« vis-à-vis », définition dans le dictionnaire Littré

vis-à-vis

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

vis-à-vis

(vi-za-vi) loc. prép.
  • 1En face, à l'opposite. Ce sont là les lois et les ordonnances que le Seigneur donna par Moïse aux enfants d'Israël, dans la plaine de Moab, le long du Jourdain, vis-à-vis de Jéricho, Sacy, Bible, Nomb. XXXVI, 13. Chaque jour à l'église il venait, d'un air doux, Tout vis-à-vis de moi se mettre à deux genoux, Molière, Tart. I, 6. Je n'ai insisté, Sire, que sur ce qui concerne l'intérêt de votre État, parce que c'est une dépêche à être lue dans le conseil ; si j'eusse eu à traiter la même affaire vis-à-vis de Votre Majesté seule, j'aurais beaucoup insisté sur ce qui peut intéresser son honneur…, Corresp. de Louis XV et de Noailles, t. I, p. 204 (1743)

    Par extension. Regardez cet homme d'intrigues environné de la troupe de ses clients… il regarde comme une grande peine de se trouver vis-à-vis de lui-même, Bossuet, Panég. St Franç. de Paule, 2. Je compare un déiste, vis-à-vis un païen, à…, Voltaire, Philos. Princ. d'act. 21. Ce qu'il y a de rare, c'est qu'après avoir défendu vis-à-vis du frère les gens de mérite et à talents, vous défendez vis-à-vis de la sœur les gens de finance ! Saurin, Mœurs du temps, 1.

    Fig. Qu'est-ce que s'examiner ? c'est mettre d'un côté les maximes de Jésus-Christ ; de l'autre, cette partie de notre vie que nous voulons connaître… placer ces maximes saintes vis-à-vis de nos démarches, Massillon, Carême, Confession.

    Fig. Il se trouve vis-à-vis de rien, se dit d'un homme dont tout l'avoir a disparu. Te voilà vraiment libre et vis-à-vis de rien, Destouches, Dissip. v, 9.

    On peut aussi supprimer de. Il demeure vis-à-vis le château. Il est au coin de la rue, le pauvre cher homme ! tout vis-à-vis un fourbisseur, Baron, Coquette et fausse prude, II, 7. Il n'est question que de deux ou trois mots d'amitié et quelques nouvelles… il ne faut pour cela que se mettre un demi-quart d'heure vis-à-vis son écritoire, Voltaire, Lett. Thiriot, 12 juin 1735. J'ai placé cette estampe [le portrait de Turgot] vis-à-vis celle de Jean Causeur ; ce n'est pas que Jean Causeur vaille M. Turgot, mais c'est qu'on l'a gravé à l'âge de cent trente ans, Voltaire, Lett. Vaines, 18 mars 1775.

    Adverbialement. Il demeure vis-à-vis.

  • 2 S. m. Une personne qui est en face d'une autre à la danse ou à la table. Mon vis-à-vis était une fort jolie femme. J'avais pour vis-à-vis un homme fort jovial.

    Un des deux couples nécessaires pour danser le quadrille. Je n'ai pas de vis-à-vis.

  • 3Tête à tête. Je ne vous ai jamais tant regardé de suite qu'en ce vis-à-vis et entre ces deux bougies, Saint-Simon, 350, 116.
  • 4Voiture en forme de berline à une seule place dans chaque fond. Aller d'abord montrer aux yeux de tout Paris La dorure et l'éclat d'un nouveau vis-à-vis, Boissy, Deh. tromp. II, 10. Ce pinceau sera prostitué à orner de peintures lascives les panneaux d'un vis-à-vis, Rousseau, Disc. rétabl. des sciences, 2.

REMARQUE

1. Vis-à-vis s'emploie souvent aujourd'hui au lieu de envers, à l'égard de ; c'est une faute ; d'après Humbert, elle est commune à Genève, et c'est J. J. Rousseau qui l'a introduite dans le français. Voltaire protesta : La langue, dit-il ironiquement, s'embellit tous les jours : le roi n'est plus endetté envers le public, mais vis-à-vis le public, Lett. Linguet, 15 mars 1769. Vis-à-vis s'introduit partout : on se trouve dans toutes les conversations vis-à-vis de ses goûts et de ses intérêts ; les courtisans sont bien ou mal vis-à-vis du roi ; le parlement en corps fait souvenir la nation qu'il a été le soutien des lois vis-à-vis de l'archevêque ; et les hommes, en chaire, sont vis-à-vis de Dieu dans un état de perdition, Dict. phil. Langues.

2. Ma maison est au vis-à-vis de la vôtre, est une locution vicieuse, il faut dire : vis-à-vis de la vôtre.

HISTORIQUE

XIVe s. Mais ce me rendi vigour Qu'elle vis à vis Me dist par très grant douçour : Adieu, dous amis, Machaut, p. 56.

XVIe s. … Alors qu'en la maison royalle Du roy mon pere, à t'amye loyalle Parlementes d'elle tout vis à vis, Marot, II, 2. Quels animaux n'ont la face en hault, et ne regardent vis à vis, comme nous ? Montaigne, II, 202. Le monde regarde tousjours vis à vis ; moy, je replie ma veue au dedans, Montaigne, III, 66. N'estant M. de Segré et ma niepce que au quart vis à vis [parents au 4e degré], Carloix, III, 5.

ÉTYMOLOGIE

L'ancien franç. vis, qui signifiait visage (voy. ce mot) : visage à visage, face à face.