« réprouver », définition dans le dictionnaire Littré

réprouver

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réprouver

(ré-prou-vé) v. a.
  • 1Rejeter, condamner. Que la réforme ne pense pas s'excuser sur ce qu'elle pense à la fin avoir condamné en France et en Angleterre, par ses plus fameux écrivains, les guerres civiles de religion… car les réprouver quelque temps pour y revenir après, c'est bien montrer qu'on a honte de son erreur, mais c'est montrer en même temps qu'on ne veut pas s'en corriger, Bossuet, 5er avert. 1. Les saints anges protecteurs du temple déclarèrent hautement qu'ils l'abandonnaient, parce que Dieu, qui y avait établi sa demeure pendant tant de siècles, l'avait réprouvé, Bossuet, Hist. II, 8. Dieu réprouverait un culte où le cœur n'aurait point de part, Bourdaloue, Serm. 20e dim après la Pentecôt. Domin. t. IV, p. 210. A-t-il aimé le monde, lui [Jésus-Christ] qui l'a réprouvé ? Massillon, Carême, Mauv. riche. Il [le jésuite Lainez] disputait cependant dans cette assemblée [le colloque de Poissy] qu'il réprouvait, Voltaire, Mœurs. 171. Le bon sens rejette ces absurdités, et l'équité réprouve ces calomnies, Voltaire, Fragm. sur l'hist. VII. Le comique, qui était encore à la mode dans nos premiers opéras, est réprouvé aujourd'hui, Voltaire, Lett. Chabanon, 6 fév. 1770.
  • 2 Terme de théologie. Destiner aux peines éternelles. Les Juifs sont ennemis pour l'amour de vous ; si Dieu les a réprouvés, ç'a été, ô gentils, pour vous appeler, Bossuet, Hist. II, 7. Combien d'ancêtres de Jésus-Christ ont été réprouvés de Dieu, parce qu'avec cette qualité d'ancêtres de Jésus-Christ, ils n'ont pas laissé d'être des impies et des infidèles ! Bourdaloue, Instruct. Octave de l'Assompt. Exhort. t. II, p. 309. C'est notre foi, si jamais nous avons le malheur d'être réprouvés, qui dictera elle-même l'arrêt de notre réprobation, Bourdaloue, Jugem. dern. 1er avent, p. 54.

HISTORIQUE

XIe s. Mon escient, [ils] nel me reproveront [reprocheront], Ch. de Rol. LX. Et reprover [honte, reproche] à trestoux vos parenz, ib. CXXVII.

XIIIe s. Par Dieu, vassal, mar vous vint en pensé Quant vous m'avez reprové mon eage, Quesnes, Romancero, p. 109. Vié honte [vieille honte], quant on la repreuve, Est aussi laide come neuve, Hist. litt. de la Fr. t. XXIII, p. 739. Il nous reprouvera par ordre, Si com l'evangile recorde, Et bons et mauvais jugera, J. de Meung, Tr. 1399. Li marchis Bonifaces… li reprovoit sovent le grant servise qu'il li avoient fait, Villehardouin, XCII. Ce oï dire en reprovier [proverbe], Que l'en ne puet faire espervier En nule guise d'ung busart, la Rose, 3711.

XIVe s. Il reprouve ci l'oppinion de ceulx qui mettent felicité en richesses, Oresme, Eth. VI (10).

XVIe s. Les jugements de communauté de peuple sont souventes fois à reprouver comme deraisonnables, Boucic. III, 14. Gens superstitieux et reprouvés, Monstrelet, II, 65.

XVIe s. …Ains estoit sa compagnie et sa conversation fort plaisante et fort aggreable aux femmes, si en cela nous ne voulons reprouver le tesmoignage de la courtisane Flora, Amyot, Pomp. 76. Le peuple luy donna audience telle, qu'il apparoissoit qu'il ne reprouvoit ny n'approuvoit trop ce qui avoit esté fait, Amyot, César, 85. Ainsi ceux que Dieu laisse en elisant, il les reprouve, Calvin, Inst. 757. Richesses, presents… et telle aultre basse marchandise qu'ils reprouvent, Montaigne, I, 211.

ÉTYMOLOGIE

Wallon, r'prové ; provenç. reproar, reprobar ; espagn. reprobar ; port. reprovar ; ital. reprovare ; du lat. reprobare, de re, indiquant retrait, et probare, approuver (voy. PROUVER). Reprouvier a signifié proverbe, le proverbe devenant facilement une leçon, un reproche.