« appliquer », définition dans le dictionnaire Littré

appliquer

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

appliquer

(a-pli-ké) v. a.
  • 1Mettre une chose sur ou contre une autre. Appliquer des échelles contre la muraille. Appliquer quatre fois des couleurs sur un tableau.

    Par extension, appliquer un coup de bâton sur la tête, frapper la tête avec un bâton.

    Appliquer un homme à la question, le soumettre aux tortures qu'on nommait la question.

  • 2Se servir de… pour un objet déterminé. Il fallut appliquer à la maladie un nouveau traitement. Les instruments de la nouvelle alliance sont des instruments du Saint-Esprit qui servent à nous appliquer la grâce, Bossuet, Doctr. de l'Église, ch. 9. N'attendez pas de moi de regrets ni de larmes, Un grand cœur à ses maux applique d'autres charmes, Corneille, Pomp. v, 1. Ils vous ont appliqué avec joie [comme remède] le sang de l'agneau, Massillon, Résur. Il nous lave de nos souillures en nous appliquant le prix de son sang, Massillon, Circ.

    Appliquer un système, une science, introduire dans la pratique les principes d'un système, d'une science.

    Appliquer une science à une autre, faire usage des principes d'une science pour en développer une autre. Appliquer l'algèbre à la géométrie.

  • 3Transporter à quelqu'un ce qui est dit d'un autre. Appliquer un vers à quelqu'un. Appliquer un proverbe à propos. Ne vous appliquez pas ce reproche. Il s'applique à lui-même tout ce qui se dit, Bossuet, Prédic. 2. Pour appliquer cette parole à l'homme parfait, Bossuet, Nouv. myst. Pour appliquer cette maxime à mon sujet, Massillon, Parole.
  • 4Attribuer, imputer. S'appliquer une qualité, un avantage. S'appliquer le nom de sage. Il s'appliquait les émoluments dus au travail d'autrui.
  • 5Mettre sous le coup de, infliger. On lui appliquera telle disposition de la loi. Le maximum de la peine lui fut appliqué.
  • 6Occuper fortement quelqu'un à quelque chose. C'est ainsi qu'ils se donnaient mutuellement un repos qui les appliquait chacun tout entier à son action, Bossuet, Louis de Bourbon. Un bon roi applique ses sujets à l'agriculture, Fénelon, Tél. V. On l'appliqua [St Benoît] à l'étude des lettres humaines pour polir son esprit, Fléchier, Panég. I, 373. Aussi à peine le premier homme fut-il sorti de ses mains, [que le créateur] l'appliqua à la culture de ce lieu de délices qui devait être sa demeure, Massillon, Car. Vocation. En vain l'ordre de ceux qui ont droit de disposer de nous, nous y applique [à des fonctions qui nous déplaisent] ; on allègue mille prétextes de santé, d'insuffisance, Massillon, Conf. Zèle, vices.

    Absolument, exiger une grande attention. Les échecs appliquent beaucoup. La vie de la cour est un jeu qui applique, La Bruyère, 8.

    Appliquer son esprit, son attention à. Ce n'est pas assez d'avoir l'esprit bon ; mais le principal est de l'appliquer bien, Descartes, Méth. 1. Appliquer son esprit à la recherche de la vérité, Port-Roy. Logique, 3e partie.

  • 7S'appliquer, v. réfl. Être appliqué, apposé sur. Les emplâtres qui s'appliquent sur la peau.
  • 8Apporter une attention soutenue. À vous remettre bien je me veux appliquer, Molière, F. sav. III, 6. Je me suis appliquée à chercher les moyens De lui faciliter tant d'heureux entretiens, Racine, Baj. IV, 4. Achille seul, Achille à son amour s'applique, Racine, Iphig. I, 2. Tout mon cœur s'applique Aux soins de rétablir un jour la république, Corneille, Sertor. III, 2. Appliquez-vous, mes frères, à ces vérités importantes, Massillon, Carême, Impénitence fin. Tous les citoyens s'appliquent au commerce, Fénelon, Tél. III. Quand on s'appliqua à regarder Mentor, on découvrit dans son visage je ne sais quoi de ferme et d'élevé, Fénelon, Tél. VI. Ne s'est-elle pas appliquée, en toutes rencontres, à conserver cette même intelligence entre la France et l'Angleterre ? Bossuet, Reine d'Anglet.
  • 9S'adapter, convenir à. Ce mot s'applique surtout à celui qui … La clémence peut s'appliquer même aux innocents. Ceci peut s'appliquer à la grandeur royale, La Fontaine, Fab. III, 2.
  • 10S'adjoindre, se subordonner. L'esprit d'égalité eût subsisté plus longtemps ; un citoyen se fût moins appliqué à un autre, Saint-Évremond, II, 77.

REMARQUE

Quand appliquer signifie mettre une chose sur une autre, il régit la préposition sur : appliquer un emplâtre sur un mal. Quand il signifie faire toucher une chose à une autre, il régit la préposition à : il appliqua la coupe à ses lèvres.

HISTORIQUE

XIVe s. Et aussi ne voudrent il point que les diz biens fussent appliquez au commun proufit, Bercheure, f° 28, verso. Et ne adaptoit pas chascun lores les sermens et ses lois à sa volenté par interpretation, aincès appliquoit ses meurs et ses condicions à ycelles, Bercheure, f° 57, verso. Il applique la diffinicion de vertu as autres particulieres vertuz et passions, Oresme, Eth. 33. Et pour ce applique il sa medecine selon la complexion de chascun singulier que il entent à garir, Oresme, ib. VII, 13. Quelles choses il convient apliquer à guarir le corps, Oresme, ib. 170. Election est desir appliquet à acceptacion ou execucion, Oresme, ib. 66.

XVe s. Avec lequel orfevre le suppliant s'applica [se prit] de paroles, Du Cange, applicare.

XVIe s. Une medecine faible et mal appliquée, Montaigne, I, 125. Il n'y trouva meilleur conseil que de s'appliquer du poison et de tuer ses jambes, Montaigne, II, 25.

ÉTYMOLOGIE

Applicare, de ad, à, et plicare, plier (voy. PLIER). Bourguig. epliquai ; provenç. et espagn. aplicar ; ital. applicare. Au XVIe siècle, d'après Palsgrave, p. 23, on prononçait les deux p.