« voiler », définition dans le dictionnaire Littré

voiler

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

voiler [1]

(voi-ler) v. a.
  • 1Couvrir d'un voile. Voiler les images d'une église. Agamemnon… Ou, pour cacher ses pleurs, s'est voilé le visage, Racine, lph. v, 5.

    Fig. Mais, hélas ! ta passion t'a voilé les yeux, Bossuet, Sermons, Bonté et rigueur de Dieu, Préamb.

  • 2 Par extension. Dérober la vue de quelque chose en le couvrant comme d'un voile. Des nuages voilaient le soleil. Tantôt la nymphe plonge, et le frais élément Voile, sans le cacher, cet objet si charmant, Delille, Trois règn. III. Ô combien la nature est plus sage que toi ! En nous voilant la mort, elle en bannit l'effroi, Delille, Imagin. VI. Et la nuit peut voiler un odieux mystère, Delille, ib. II. Des pleurs voilent son sourire [d'une mère], Et son regard semble dire…, Lamartine, Harm II, 1. Des nuits sereines dont les ténèbres transparentes voilent tout et ne cachent rien, Ch. Lévêque, Science du beau. t. II, p. 406.
  • 3 Fig. Cacher comme sous un voile. Ils avaient voilé leur révolte du prétexte de la religion. Une des principales raisons pour lesquelles les prophètes ont voilé les biens spirituels qu'ils promettaient sous les figures des biens temporels…, Pascal, Figur. 2, éd. FAUGÉRE. Epaississons la nuit qui voile sa naissance, Voltaire, Fanat. IV, 1. Il n'y a que le délire de la passion qui puisse me voiler l'horreur de ma situation, Rousseau, Hél. I, 35. Il [Pythagore] n'a point écrit ; il voilait sa doctrine, Diderot, Opinion des anc. philos. (Pythagorisme).
  • 4 Absolument. Cacher sous des paroles convenables. Voilez, voilez. Voiler et peindre est un art difficile, Marmontel, Polymn. ch. 2.
  • 5Perdre sa transparence, prendre de mauvaises teintes. … La flamme du bois qui ternit la blancheur de la porcelaine ; lorsque ce dernier accident arrive, les ouvriers appellent cela voiler, Dict. des arts et mét. Porcelaine. Ces substances [minérales] se réduisent en vapeurs par la violence du feu, elles s'attachent à la surface des pièces de porcelaine renfermées dans les gazettes, et leur donnent des couleurs désagréables à la vue ; c'est ce que les ouvriers appellent encore voiler, ib.
  • 6Se voiler, v. réfl. Se couvrir d'un voile. Dans les pays mahométans les femmes se voilent.

    Devenir sombre. Le ciel se voile et veut punir, Hugo, Odes, I, 1.

    Fig. Être caché. Enfin jamais l'amour ne fut moins imprudent, Ne sut mieux se voiler dans l'ombre du mystère, Voltaire, Tancr. II, 1.

HISTORIQUE

XIIe s. Miex vosisse estre ancele [j'aimerais mieux être servante], Nonne velée dedens une chapele, Raoul de C. 4.

XVIe s. Elle entra en la religion de sainte Claire, où elle fut reçue et voilée, Marguerite de Navarre, Nouv. XIX. Ay je pas veu en Platon ce divin mot, que nature n'est rien qu'une poesie ainigmatique, comme, peultestre, qui diroit une peincture voilée et tenebreuse, entreluisant d'une infinie varieté de fauls jours à exercer nos conjectures ? Montaigne, II, 280.

ÉTYMOLOGIE

Lat. velare, de velum (voy. VOILE 1).