« anéantir », définition dans le dictionnaire Littré

anéantir

Définition dans d'autres dictionnaires :

Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

anéantir

(a-né-an-tir) v. a.
  • 1Faire rentrer dans le néant. Dieu peut anéantir l'univers.
  • 2Détruire. Les barbares ont anéanti l'empire romain. L'homme anéantit plus d'individus vivants que tous les carnassiers n'en dévorent, Buffon, Animaux carnassiers. Ô ciel ! anéantis ma fatale existence, Voltaire, Alz. V, 3.
  • 3 Fig. Jeter dans un accablement profond. J'ai vu des femmes que la crainte de la douleur anéantissait.
  • 4 Fig. Anéantir un acte. Anéantir une coutume. Ainsi donc un perfide, après tant de miracles, Pourrait anéantir la foi de tes oracles ? Racine, Esth. I, 4. Son impiété Voudrait anéantir le Dieu qu'il a quitté, Racine, Athal. I, 1. Que peuvent des évêques qui ont anéanti eux-mêmes l'autorité de leur chaire et la révérence qu'on doit à la succession, en condamnant ouvertement leurs prédécesseurs, jusqu'à la source même de leur sacre ? Bossuet, Reine d'Angl.
  • 5S'anéantir, v. réfl. Devenir à rien. Que d'empires se sont anéantis ! Cette objection s'anéantit d'elle-même.
  • 6 En termes de dévotion, s'abaisser, s'humilier devant Dieu. Il ne sait presque que s'anéantir en la présence de Dieu, Massillon, Prière. Le sanctuaire devant lequel les princes s'anéantissent, Massillon, Resp. En s'anéantissant devant les yeux de sa majesté, Pascal, Prov. 4. Il s'est anéanti lui-même jusqu'à prendre la forme d'esclave, Bossuet, Hist. II, 11.

HISTORIQUE

XIIIe s. Cis maus qui si me deffigure, Qui si me vait anientant, Guill. de Palerme. Car tous ses cors estoit sechiés De viellece et anoiantis, la Rose, 351. Moult consenti Dieux le peuple Israel à anienter por leur pechié, Psautier, f. 96. Et quant, toutes ces choses aneanties por bones reisons, li rois loe ce que li juge li firent d'endroit le borgois…, Liv. de just. 36. Anienti, Ass. de Jér. II, 61. L'action qu'il avoit de novele dessaizine est anientie, et ne pot mès pledier fors sor le [la] proprieté, Beaumanoir, XXXII, 9. Li generax procureres n'est pas por ce anientis, Beaumanoir, XXXII, 84. Li chanoines est d'autre part Qui au tresor fait grant essart ; Le tresor tres anoiantist, Rutebeuf, 314. Lors le convient seingner ou prendre medicine ; Ainsi s'anientist et degaste et define, J. de Meung, Test. 172.

XIVe s. Bonne vie lui [à Bertran] doint li dignes fruis de vie ! Car France de sa mort seroit anientie, Guesclin. 17469. Car tout quanque barat aüne En vingt ans, anientist fortune En une seule heure de jour, J. Bruyant, dans Ménagier, t. II, p. 28.

XVe s. Et anianty les floz de male fortune, soubz quel subjeccion avoit esté degetté par long espace, Christine de Pisan, Charles V, I, ch. 23. Il n'est chose plus impossible à anientir au monde que est matiere escripte en livres, Bouciq. IV, ch. 15.

XVIe s. Nous nous laissons si fort aller sur les bras d'aultruy, que nous aneantissons nos forces, Montaigne, I, 144. Et pour aneantir Ce desir qui tant dure, Il vous faudroit sentir La peine que j'endure, Marot, II, 357. Et jà ne faut laisser aneantir Mes grans combats executés en Tyr, Marot, IV, 129.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. anientar ; ital. anientare ; de à et néant, à l'aide de la terminaison verbale ir. On disait dans l'ancien français anientir et anienter.