCXI.

XIIe s. Quant il esguardeit si le hanap tut entur Et vit le vin si truble qu'il en out grant hisdur, Dous iraignes [araignées] vit surdre del funz d'une tenur, Th. le mart. 105. Il nel dist pur nul mal, mais en conseil de fei ; Surdre i vit grant peril e mult mortal desrei, ib. 41. Aval le capitral, tut entur surstrent dous ordres de male granates, Rois, p. 253.

XIIIe s. Et i sordoient li bain tuit chaud li plus bel de tout le monde, Villehardouin, CLXVI. Bien est droiz qu'il en sorde guerre ; Si n'en doit nus avoir pitié, Ren. 18864. Par là, soit esté, soit ivers, S'encorent dui flueves divers, Sordans de diverses fontaines Qui moult sunt de diverses vaines, la Rose, 6005.

XVe s. Ceste nuyt sourdit une grande tourmente, Commines, III, 5. Dieu luy sourdit ung ennemy qui n'avoit nulle force, Commines, V, 18. Il se leva sur pied et battit tant madame qu'elle ne pouvoit sourdre [se lever], Louis XI, Nouv. XXXIX.

XVIe s. Perceant la terre, il en veit sourdre Tages, demi-dieu, Montaigne, I, 45. De ce vice sourdent plusieurs grandes incommoditez, Montaigne, I, 234. Nous ne sentons point le cours des heures en oyant deviser un sage, disert et eloquent vieillard, en la bouche duquel sourt un flux de langage plus doux que miel, Amyot, Préf. XIV, 42. Il ne s'entremesla point des troubles qui depuis sourdirent entre les Grecs, Amyot, Timol. 47. Toutes et quantes fois, dit-il, que je frapperay du pied seulement la terre d'Italie, je feray sourdre de toutes parts gens de guerre à pied et à cheval, Amyot, Pomp. 82.

ÉTYMOLOGIE

Wallon, sûd ; provenç. sorger, sorzir ; espagn. surgir ; portug. sordir, surdir ; ital. sorgere ; du lat. surgere, de sursum, en haut, et regere, diriger (voy. RÉGIR) ; c'est la contraction de surrigere. Sourdre est la forme française du latin surgere ; surgir a été refait sur le modèle des autres langues romanes.