« suffoquer », définition dans le dictionnaire Littré

suffoquer

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

suffoquer

(su-fo-ké), je suffoquais, nous suffoquions, vous suffoquiez ; que je suffoque, que nous suffoquions, que vous suffoquiez v. a.
  • 1Faire perdre la respiration, en parlant de quelque vapeur ou de quelque cause intérieure. Pauline m'a écrit une lettre charmante ; son style nous plaît beaucoup ; Mme de la Fayette en oublia l'autre jour une vapeur dont elle était suffoquée, Sévigné, 6 déc. 1679. Une puanteur capable de suffoquer les hommes les plus vigoureux, Fénelon, Tél. X. Voilà ce que l'affliction qui me suffoque me permet de vous apprendre, Fénelon, t. XXI, p. 368. C'est en revenant de chez lui que j'entrai dans l'église de ce couvent pour cacher les pleurs qui me suffoquaient, Marivaux, Marianne, 4e part.

    Fig. Je n'y puis plus tenir, le secret me suffoque, Destouches, Phil. marié, I, 4.

    Absolument. Il fait un air brûlant qui suffoque.

  • 2Tuer par suffocation. Bannir tout un peuple du pays de sa naissance, en suffoquer un autre sous la terre, Guez de Balzac, le Prince, ch. 20. On lui trouva [à Montereul, de l'Académie française] sur le poumon un corps étranger en forme de champignon, qui l'avait peu à peu suffoqué, Pellisson, Hist. Acad. IV, Montereul.
  • 3Suffoquer un ruisseau, le charger de bois au delà de ce que son volume peut porter.
  • 4 Fig. Causer un sentiment pénible comparé à la gêne de la respiration. Paris me suffoque, et je voudrais déjà être partie pour Grignan, Sévigné, 30 déc. 1671. Elle [la Champmeslé] est laide de près, et je ne m'étonne pas que mon fils ait été suffoqué par sa présence, Sévigné, 15 janv. 1672.

    Absolument. Cela suffoque, cela excite l'indignation.

  • 5 Fig. Mettre à l'écart. Tous les alliés et les amis des amis avaient pris un si grand terrain, que les tantes à la mode de Bretagne ont été entièrement suffoquées, Sévigné, t. x, p. 147, éd. RÉGNIER.
  • 6 V. n. Perdre la respiration. À ces mots, Amazan fit de si prodigieux éclats de rire, qu'il fut près de suffoquer, Voltaire, Princ. de Babyl. 9.

    Familièrement et par exagération. Si vous ne le laissez pas parler, il va suffoquer, se dit d'un homme qui a une extrême envie de parler.

    Suffoquer de colère, d'indignation, être en proie à une colère, à une indignation telle qu'on peut à peine respirer. Le malheureux suffoquait de colère, Rousseau, Ém. I.

    Fig. Il était étrange qu'il [Fénelon] fût séduit par une femme [Mme Guyon] à révélations, à prophéties et à galimatias, qui suffoquait de la grâce intérieure, Voltaire, Louis XIV, 38.

    Fig. Se laisser suffoquer, se laisser accabler. Je me serais laissé surmonter et suffoquer par mes affaires, si je n'avais pris… cette résolution, Sévigné, 15 nov. 1684.

  • 7Se suffoquer, v. réfl. Se causer une grande peine. Je vous prie, ma très chère, de ne vous point suffoquer de faire réponse à mes lettres infinies, Sévigné, 29 nov. 1684.

    Se causer l'un à l'autre la suffocation. Qu'entre eux les gens de lettres se suffoquent d'encens ou s'inondent de fiel…, Buffon, Rép. au duc de Duras, Œuvr. t. x, p. 59.

HISTORIQUE

XIVe s. Quant l'eaue suffoque un homme, quel mestier [besoin] est il que il boive encore ? Oresme, Éth. 195.

XVIe s. Pareille cause [le vin] suffoqua aussi les forces abattues par l'aage du philosophe Arcesilaus, Montaigne, II, 19. S'en estant approchez, ils feurent suffoquez et bruslez, Montaigne, II, 38. Tout ainsi que les mauvaises herbes suffoquent les bonnes, si on ne les arrache…, Lanoue, 556.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. sufogar ; espagn. sufocar ; ital. suffocare ; du lat. suffocare, de sub, sous, et faux, la gorge.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

SUFFOQUER. Ajoutez :
8Étouffer par le trop grand nombre. Les mauvaises herbes suffoquent les blés, Malherbe, Lexique, éd. L. Lalanne.