« corner », définition dans le dictionnaire Littré

corner

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

corner [1]

(kor-né) v. n.
  • 1Sonner du cornet, d'une corne ou d'une trompe. Le vacher a corné dès le matin.
  • 2Parler dans un cornet pour se faire entendre au loin ou pour se faire entendre à un sourd. Il continue et corne à toute outrance : Réveillez-vous…, La Fontaine, Herm.
  • 3Bourdonner, en parlant des oreilles percevant un bruit qui n'a rien de réel. Les oreilles me cornent.

    Fig. Les oreilles vous cornent, se dit à quelqu'un qui croit entendre ce qu'on ne lui dit pas ou un bruit qui n'est pas réel. Il faut que les oreilles m'aient corné, Molière, Malade im. III, 12. Les oreilles me cornent, Molière, Éc. des maris, I, 5.

    Les oreilles ont bien dû vous corner, on a bien souvent parlé de vous.

  • 4 V. a. Fig. Publier partout. En la quittant, Gulphar alla tout droit Conter ce cas, le corner par la ville, La Fontaine, F. av. Quelqu'un qui bientôt En mille endroits cornera le mystère, La Fontaine, Mandr. Vendôme crie, écrit, corne bataille et victoire, et prépare à Mgr de Bourgogne tout l'affront d'avoir manqué le secours, Saint-Simon, 208, 54.

    Rebattre sans cesse la même chose. J'entends sans cesse corner à mes oreilles : L'homme est un animal raisonnable, La Bruyère, XII.

  • 5 Terme de vénerie. Corner les chiens, sonner du cor pour les exciter ou pour les rappeler. Corner requête, sonner du cor pour qu'ils quêtent de nouveau, lorsqu'ils sont en défaut.

HISTORIQUE

XIe s. Ce dist Rolanz : cornerai l'olifant, Ch. de Rol. CXXVII. Jà li corners ne nous aureit mestier, ib. CXXX.

XIIe s. Je cornerai se vous le me louez [conseillez], Ronc. p. 81. Tel venjance frai sur Juda e sur Jerusalem que à ces ki l'orrunt, tut les orilles lur en cornerunt, Rois, 420. Lores cornad Saül une buisine par la terre, e dist : iço voil que oient li Hebreu, Rois, 42.

XIIIe s. Quant il oï la gaite corner le jour, si se leva et ala à l'eglise proier Dieu qu'il li aidast, Chron. de Rains, p. 54. Ne ne pourront ouvrer que de la guete cornant au matin jusques à la nuit, sanz candele tant seulement, Liv. des mét. 92. Li veneor lor cors cornant, Lesqex vont durement sonant, Tot le païs vont estonant De lor huier, de lor corner, Ren. 5497. Si cornent li silvain et huient Que tuit li champ entor en bruient, ib. 8676. Humilitez est tant creüe Qu'orguex corne la recreüe ; Orguex s'en va, Diex le cravant, Et Humilitez vient avant, Rutebeuf, II, 59. Quant il encommençoient à corner, vous deissiez que ce sont les voiz des cynes qui se partent de l'estanc, Joinville, 269. Chetifs pecheours que feront, Quant tous les angels trembleront Et les archangels precieux, Et les buisines corneront Qui la venue annonceront Du très doulx fils Dieu glorieux ? J. de Meung, Tr. 1384.

XVe s. La gaite commence à corner et recorner et à mener grand friente, Froissart, II, II, 213. Puis corna le dit messire Guillaume de Douglas un cor, Froissart, I, I, 131. On peut bien, pour vous, corner prise ; Prins estes, point ne m'eschapperez, Orléans, Rondeau.

XVIe s. Le quel [un joueur de tambourin], apres que il eut soufflé en la fluste, se meit en corner en gobelet [boire], et nettoyer la vaisselle [manger], Jean D'Auton, Annales de Louis XII, p. 222, dans LACURNE. Cornons icy, à son de flaccons, que quiconques aura perdu la soif ne ayt à la chercher ceans, Rabelais, Garg. I, 5. Il n'y a veneur qui ne prend plaisir à corner sa prise, ni amoureux d'avoir la gloire de sa victoire, Marguerite de Navarre, Nouv. XLIX. Les plainctes qui me cornent aux oreilles, Montaigne, I, 197. L'esperance ne cesse de corner aux oreilles…, Montaigne, II, 380. Il ne faisoit autre chose que corner la guerre ordinairement et prescher les armes au peuple, Amyot, Phocion, 14. Quelques uns de Blois donneront le premier avis ; mais par la responce ils furent appellez corne-guerre et turbulents, D'Aubigné, Hist. II, 282. Deliberer avant que corner la guerre, Charron, Sagesse, p. 434, dans LACURNE. On dit en ce païs que le poisson corne, quand il est gasté, puant et corrompu, Bouchet, Serées, p. 231, liv. I, dans LACURNE. Ils ne trouvoient bon le gibier sinon qu'il cornast un peu, c'est à dire, sans deguiser les matieres, qu'il ne fut un peu puant, H. Estienne, Apol. d'Hérod. p. 432, dans LACURNE.

ÉTYMOLOGIE

Wallon, coirner ; provenç. cornar ; ital. cornare ; de corne, dans le sens de cor.