« approprier », définition dans le dictionnaire Littré

approprier

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

approprier

(a-pro-pri-é) v. a.
  • 1Rendre propre à, convenable à. Il sera difficile d'approprier ce que j'ai à dire au tribunal où je comparais, Rousseau, Sciences.
  • 2Mettre en état de propreté, disposer convenablement. Approprier une maison, une chambre, un cabinet. Mettez ordre à tout [Nausicaa], dépêchez-vous de les laver [vos vêtements], de les approprier, Fénelon, XXI, 348. L'instinct d'approprier son domicile et d'y faire un plancher, pour n'être pas incommodée de l'humidité, Buffon, Loutre.
  • 3 Fig. Faire qu'une chose devienne comme la propriété d'un autre. Et son intérêt lui doit conseiller de faire cesser les misères que sa compassion lui appropria, Guez de Balzac, Disc. à la Régente.
  • 4S'approprier, approprier à soi, usurper la propriété. Ils se sont approprié un dépôt… Vous êtes fort plaisante De vouloir m'enlever un cœur comme le sien, Et vous approprier si hardiment mon bien, Regnard, Ménech. V, 2.

    Fig. Il y a apparence que Dieu s'est approprié cette affaire, Pascal, dans COUS. Il s'approprie une nature étrangère, Bossuet, Hist. II, 11. S'appropriant toujours le sort des malheureux, De ses concitoyens mon époux fut le père, Royou, Phocion, II, 2. Je m'approprie de telle sorte vos joies et vos déplaisirs, que ce sont les bonnes et les mauvaises nouvelles que je reçois de vous, qui font mes bons et mes mauvais jours, Guez de Balzac, Lett. à Conrard, I, 1, dans RICHELET.

  • 5S'approprier, v. réfl. Se conformer à, se mettre à la portée de. Cet auteur songe peu à s'approprier à ses lecteurs. Les maîtres se sont appropriés à leurs élèves.

SYNONYME

S'APPROPRIER, S'ARROGER, S'ATTRIBUER. Se donner une chose de son chef. S'approprier indique la prise de propriété ; la chose ne nous appartient pas ; nous la prenons, et nous la faisons nôtre. S'arroger n'implique aucune idée de propriété ; aussi s'applique-t-il à toutes choses : priviléges, autorité, droits, etc. seulement il emporte arrogance, hauteur, prétention à la supériorité. S'attribuer exprime que celui qui s'attribue s'adjuge une chose qui est contestée et à laquelle d'autres prétendent : Les deux partis s'attribuèrent la victoire.

HISTORIQUE

XIIIe s. Quant Renart ot en sa reson Bien definée s'oroison Et aproprié son chapitre, Ren. 29617. Que ce qui commun ert devant, Comme le soleil et le vent, Par convoitise approprierent, Quant as richeces se lierent, la Rose, 9693. Ainsinc Barat a tout honni, Par qui li biens jadis ouni [unis, communs] Furent as gens approprié, ib. 5173. Coses sacrées, si sont celes qui sont benoites et apropriées à fere le service nostre Segneur, Beaumanoir, XI, 15. Et tel damace doit il bien recevoir, parce qu'il voloit le gaige malvesement aproprier à soi, Beaumanoir, LXVIII, 10. Et c'est grant faute de language, quant l'en approprie au dyable l'omme ou la femme qui est donné à Dieu dès que il fu baptiziés, Joinville, 293.

XIVe s. Nom approprié, Oresme, Eth. 48. Chescune delettacion est appropriée à l'operacion que elle parfait, et a à elle une affinité, Oresme, ib. 306.

XVIe s. Les apostres approprient à Jesus Christ ce qui est dit au psaume huitieme, Calvin, Instit. 363. Il n'est point licite de transferer à l'homme mortel ce que Dieu s'approprie à soy, Calvin, ib. 949. Il ne faut point attendre aage d'homme pour sanctifier les enfans à Dieu ; mais ils lui doivent estre reservez et appropriez des leur naissance, Calvin, ib. 1091. Qu'il oublie, s'il veult, d'où il tient ces preceptes ; mais qu'il se les sache approprier, Montaigne, I, 162. Comme un soulier ne convient pas à tous pieds, aussi un fait ne se peut aproprier à tous païs, Lanoue, 90. Plusieurs d'eux s'aproprieront des choses dont ils n'estoient auparavant qu'usufructiers, Lanoue, 102. Si on regarde l'infinité de belles maisons qu'elle possede, si bien apropriées et pourveuës de tout ce qui fait besoing, Lanoue, 148. Beaucoup de gentilshommes furent contraints de vendre leurs fiefs aux ignobles, qui eurent permission du Roy de les pouvoir acheter ; car auparavant ils ne pouvoyent s'en approprier, Lanoue, 229. Comme celuy qui se vouloit approprier la gloire d'Achilles, plus par imitation de sa vertu que pour estre issu de son sang…, Amyot, Pyrrh. 14. Affin d'en approprier [rendre propriétaire] un de ses neveux, Carloix, II, 10. Il me rendra bon compte de toutes les richesses qui sont là dedans, et ne se appropriera de pas une, Carloix, IV, 29. Des remedes appropriés aux qualités des corps, Paré, Au lect. Tenir les lins arrousés, aiant la commodité de l'eau, à ce appropriant le plan pour la donner à propos à la ligneraie, De Serres, 733.

ÉTYMOLOGIE

Berry, appropzir ; provenç. apropriar ; espagn. apropiar ; ital. appropriare ; du latin appropriare, de ad, à, et proprius (voy. PROPRE). Approprier veut dire faire sien, de là ensuite, rendre propre à soi, puis rendre propre, convenable en général, disposer, arranger, de là enfin, dans un sens plus étroit, nettoyer.