« fuite », définition dans le dictionnaire Littré

fuite

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

fuite

(fui-t') s. f.
  • 1Action de fuir. La fuite en Égypte. Leur ardeur [des Curiaces] est égale à poursuivre sa fuite [d'Horace resté seul], Corneille, Hor. IV, 2. La frayeur lui doit faire prendre la fuite, Corneille, Ex. d'Hor. [Il] Met l'épée à la main, tourne en fuite le reste, Corneille, Théod. IV, 4. Pour la fuite du roi [Jacques II], il paraît que le prince [d'Orange] l'a bien voulu ; le roi était fort bien gardé par le devant de sa maison, tandis que toutes les portes de derrière étaient libres et ouvertes, Sévigné, 505. Voici une nouvelle persécution qui l'obligea encore de se mettre en fuite, Bossuet, Sermons, Ambition, Autre exorde pour le 4e dim. de carême. Elle n'avait assez de voiles ni assez de vent pour favoriser sa fuite précipitée, Bossuet, Reine d'Angl. Il [Cotin, en lisant ses vers] met chez lui voisins, parents, amis en fuite, Boileau, Sat. VIII. Chanter du peuple hébreu la fuite triomphante, Boileau, Art p. I. La seule fuite, Iris, nous garantit ; C'est le parti le plus utile à prendre Contre l'amour, Deshoulières, dans RICHELET. Et la fuite est permise à qui fuit son tyran, Racine, Phèdre, V, 1. À qui dois-je imputer cette fuite soudaine ? Racine, Iphig. II, 2. Je méditais ma fuite aux terres étrangères, Racine, Bajaz. III, 2. Télémaque trouvant les Dauniens en fuite, Fénelon, Tél. XVI. Mais pourquoi donc ces pleurs, ces regrets, cette fuite ? Voltaire, Zaïre, III, 7. Quelques instants de plus, et les troupes des différentes armes, dans leur fuite vers un même défilé, allaient s'y rencontrer, Ségur, Hist. de Nap. IV, 7.

    Fig. Un grand bruit qui survint ensuite Mit Hector et mon songe en fuite, Scarron, Virg. II.

    Prendre la fuite, se dit d'un banqueroutier qui se dérobe, d'un homme infidèle qui emporte ce qui ne lui appartient pas. Le précepteur que vous avez donné à la vicomtesse et qui était fortement recommandé par vous, a pris la fuite avant-hier, après avoir volé pour vingt mille francs de diamants, Genlis, Théât. d'éduc. l'Intrig. I, 3.

    À la fuite, en fuyant ; locution qui a vieilli. Car il vaut beaucoup mieux se sauver à la fuite, Que d'attendre la mort qu'on peut bien éviter, D'Urfé, Astrée, I, 4. Lysarque : N'as-tu point ici vu deux cavaliers aux coups ? - Pymante : Non, monsieur. - Lysarque : Ou l'un d'eux se sauver à la fuite ? Corneille, Clit. II, 2. En un moment tout ce grand amas de forces se dissipe, chacun d'eux se sauva à la fuite, Mézer. Hist. de Fr. av. Clovis, III, 7.

  • 2Une Fuite, tableau représentant la fuite de la sainte famille. Qui n'a cent fois admiré les nativités, les vierges et l'enfant, les Fuites dans le désert ? Chateaubriand, Génie, III, I, 4.

    On met une F majuscule, en ce sens, à Fuite.

  • 3 S. f. plur. Terme de vénerie. Voies du cerf qui fuit, distance d'un élan à un autre.
  • 4 Fig. Action d'éviter, de s'éloigner de. La fuite des honneurs servirait d'expiation aux excès passés de votre ambition, Massillon, Carême, Dang. d. prosp. La fuite des grandes places, les grandes places elles-mêmes, tout trouve des censures, Massillon, Carême, Resp. hum.

    La fuite de la cour, l'action de s'éloigner de la cour.

    La fuite de la cour, l'action par laquelle la cour s'éloigne, s'écarte de quelqu'un. La fuite d'une cour que sa chute a bannie, Racine, Brit. II, 3.

  • 5Il se dit des choses qui passent, qui s'éloignent rapidement. La fuite de l'occasion. La fuite des années. Il [le temps] glisse et fuit d'une fuite éternelle, Pascal, dans COUSIN. Cette vie, dont la fuite précipitée nous trompe toujours, Bossuet, Mar.-Thér. Ô jours de mon printemps, jours couronnés de rose, à votre fuite en vain un long regret s'oppose, Chénier, Élég. XVI.
  • 6 Terme de peinture. De belles fuites, de beaux lointains.
  • 7 Terme de fauconnerie. Écart d'un oiseau.
  • 8Échappatoire, délai. Ce petit corps de souverains sans titres [les académiciens] a eu assez d'artifice pour éluder toutes les lois et ordonnances faites contre les fuites des plus grands chicaneurs, Furetière, 3e factum, t. I, p. 327. C'est l'ordinaire de ceux qui ont tort et qui connaissent leur faible, de chercher des fuites, La Fontaine, Psyché, I, p. 90. Vous n'échapperez pas par ces fuites, vous sentirez la force de la vérité, Pascal, Prov. 16. Non content de se tenir éloigné de Dieu, il [le pécheur] fuit les approches de la grâce ; et quelles sont ses fuites, sinon ses délais, ses remises de jour en jour… ? Bossuet, 2e sermon, jeudi de la Passion, 1. Vous résistez en vain et j'entends votre fuite, Racine, Mithr. III, 5.
  • 9Fente par où un liquide s'échappe. Il y a une fuite à ce tonneau, à ce tuyau.

    Le liquide même ou le gaz qui s'échappe. Il est dangereux de chercher une fuite de gaz [d'éclairage] avec une chandelle à la main.

    PROVERBE

    Il vaut mieux une prompte fuite qu'une mauvaise attente.

HISTORIQUE

XIIe s. En fuie sont torné, n'ont soing de remanance, Ronc. p. 197.

XIIIe s. Là seront o toute leur suite, Qui ne sot onques riens de fuite, la Rose, 10766. Je dirai avant quantes fuites [échappatoires, excuses] principaus il y a en la haute court en plait, Ass. de Jérus. I, 56. Quant il nous senti venans, il toucha en fuie [prit la fuite], Joinville, 269.

XVe s. Et aussi la bataille et arriere-garde n'assemblerent point avec leurs gens, ains se misdrent tous à la fuite, Fenin, 1415. Les choses proposées par nostre dit procureur n'estoient que fuites ou nyances [dénégations], Ordonn. 5 mars 1483.

XVIe s. On dit que l'homme de guerre doit avoir trois choses en luy : assaut de levrier, fuite de loup, deffense de sanglier, Fouilloux, Vénerie, f° 117, dans LACURNE.

ÉTYMOLOGIE

Fuite vient du participe passé fui ou fuit, et non du latin fuga, qui a donné régulièrement fuie.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

FUITE. Ajoutez :
10Rigole de fuite, rigole pour déverser un trop-plein. Le creusement de la rigole de fuite du déversoir de Pantin dont l'exécution se trouve encore ajournée, E. Grangez, Voies navigables de France, p. 497.