« colorer », définition dans le dictionnaire Littré

colorer

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

colorer

(ko-lo-ré) v. a.
  • 1Donner de la couleur. Le soleil colore les fruits. J'ignorais [ce] que ce pouvait être, Qui lui colorait ce beau teint, Malherbe, IV, 1. Cette noble pudeur colorait son visage, Racine, Phèd. II, 5. Il le revit [l'incendie de Moscou] dans toute sa violence ; toute cette cité lui parut une vaste trombe de feu qui s'élevait en tourbillonnant jusqu'au ciel et le colorait fortement, Ségur, Hist. de Napol. VIII, 7.
  • 2 Fig. Embellir. Son imagination lui colore tout.
  • 3Présenter sous un jour, sous un aspect favorable. Je n'ai point d'éloquence Pour colorer un fait, ou détourner la foi, Régnier, Sat. III. Je ne sais pas ce qu'on peut dire pour colorer tant de violences, Patru, Plaid. V, dans RICHELET. Pour en rompre les nœuds et colorer ses crimes, Rotrou, Vencesl. II, 1. Et pour en colorer l'emportement honteux, Corneille, Sertor. I, 1. L'ingrat d'un faux respect colorant son injure, Racine, Brit. I, 1. Et par là de son fiel colorant la noirceur, Racine, Athal. I, 1. Dans leur rébellion les chefs des janissaires Cherchent à colorer leurs desseins sanguinaires, Racine, Baj. II, 1. Quelle excuse pouvons-nous trouver pour colorer nos rébellions ? Bossuet, Purif. 2. Le monde n'a plus rien à nous dire pour colorer ses déréglements, Massillon, Panég. St-Louis. Des raisons dont la flatteuse adresse à mes yeux éblouis colorant vos refus…, Voltaire, Zaïre, IV, 2. Que d'un prétexte heureux la trompeuse apparence Colore ces apprêts…, Delille, Énéide, IV, 416.
  • 4Se colorer, v. réfl. Prendre de la couleur. Les raisins commencent à se colorer.

SYNONYME

COLORER, COLORIER. Colorer, c'est donner une couleur naturelle ou artificielle, mais sans autre intention que cette couleur même. Colorier, c'est apposer avec art des couleurs sur quelque chose. Un verre coloré est un verre qui a une teinte de couleur quelconque comme un verre bleu, un verre rouge, et en général les vitraux de nos églises ; un verre colorié est un verre qui représente quelque dessin qu'on a tracé dessus, comme les verres de la lanterne magique, sur lesquels on a peint en couleurs transparentes des figures qui se reproduisent amplifiées sur un linge blanc.

HISTORIQUE

XIIe s. Trois fois se pasme sur l'erbe colorie, Ronc. p. 115. Blanche char [elle] ot comme flors espanie ; Face vermelle com rose coulorie, Raoul de C. 143.

XIIIe s. [La femme] Or est un peu descolorée ; Par temps sera bien colorée, Contenance des femmes.

XIVe s. Ce que il dit eust aucune couleur, mais comme pourroit il coulourer son dit ? Oresme, Eth. 297. Les petiz [corps], disons nous que il sunt bien formez, bien mesurez ou bien colorez, Oresme, ib. 118. Il le dist pour applaudir [faire approuver] et coulourer son fait, Du Cange, applausivus.

XVe s. Et leur fit dire et demontrer tant de belles raisons colorées que…, Froissart, I, I, 310. Ne jamais il ne doibt estre receu à dire le contraire de sa confession, ne à la coulourer ou justifier autrement, Juvénal Des Ursins, Charles VI, 1411. Tous se coulouroient sur le bien publique du royaulme, Commines, I, 2.

XVIe s. Il employoit à tout propos ce qu'il avoit appris de Anaxagoras, coulourant ses raisons de philosophie naturelle par l'artifice de rhetorique, Amyot, Péricl. XII. Ces beaux pavois de pourpre coulourez, D'yvoire et d'or richement labourez…, Amyot, Timol. 41. Luy qui ne demandoit que quelque occasion colorée, Amyot, César, 16.

ÉTYMOLOGIE

Berry, couleurer ; Saintonge, coulourer ; provenç. et espagn. colorar ; portug. corar ; ital. colorare ; du latin colorare, de color, couleur.