« guerrier », définition dans le dictionnaire Littré

guerrier

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

guerrier, ière

(ghè-rié, riè-r') adj.
  • 1Qui appartient à la guerre. Revois ce champ guerrier dont les sacrés sillons Élevaient contre toi de soudains batailions, Corneille, Médée, III, 3. Et ne suis-je blanchi dans les travaux guerriers Que pour voir en un jour flétrir tant de lauriers ? Corneille, Cid, I, 7. Prenez soin qu'à l'instant la trompette guerrière Dans le camp ennemi jette un subit effroi, Racine, Athal. V, 3. On n'imaginerait pas qu'au milieu d'une vie si agitée et si guerrière il faisait un livre, Fontenelle, Renau.
  • 2Qui est porté ou propre à la guerre. Un prince guerrier. On le voyait [le général espagnol, à la bataille de Rocroi], porté dans sa chaise, et, malgré ses infirmités, montrer qu'une âme guerrière est maîtresse du corps qu'elle anime, Bossuet, Louis de Bourbon. Mais vous, s'il était vrai que son ardeur guerrière Eût ouvert à la vôtre une illustre carrière, Racine, Alex. IV, 2. Dans cette île et guerrière et chrétienne, Voltaire, Tancr. I, 1. Il n'y avait du temps d'Auguste qu'une seule nation, et il y en a aujourd'hui plusieurs, policées, guerrières, éclairées, qui possèdent des arts que les Grecs et les Romains ignorèrent, Voltaire, Louis XIV, 29.

    Avoir l'air guerrier, la mine guerrière, avoir l'air, la contenance d'un homme de guerre.

  • 3 S. m. Celui qui fait la guerre. Un injuste guerrier, terreur de l'univers, Boileau, Sat. X. Aux plus savants auteurs comme aux plus grands guerriers Apollon ne promet qu'un nom et des lauriers, Boileau, Art p. IV. Montrez-nous, guerriers magnanimes, Votre vertu dans tout son jour ; Voyons comment vos cœurs sublimes Du sort soutiendront le retour, Rousseau J.-B. Ode à la Fortune. Il [René] remonta le Meschacebé jusqu'aux Natchez, et demanda à être reçu guerrier de cette nation, Chateaubriand, Atala, Prologue.

    Il se dit au féminin. Cette illustre guerrière Ayant vu ses soldats gisants sur la poussière, Mairet, Mort d'Asdrub. v, 2.

    Dans le style soutenu, soldat. Depuis, comme il arrive toujours, l'infortune ayant écrasé ces guerriers [les soldats entrés dans Moscou], des reproches s'élevèrent ; eh ! qui ne sait que de pareils désordres ont toujours été le mauvais côté des grandes guerres, le côté honteux de la gloire ; que la renommée des grands conquérants porte son ombre comme toutes les choses de ce monde ? Ségur, Hist. de Nap. VIII, 8. Dans cette colonne [armée française sortant de Moscou] de cent quarante mille hommes et d'environ cinquante mille chevaux de toute espèce, cent mille combattants marchant à la tête avec leurs sacs, leurs armes, plus de cinq cent cinquante canons et deux mille voitures d'artillerie, rappelaient encore cet appareil terrible de guerriers vainqueurs du monde, Ségur, ib. IX, 1.

    Fig. Là, bornant son discours, encor tout écumante, Elle souffle aux guerriers [les chanoines de la Sainte-Chapelle] l'esprit qui la tourmente, Boileau, Lutr. V.

    Caste des guerriers, se dit, dans l'Égypte et dans l'Inde, de la caste de ceux qui portent les armes. La tribu des guerriers, ouvrage de ses bras [de Brama], Eut la force en partage et courut aux combats, Delavigne, Paria, I, 1.

    PROVERBE

    Un guerrier doit avoir assaut de lévrier, fuite de loup et défense de sanglier, c'est-à-dire assaillir hardiment, fuir lentement, et se défendre, quand il est acculé, comme le sanglier.

SYNONYME

1° GUERRIER, BELLIQUEUX. Un prince guerrier est un prince qui fait la guerre et, si l'on veut, aime la guerre. Un prince belliqueux est un prince qui aime la guerre. Un prince belliqueux peut n'avoir pas encore fait la guerre ; un prince guerrier l'a faite.

2° GUERRIER, MARTIAL., Une mine guerrière, une attitude guerrière est la même chose qu'une mine martiale, qu'une attitude martiale. La seule différence que l'usage ait mise, c'est que guerrier appartient davantage au style élevé, et martial au style ordinaire.

HISTORIQUE

XIe s. Li quens Rolanz fut nobile guerrer, Ch. de Rol. CLII.

XIIe s. …l'espée dan Girart le guerrer, Ronc. p. 50.

XIIIe s. Car ainc en nule maniere [je] Ne forfis Que fussiez ma guerriere [ennemie], Quesnes, Romanc. p. 88. Gille [elle] ot nom et fu mere Rolant le bon guerrier, Berte, CXXIX. Et li Turc sont sage et boin guerroier, Chr. de Rains, p. 202. Ysengrin, qui fu ses guerriers [son ennemi], Et qui le haoit [haïssait] mortelment, Ren. 18854.

XIVe s. Il a en France un tel proverbe : de bon tourneeur [homme de tournoi] couart guerrier, Oresme, Eth. 79.

XVIe s. Laissant le tout sur sa guerriere experience, Carloix, IX, 5. Je hais moins l'injure guerriere que pacifique, Montaigne, IV, 101. Leurs chansons guerrieres [des peuples d'Amérique], Montaigne, I, 245. Ces mouvements guerriers qui nous ravissent de leur horreur et espoventement, cette tempeste de sons et de cris, Montaigne, II, 187.

ÉTYMOLOGIE

Guerre ; bourguig. guarrei ; provenç. guerrier, guerrer ; esp. guerrero ; port. guerreiro ; ital. guerriere. On remarquera à l'historique le sens de : celui qui fait peine, mal à un autre ; ce sens se retrouve au verbe dans le dialecte du Berry (voy. GUERROYER).