« plutôt », définition dans le dictionnaire Littré

plutôt

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

plutôt

(plu-tô) adv.
  • 1Plus promptement ; acception propre qui, prise figurément, indique que la personne ou la chose dont il s'agit est avant une autre. C'est ici une effusion de mon cœur plutôt qu'un ouvrage et une méditation de mon esprit, Fléchier, Duc de Mont. Le travail, aux hommes nécessaire, Fait leur félicité plutôt que leur misère, Boileau, Épît. II. Lorsqu'il s'agit de combattre les forces maritimes des Perses, c'est plutôt Parménion qui a de l'audace, c'est plutôt Alexandre qui a de la sagesse, Montesquieu, Esp. X, 14.
  • 2De préférence, par préférence. Hélas ! laissez-moi mon amour, Prenez plutôt ma vie, Quinault, Thés. IV, 1. Il venait plutôt pour condamner que pour couronner leur ambitieux exemple, Bossuet, Hist. II, 10. Dieu ! donnez-nous la mort plutôt que l'esclavage, Voltaire, Brutus, IV, 7.

    Plutôt avec que et l'infinitif. Que son cœur, tout à moi, d'un tel projet s'offense ; Qu'elle mourrait plutôt qu'en souffrir l'insolence, Molière, École des mar. II, 13. Ah ! plutôt que souffrir ces douleurs insensées, Combien j'aimerais mieux…, Chénier, Élég. XXX.

    Plutôt que de, avec l'infinitif. Sinon, faites état de m'arracher le jour Plutôt que de m'ôter l'objet de mon amour, Molière, Éc. des mar. III, 8. Ceux qui nuisent à la réputation ou à la fortune des autres plutôt que de perdre un bon mot, méritent une peine infamante, La Bruyère, VIII.

    Plutôt que, avec le verbe au subjonctif. Ils combattront plutôt et l'une et l'autre armée, Et mourront par les mains qui leur font d'autres lois, Que pas un d'eux renonce aux honneurs d'un tel choix, Corneille, Hor. III, 2. La Seine dans son lit verra plutôt son onde Rebrousser contre-mont sa source vagabonde, Et plutôt le soleil luira dans les enfers, Que seulement je pense à sortir de mes fers, Racan, Berger. II, 5. Non, non, plutôt sur moi tombe cent fois la foudre, Qu'on m'oblige à changer ce que j'osai résoudre ! Th. Corneille, Maxim. IV, 2. Plutôt les froids Lapons boiront l'onde du Gange, Que je cesse jamais de chanter sa louange, Segrais, Égl. VII.

  • 3Plutôt, pour mieux dire. Nouveau prédicateur aujourd'hui, je l'avoue, Ecolier ou plutôt singe de Bourdaloue, Boileau, Sat. x. Il faut vous oublier, ou plutôt vous haïr, Racine, Andr. I, 4. Ou plutôt ils n'ont tous qu'une même pensée, Racine, Brit. IV, 4.
  • 4D'autant plutôt, d'autant plus volontiers. J'ai entrepris de vous faire amis [Bussy et Guitaut], d'autant plutôt qu'il me semble qu'une telle négociation est de ma force, Sévigné, Lett. à Bussy, 23 août 1678.

REMARQUE

1. Il ne faut pas confondre plutôt qui marque la préférence avec plus tôt, plus vite. C'est à la vérité un seul et même mot ; mais l'usage a établi une différence d'orthographe. Comme cette distinction, quant à l'orthographe, est tout à fait arbitraire et récente, on ne s'étonnera pas de trouver que dans les éditions anciennes elle n'est pas observée.

2. L'Académie écrit : Il n'eut pas plutôt dit, il n'eut pas plutôt fait telle chose qu'il s'en repentit. Mais il est évident que, du moment qu'on établit entre plutôt et plus tôt une distinction, qui d'ailleurs était fort peu nécessaire, il faut écrire dans les exemples ci-dessus : il n'eut pas plus tôt dit, il n'eut pas plus tôt fait… Ils sont plus tôt des hommes parfaits que le commun des hommes ne sort de l'enfance, La Bruyère, II.

HISTORIQUE

XIIIe s. Elles me mangeront plus tost crue que cuite, Berte, XXXVII.

XVIe s. Chascun choisit plustost à discourir du mestier d'un aultre que du sien, Montaigne, I, 57. Pitheus taschoit à luy persuader qu'il feist plus tost ce voyage par mer, Amyot, Thésée, 8.

ÉTYMOLOGIE

Plus, et tôt.