« éloquence », définition dans le dictionnaire Littré
Définition dans d'autres dictionnaires :
éloquence
- 1Facilité à s'exprimer.
- 2 Par antonomase. L'art, le talent d'émouvoir et de persuader par le bien dire.
Vive source autrefois d'amour et d'éloquence
, Mairet, Sophon. V, 9.Je hais les pièces d'éloquence Hors de leur place et qui n'ont pas de fin
, La Fontaine, Fabl. IX, 5.À ces mots, il se couche ; et chacun, étonné, Admire le grand cœur, le bon sens, l'éloquence Du sauvage ainsi prosterné
, La Fontaine, Fabl. XI, 7.L'éloquence est un art de dire les choses de telle façon, 1° que ceux à qui l'on parle puissent les entendre sans peine et avec plaisir ; 2° qu'ils s'y sentent intéressés, en sorte que l'amour-propre les porte plus volontiers à y faire réflexion ; elle consiste donc dans une correspondance qu'on tâche d'établir entre l'esprit et le cœur de ceux à qui l'on parle d'un côté, et de l'autre les pensées et les expressions dont on se sert
, Pascal, Pensées, t. I, p. 379, édit. Lahure.L'éloquence est un don de l'âme, lequel nous rend maîtres du cœur et de l'esprit des autres
, La Bruyère, I.Que dis-je ! en ce moment Calchas, Nestor, Ulysse, De leur vaine éloquence employant l'artifice
, Racine, Iphig. II, 7.L'éloquence est un art sérieux et qui ne joue point un personnage ; jamais un homme de génie, pour faire parade d'éloquence, ne perdit son temps à invectiver Tarquin ou Sylla, ou à s'efforcer d'engager Alexandre à vivre en repos
, Turgot, Ébauche du 2e disc. Progrès de l'esprit humain, p. 302.Cicéron, qui d'un traître a puni l'insolence, Ne sert la liberté que par son éloquence
, Voltaire, M. de César, II, 4.Si nous avons d'autres lois de physique que celles de votre temps [le temps de Cicéron], nous n'avons point d'autre règle d'éloquence ; et voilà peut-être de quoi terminer la querelle entre les anciens et les modernes
, Voltaire, Dial. 13.Mais de la poésie usurpant les pinceaux, Et du nom de vertus sanctifiant sa prose, Par la pompe des mots l'éloquence en impose
, Gilbert, XVIIIe siècle.Ils ont senti que l'éloquence était une puissance dont il fallait se défier comme de toutes les autres
, Mirabeau, Collection, t. I, p. 4.Venez, votre éloquence, auguste, charitable, Peut-être amollira cette âme impitoyable
, Lemercier, Frédég. et Bruneh. IV, 5.C'est après soixante ans que, par curiosité, par étude, ouvrant un livre [de J. J. Rousseau] dont les pages sont encore animées d'une éloquence qui ne passera pas…
, Villemain, Littér. Tabl. du XVIIIe siècle, 2e partie, 2e leçon.Le dieu de l'éloquence, Mercure.
Il [Jupiter] part avec son fils, le dieu de l'éloquence
, La Fontaine, Phil. et Bauc.L'éloquence du cœur, langage éloquent, qui émeut, qui persuade, et qui est suggéré non par l'esprit, mais par le cœur.
Croyais-tu que son cœur… Pour la persuader trouvât tant d'éloquence ?
Racine, Bajaz. III, 3.Ah ! que la vérité nous donne d'éloquence !
Delavigne, Paria, I, 1.Par extension. La physionomie, le geste ont leur éloquence.
On dit qu'une chose a de l'éloquence, quand l'aspect seul parle pour ainsi dire. Les faits ont leur éloquence.
Puis il regagna Maloiaroslavetz, où le vice-roi lui montra les obstacles vaincus la veille ; la terre elle-même en disait assez : jamais champ de bataille ne fut d'une plus terrible éloquence
, Ségur, Hist. de Nap. IX, 4. - 3Il se dit d'un genre d'élocution. L'éloquence de la chaire, du barreau, de la tribune.
- 4Eloquence est quelquefois pris dans le sens de rhétorique. Quand on parle des règles de l'éloquence, c'est d'une science qu'il s'agit, non d'un talent ou d'une disposition innée.
- 5Dans quelques circonstances l'éloquence s'oppose à la poésie, et signifie l'ensemble des ouvrages en prose écrits dans une langue. Un cours d'éloquence latine.
SYNONYME
ÉLOQUENCE, RHÉTORIQUE. L'éloquence est proprement l'art ou le talent de parler ; la rhétorique est l'ensemble des préceptes ou des exemples qui font apprendre cet art.
HISTORIQUE
XIIe s. Si esteit de grant eloquence, Et parleit par grant sapience
, Wace, Vierge Marie, p. 3.
XIIIe s. Ki [celui à qui] Deus ad doné en science De parler la bone eloquence, Ne s'en deit taisir ni celer
, Marie de France, Prologue.
XVe s. Il me semble que autres fois vous ay veu ailleurs que cy. Sire, dist Estonne, que pensez-vous que je soye ? Certes, sire, à vostre eloquence [parler], il m'est advis que vous estes Estonne, le conte des deserts d'Escosse
, Perceforest, t. III, f° 55.
XVIe s. Je ne douteray de donner ici à chacun d'eux son eloquence [éloge]
, Pasquier, Recherches, p. 634, dans LACURNE.
ÉTYMOLOGIE
Provenç. eloquencia, eloquensa ; espagn. eloquencia ; ital. eloquenzia ; du latin eloquentia, d'eloquens (voy. ÉLOQUENT).