« chaloir », définition dans le dictionnaire Littré

chaloir

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chaloir

(cha-loir) Verbe vieilli, qui n'est plus employé, dit l'Académie, qu'à la 3e personne du singulier du présent de l'indicatif et impersonnellement. Cependant on pourrait étendre cet emploi au futur : il chaudra ; au conditionnel : il chaudrait ; à l'infinitif : il ne peut chaloir, il ne doit chaloir ; et au subjonctif présent : qu'il chaille. Dans l'ancienne langue chaloir avait tous ses temps : il chalait, il chalut, il a chalu v. n.
  • Être d'importance, causer du souci. Il ne me chaut de cela. Il ne vous en chaut, n'est-ce pas ? Que tout s'y pervertisse, il ne m'en chaut d'un double, Régnier, Sat. VI. Or il ne me chaudrait … Qu'ils fissent à leurs frais messieurs les intendants, Régnier, ib. X. Il ne vous doit chaloir ni de qui, ni combien, Régnier, Sat. XII. J'en suis d'avis, non pourtant qu'il m'en chaille, La Fontaine, Gageure. Car quant à moi, du plaisir ne me chaut, à moins qu'il soit mêlé d'un peu de peine, La Fontaine, ib. Allez, il ne m'en chaut, Scarron, D. Japhet, III, 20. Soit de bond soit de volée, que nous en chaut-il, pourvu que nous prenions la ville de gloire [le paradis] ? Pascal, Prov. 9.

    Régnier a fait de chaloir un verbe réfléchi : Je ne me veux chaloir du lieu, grand ou petit, Ép. II.

HISTORIQUE

Xe s. Dont [ce dont] lei [à elle] nonque chielt, Eulalie.

XIe s. Ne lui chalt, sire, de quel mort nous mourions, Ch. de Rol. X. De ce cui calt ? ib. CVIII.

XIIe s. Beaux sire Guenes, ne vous chaut esmaier, Roncisv. 185. E bien as hui mustred que rien ne te chalt de tes cunestables ne de tes hommes, Rois, 191.

XIIIe s. Il ne chaloit, à ceus qui l'ost voloient depecier, del meilleur ne del peieur, mais que li ost se departist, Villehardouin, LXXXIX. Et sachiés que il i avoit assés de ciaus [ceux] qui bien vousissent que li corans [le courant] enmenast les vaissiaus contreval le bras ou li vens, ne leur chausist comment l'aventure avenist, Villehardouin, CIII. Moi ne chaut qu'on en fasse, mais qu'elle soit tuée, Berte, XVI. Mal fustes conseillée, tant vous en a chalu, ib. LI. Ou se d'espargnier ne li chaut, Ains viengnent li froit et li chaut…, la Rose, 5033. Més de povreté ne vous chaille, Fors de penser, comment qu'il aille, Comment la porrés eschever, ib. 809. Ne lor chaut gueres qui le sache, ib. 7785. Car il ne pot caloir li quix [le quel] perde, Beaumanoir, LXIII, 8. Li cuers avariscieus acquiert ne li caut comment, et ne pot estre assasiés d'avoir, Beaumanoir, LXIII, 21.

XIVe s. Et ceulz qui ont receu le bien, il ne leur chaut, se il ne rendent graces ou retribucion, Oresme, Eth. 273.

XVe s. Il ne peut chaloir, dit le duc d'Anjou ; j'ai dit et juré que jamais ne partirai de ci ; si aurai le chastel à ma volonté, Froissart, II, II, 11. Et du faict du roy d'Angleterre ne leur challoit, au demourant, comment il en allast, Commines, IV, 7.

XVIe s. C'estoient païens, auxquels il chaloit autant de J. C. que de celui qui n'avoit jamais esté, Calvin, Instit. 155. Prenons le cas, quant à eux, qu'il ne leur en chaille, Calvin, ib. 226. Ils seront si empeschés à leur profit particulier, qu'il ne leur chaudra guere de leur office, Calvin, ib. 272. Que chault-il quand ce soit ? Montaigne, I, 83. Que vous chault-il de l'avoir perdue ? Montaigne, I, 85. Il ne peut chaloir de quelle religion soit mon medecin, Montaigne, I, 218. Pourveu qu'il soit gentil compagnon, la guerre qui confond toutes choses, fait qu'il ne peut chaloir de quelque lieu il soit, Amyot, Fab. 43. Il estoit si deshonté, qu'il ne luy chaloit d'estre vituperé, Amyot, Alc. 20. S'ainsin estoit, toute peine fatale Me seroit douce, et ne me chaudroit pas, Ronsard, 25. … Ne luy chalut de mon corps perissant, Ronsard, 182. … Mais peu se chaillant d'eux, Ronsard, 746.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. et anc. espagn. caler ; ital. calere ; du latin calere, proprement être chaud (voy. CHALEUR), et de là désirer.