« férir », définition dans le dictionnaire Littré

férir

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

férir

(fé-rir) v. a.
  • Frapper. Terme vieilli usité seulement dans cette locution : Sans coup férir, sans en venir aux mains. Ainsi sans coup férir je sors de la bataille, Régnier, Sat. x.

    Fig. et familièrement, sans coup férir, sans difficulté, sans résistance. …Il nous faut, Sans coup férir, rattraper notre somme, La Fontaine, Savet.

REMARQUE

1. Il est dommage que ce verbe soit confiné à une seule forme dans une locution unique. Il faut louer les écrivains qui essayent d'en ramener quelque peu l'usage. Voiture s'en est servi pour parler des coups que se donnaient les paladins : Je n'ai pu pourtant m'empêcher de rire quand j'ai lu ce que vous dites, que M. de R*** fiert et frappe ainsi que monseigneur Amadis, lett. 63. Molière a dit férir dans le sens de frapper le cœur : Peut-être en avez-vous déjà féru quelqu'une, Éc. des f. I, 6. Ou le trouve aussi ailleurs. On vint à parler de la devise de la maison de Solar : Tel fiert qui ne tue pas… quelqu'un trouva dans cette devise une faute d'orthographe, et dit qu'au mot fiert il ne fallait pas de t… je dis que je ne croyais pas que le t fût de trop ; que fiert était un vieux mot français qui ne venait pas de ferus, fier, mais du verbe férir, il frappe, il blesse, Rousseau, Conf. III, part. 1. Lancelot : Ami, pourquoi ne m'avoir pas frappé [de la lance] ? - Tristan : …Férir ce que l'on aime, C'est pis encor que se férir soi-même, Creuzé de Lesser, la Table ronde, XVI.

2. La conjugaison était : je fiers, tu fiers, il fiert, nous férons, vous férez, ils fièrent ; je férais ; je féris ; je ferrai ; fier, férons ; que je fière ; que je férisse ; férant ; féru.

HISTORIQUE

XIe s. De cops ferir, receveir et doner, Ch. de Rol. X.

XIIe s. Ainsi furent, sans cop ferir, Desconfit li un et li autre, Benoit, v. 157. Parmi le cors [je] sui en mains lieuz feruz, Ronc. p. 93. De ses beaus ieuz [elle] me vint sans desfiance [défi] Ferir au cuer, que n'i ot autre effort, Couci, XVI. E quant li reis le vit, moult out le quer [cœur] irié, Ses mains feri ensemble, et se plainst sans faintié, Th. le mart. 133.

XIIIe s. Et là si a un flum qui fiert dedens la mer, Villehardouin, LXXIV. À l'uis commençai à ferir, Autre entrée n'i soi [je n'y sus] querir, la Rose, 521. … Le vent se feri ou voille et nous ot [eut] tolu [enlevé] la veue de la terre, Joinville, 210. … Là où le soleil feroit, qui fesoit les armes resplendir, Joinville, 213. Car tieux [tel] quide [croit] ferir qui tue, Leroux de Lincy, Prov. t. II, p. 255.

XIVe s. Un plat d'argent blanc, signé de trois escussons, feruz sur le bort à armes, De Laborde, Émaux, p. 316.

XVe s. Et ouis dire que si tous les haulmiers de Paris et de Bruxelles fussent ensemble, … ils n'eussent pas mené ni fait greigneur noise comme les combattans et les ferans sur ces bassinets faisoient, Froissart, II, Il, 197. Et pource que je vous vois plus feru [épris] que la chose ne vaut, vous ai pieçà voulu avertir, Louis XI, Nouv. XXXIII.

XVIe s. … Car d'aucun bien je ne fuz secouru De celle-là, pour qui j'estois feru, Marot, I, 160. Le perigordin appelle lettre-ferits, ces savanteaux ; comme si vous disiez lettre-ferus, ausquels les lettres ont donné un coup de marteau, Montaigne, I, 146. La sentence pressée aux pieds nombreux de la poesie me fiert d'une plus vifve secousse, Montaigne, I, 155. Mal joue, qui fiert la joue, Cotgrave

ÉTYMOLOGIE

Provenç. ferir ; espagn. herir ; ital. ferir ; du lat. ferire, frapper.