« clou », définition dans le dictionnaire Littré

clou

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

clou

(klou) s. m.
  • 1Sorte de petite cheville de fer ou d'autre métal, à pointe et à tête. Enfoncer des clous avec le marteau. Pendre quelque chose à un clou. Rabattre un clou.

    On dit d'un bâtiment neuf ou de celui qui est en bon état, qu'il n'y manque pas un clou.

    Fig. Il lui manque, il lui faut un clou, c'est-à-dire il est un peu fou : on sous-entend à son armet, employé jadis pour tête.

    Planter son clou, s'établir à demeure quelque part.

    Familièrement. Cela ne vaut pas un clou à soufflet, je n'en donnerais pas un clou à soufflet, c'est-à-dire cela n'a aucune valeur. Si l'on ignore ces choses, je ne donnerais pas un clou de tout l'esprit qu'on peut avoir, Molière, Préc. ridic. 10. Mais à quoi les vœux d'un blaireau des Alpes peuvent-ils servir ? Ceux de l'univers entier ne servent pas d'un clou à soufflet, Voltaire, Lett. d'Argental, 24 nov. 1774.

    River un clou, rabattre avec le marteau la pointe qui dépasse l'épaisseur d'une planche ; et fig. River à quelqu'un son clou, lui répliquer vertement. Vous avez fort bien fait de lui river son clou ; C'est bien à faire à lui de vous appeler fou, Regnard, Distrait, IV, 7.

    Populairement. Mettre une chose au clou, renoncer à s'en servir, et aussi la mettre en gage.

    Populairement. Compter les clous de la porte, rester à attendre à une porte.

    Gras comme un cent de clous, se dit de quelqu'un fort maigre.

    Cela ne tient ni à fer ni à clou, se dit d'une chose qui sert à meubler, mais qui n'est point scellée dans la muraille ; et fig. Cela ne tient ni à fer ni à clou, se dit d'un travail sans solidité, d'une affaire qui n'est pas sérieusement conclue. Vous savez que notre cardinal l'est à fer et à clou, Sévigné, 226.

  • 2 Terme de vétérinaire. Clou de rue, maladie locale qui survient chez les chevaux ou autres gros bestiaux, lorsqu'un clou ou tout autre corps étranger a pénétré dans la sole de corne, dans la sole charnue, et quelquefois jusqu'à l'os du pied.
  • 3 Terme de botanique. Bouton non développé des fleurs de certaines plantes : ainsi les clous de girofle sont les boutons du giroflier cueillis avant le développement des fleurs.

    Absolument, clou se dit pour clou de girofle. Acheter de la muscade et du clou.

  • 4Furoncle. Je suis fâché de votre clou et je vous en plains ; mais, à ce que je puis juger, ce n'est rien au prix de celui que j'ai, Voiture, Lett. 105. Le roi eut un anthrax au cou qui ne parut d'abord qu'un clou, mais qui donna beaucoup d'inquiétude, Saint-Simon, 38, 184.
  • 5 Terme de médecine. Clou hystérique, douleur vive, bornée à un point très circonscrit de la tête, et affectant les femmes sujettes aux accès hystériques.
  • 6Amas de petites pierres dans une veine de charbon de terre.

    Nœud dans la pierre ou le marbre.

    PROVERBE

    Un clou chasse l'autre, c'est-à-dire un goût nouveau, une passion nouvelle fait oublier l'ancienne ; se dit aussi en parlant des personnes qui se succèdent ou se supplantent. Comme vous savez, madame, qu'un clou chasse l'autre, il a fallu que la passion que j'ai pour vous ait cédé à une nouvelle qui m'est survenue et qui, si elle n'est plus forte, est pour le moins à cette heure plus pressante, Voiture, Lett. 104.

HISTORIQUE

XIe s. Cheent li clou [des escuz], se peceient les boucles, Ch. de Rol. CCLXI.

XIIe s. À trois clos d'or [il] ferma [fixa] son gonfanon, Ronc. p. 71. Isaias cumandad que l'um figes [figues] li portast, si en fist un emplastre, e fist là metre sur un clou que li reis out ù il se duleit, Rois, 417. Et prent l'espieu à or resplendissant, à cinq clox d'or l'ensaigne bauliant, Raoul de C. 20.

