« charrier.2 », définition dans le dictionnaire Littré

charrier

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

charrier [2]

(cha-ri-é) v. a.
  • 1Voiturer dans un chariot, dans une charrette. Des hommes qui charrient le bois du Liban, La Bruyère, VI.

    Fig. et absolument. Charrier droit, se comporter comme on le doit, remplir son devoir. Cette Puisieux était bien épineuse ; il fallait, comme vous dites, charrier bien droit avec elle, Sévigné, au comte de Bussy, 13 octobre 1677. Et qu'il fera bien, s'il me croit, Désormais de charrier droit, Scarron, Gigantom. chant I.

  • 2En parlant d'une rivière, entraîner, emporter dans son cours. Cette rivière charrie beaucoup de sable. La rivière charrie d'énormes glaçons. Un torrent charriait du limon et des pierres, Rousseau, Hél. IV, 16.

    Absolument, entraîner des glaçons. La rivière charrie.

  • 3 Terme de fauconnier. L'oiseau charrie, quand, emportant la proie, il ne revient que quand le fauconnier la réclame ; et aussi quand il se laisse emporter à la poursuite de la proie.
  • 4 Terme de marine. Charrier de la voile, se dit d'un navire qui porte beaucoup de voiles.

HISTORIQUE

XIe s. Cinquante chars qu'en [on] fera carier, Ch. de Rol. 111.

XIIIe s. On trouva l'aighe [l'eau] si durement engielée que on pooit bien charier sus, H. de Valenciennes, XIV. Por le carier ou por autres fres…, Beaumanoir, XXIX, 4. Il ne pooit souffrir ne le charier ne le chevaucher [supporter ni la voiture ni le cheval], Joinville, 300. Et sunt aucune fois cil qui plus tost charient Contre clers et prelas, et plus les contrarient, J. de Meung, Test. 639.

XVe s. Le comte ne pouvoit mais chevaucher, mais charier se faisoit, quand il vouloit aller d'un lieu en un autre, Froissart, III, IV, 25. Et y firent amener et charrier du pays voisin grand foison de blés…, Froissart, I, I, 126. Gravier de blanche marle, fort et dur, sur quoi on peut fermement charier, Froissart, I, I, 278. À cely devoit bien estre nientmoins soing aussi de charrier droict tant pour son honneur comme par obligacion, Chastelain, Chr. de Bourg. III, ch. 163. Il estoit maistre avec lequel il falloit charier droit, Commines, VI, 7.

XVIe s. Nos ames ont charié si uniement ensemble, Montaigne, I, 214. Si les sens alterent ce qu'ils nous charrient du dehors, Montaigne, II, 360. Ce n'est pas tout que la volonté charie droict, Montaigne, III, 371. Ils n'avoient aultre moyen de charier qu'à force de bras, ou en traisnant leur charge, Montaigne, IV, 26. Elle taschoit de faire trainer et charier ses navires jusques en l'autre mer, Amyot, Anton. 90. Les sablons que ces eaux charrient, De Serres, 266.

ÉTYMOLOGIE

Wallon, chèri ; picard, carrier ; Berry, charreyer ; provenç. carregar ; anc. catal. carrejar ; anc. espagn. carrear ; ital. carreggiare ; du bas-lat. carricare (voy. CHARGER) de carrus, char. Charrier et charroyer sont deux formes d'un même mot, suivant les anciens dialectes de la France.