« opiner », définition dans le dictionnaire Littré

opiner

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

opiner

(o-pi-né) v. n.
  • 1Dire son sentiment dans une délibération. On ne put achever la délibération, quoique l'on eût opiné jusqu'à trois heures après midi ; elle fut consommée le lendemain, et arrêt fut donné, Retz, Mém. t. III, liv. IV, p. 118, dans POUGENS. Qu'à l'avenir on opinerait [à l'Académie française] sur les élections par billets et non pas de vive voix, comme on avait fait jusqu'alors, Pellisson, Hist. de l'Acad. IV. Allez, mais sur tout autre opinez pour la paix, Rotrou, Antig. I, 5. Dès l'abord leur doyen [des rats], personne fort prudente, Opina qu'il fallait, et plus tôt que plus tard, Attacher un grelot au cou de Rodilard, La Fontaine, Fabl. II, 1. Il [Sainte-Hélène, un des juges de Fouquet] opina, sans appuyer sur rien, que M. Fouquet aurait la tête tranchée, à cause du crime d'État, Sévigné, à Pompone, 17 déc. 1664. On parle de Bâle et de Constance [conciles], où l'on opina par nations, Bossuet, Projet de réunion, 2e partie, lettre XXII. Philoctète et Nestor avaient déjà opiné qu'il fallait profiter d'une si heureuse occasion, Fénelon, Tél. X. Savoir opiner dans des conjonctures où il ne fallait savoir que consentir, Massillon, Or. fun. Villars. Ils [des juges] jugèrent bien, parce qu'ils suivaient les lumières de la raison ; et les autres [des avocats] avaient opiné mal, parce qu'ils n'avaient consulté que leurs livres, Voltaire, Babouc. Le roi défendit aux princes et aux pairs d'aller opiner dans le parlement de Paris sur des affaires dont il attribuait la connaissance à son conseil privé, Voltaire, Louis XV, 36.

    Opiner du bonnet, ôter son bonnet en signe qu'on est de l'avis qui prévaut ; et fig. acquiescer sans mot dire. Appuyé sur sa canne, comme je vous l'ai dépeint, il opina du bonnet, Madame D'Épinay, Mém. t. I, p. 116, dans POUGENS.

  • 2Opiner à, être d'avis que. Ils opinèrent tous à l'arrêt de ma mort, Scudéry, l'Am. libéral, I, 3. Chacun opine à la vengeance, La Fontaine, Cord. Tous vos amis opinent à votre retour, Sévigné, 366. J'opine à n'aller à Rennes que pour la semaine sainte, Sévigné, 19 fév. 1690. L. Cornélius opina à ce qu'on n'entrât en aucune négociation avec les deux armées, Vertot, Révol. rom. V, 71.

    Il se conjugue avec l'auxiliaire avoir.

REMARQUE

Le XVIe siècle a fait quelquefois actif ce verbe ; mais cela n'est plus usité ; cependant on en trouve quelques exemples : Messieurs, qu'opinez-vous ? Courier, Correspond. mai 1804.

HISTORIQUE

XVe s. Quelque chose qui luy fut dit et oppiné, il delibera de…, Commines, I, 3.

XVIe s. Autant en opina des yeulx [n'en fit pas plus de cas que d'un autre membre] celuy qui se les creva, Montaigne, I, 311. Antoine de Leve opinoit toutesfois le contraire et le desconseilloit, Montaigne, I, 321. Les femmes avoient droict d'assister et opiner aux causes qui…, Montaigne, I, 322.

ÉTYMOLOGIE

Lat. opinari ; prov. opinar. Opinari, opinio, opinus, dans nec opinus, est rapporté avec vraisemblance par L. Meyer à la racine qu'on trouve dans le grec ὄπτομαι, et qui est une transformation de la racine oc (d'où oculus, œil). Opinus, qui est ici le mot fondamental dont opinio et opinari sont dérivés, signifierait donc qui voit, qui s'aperçoit de. Corssen a adopté cette explication (Nachträge, 28).

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

OPINER. Ajoutez :
3Opiner de, donner son avis sur, décider de. [Gens] qui opinent de nos biens et de nos vies et qui en ont la juridiction, Malherbe, Lexique, éd. L. Lalanne.