XIIIe s. Si [elle] saignoit com ce fust perceüre de clo, Berte, XXXII. Sa coroie, Dont li cloet [petits clous] sont delié, Ren. 29826. Et par un ais cui ert fendue [où il y avait une fente], Vit la viele au clou pendue, ib. 12260. Li clou furent d'or esmeré [purifié], Qui erent el tissu doré, la Rose, 1089.

XIVe s. Car tuit estoient mal traitié ; Boces avoient et grans clos Dont on moroit…, Machaut, p. 73.

XVe s. Le comte de Charolois, qui estoit jeune et vert, et dur malement à ployer, les [les villes de la Somme] eust pu tenir à fer et à cloux, en non tost les restituant à la premiere demande, Chastelain, Chr. des ducs de Bourg. II, ch. 31. On le met à un sac à part, Et le laisse-on pendre au clou, Coquillart, Droits nouv. Il la tient à fer et à clou [il y tient beaucoup], Louis XI, Nouv. XXII. La sentence definitive en est taillée de demourer pendue au clou, Louis XI, ib. XCII.

XVIe s. Dieu tient le clou du gouvernail, pour tourner leurs effors à executer ses jugemens, Calvin, Instit. 160. Les katholiques se plaignoient de ce que Montauban, Sancerre, etc. faisoient compter les cloux de leurs portes aux garnisons qu'on leur envoyoit, D'Aubigné, Hist. I, 261. Un clou repousse l'autre ; en la mesme façon Tu auras vers pour vers et chanson pour chanson, Ronsard, Élég. 33. Clou, nommé du vulgaire cor, est durillon qui vient aux jointures des orteils, Paré, V, 21. Cloux de girofle, Paré, VII, 13. Les vulgaires appellent les charbons clouds, parce que la matiere d'iceux cause douleur semblable comme si un cloud estoit fiché à la partie, Paré, XXIV, 36. Et pendant le procès les bons maris demourerent en la prison, attendans la sentence diffinitive qui, pour le nombre infini d'eulx, en est taillée de demourer pendue au clou, Marguerite de Navarre, Nouv. XCII. Il sembloit que cette ordonnance, tant de fois reiterée, eut esté, comme l'on dit, fichée à cloux de diamans, Pasquier, Recherches, liv. III, p. 237, dans LACURNE.

ÉTYMOLOGIE

Picard, cleu ; bourguig. clô ; wallon, lâ ; rouchi, clau ; provenç. clau ; espagn. clavo ; portug. cravo ; ital. chiavo ; du latin clavus, de même radical que clavis (voy. CLEF).

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

CLOU. Ajoutez :
7Exemplaire avant les clous, se dit des exemplaires d'une certaine Bible (la Bible de Mortier, Amsterdam, 1700, 2 vol. in-f°) antérieurs à l'accident qui brisa une des planches (les planches sont très nombreuses dans cet ouvrage) ; la planche fut reclouée avec soin ; mais la trace des clous se voit dans les tirages postérieurs à l'accident.
8Ne tenir ni à clou, ni à cheville, ne pouvoir se maintenir, ni résister.

Cette locution ne s'expliquerait-elle pas par le texte suivant, en un sens qui ne se présente pas tout d'abord : Il [le pin maritime] la doit [sa ténacité] peut-être à la lutte constante qu'il a dû soutenir contre le vent violent de la mer, et, comme cela arrive pour l'homme, l'adversité l'a rendu fort ; le clou ou la cheville ne résiste pas aux vibrations dans le pin du Nord [il ne tient donc ni à clou ni à cheville] ; le pin maritime a la fibre solide et retient le clou et la cheville, Enquête sur les incendies des Landes, p. 404, 1873.

9Sorte de taille du diamant. Après que la pointe supérieure et la pointe inférieure d'un diamant ont été plus ou moins abattues à la meule, on a le diamant à la table ; si les pointes n'ont été que légèrement abattues, on l'appelle table profonde, ou clou, suivant l'expression française plus exacte, Revue Britannique, juill. 1876, p. 116.

HISTORIQUE

XIVe s. Ajoutez : Furunculus, gallice clou, H. de Mondeville, ms. latin, 7139, f° 184.