« ployer », définition dans le dictionnaire Littré

ployer

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

ployer

(plo-ié ; plusieurs disent ploi-ié ; Vaugelas remarque que la cour, pour plus grande douceur, prononçait player), je ployais, nous ployions, vous ployiez ; que je ploie, que nous ployions, que vous ployiez ; l'y se change en i devant l'e muet : je ploie, je ploierai v. a.
  • 1Arranger une chose en plis. Ployer une étoffe. Ployez votre serviette.
  • 2Donner une courbure, une flexion. Ployer une branche d'arbre. Ployer les genoux.

    Fig. Ployer les genoux, faire des actes de servilité. En vain, pour satisfaire à nos lâches envies, Nous passons près des rois tout le temps de nos vies à souffrir des mépris et ployer les genoux, Malherbe, I, 3.

  • 3 Fig. Faire céder, faire fléchir. L'exemple de leur race à jamais abolie Devra sous ta merci tes rebelles ployer, Malherbe, II, 12. La coutume de voir les rois accompagnés de gardes, de tambours, d'officiers et de toutes les choses qui ploient la machine vers le respect et la terreur, Pascal, Pens. v, 7, éd. HAVET. Ils ne rompront pas les lois, mais ils les ploieront à leurs intérêts, Fléchier, Panég. II, 33. Avec quelle soumission elle ploya sa volonté ! Fléchier, Aiguillon.
  • 4 Terme de charpente. Désassembler les bois de dessus l'épure, et les empiler avant de les transporter au bâtiment.
  • 5 V. n. Courber, fléchir. Le vendangeur ravi de ployer sous le faix, Boileau, Épît. VI. Je sentis mon sang se glacer dans mes veines, mes genoux ployèrent sous moi, et je tombai sans connaissance, Marmontel, Cont. mor. Berg. alp.

    Fig. Être accablé, céder, fléchir. Il n'y a rien dans ce royaume qui ne ploie sous votre autorité, Guez de Balzac, liv. II, lett. 20. Soutiendrez-vous un faix sous qui Rome succombe,… Sous qui le grand Pompée a lui-même ployé ? Corneille, Pomp. I, 1. C'est un tyran [l'amour] qui ne souffre point de compagnon… il faut que toutes les passions ploient et lui obéissent, Pascal, Pass. de l'amour. Déjà Dôle et Salins sous le joug ont ployé, Boileau, Art p. IV. C'est lui qui devant moi refusant de ployer…, Racine, Esther, II, 1. Le pesant joug de la nécessité sous lequel il faut que tout être fini ploie, Rousseau, Em. II. Mon cœur ploie Sous la joie, Hugo, Ball. 12.

  • 6 Fig. Se ployer, s'accommoder à, se prêter à. Il se ploie à tout ce qu'on veut.

HISTORIQUE

XIIe s. Se lui donez cest gant qui est ploiez…, Ronc. p. 120. Se droit n'en faites et le gaige ploier, Raoul de C. 212.

XIIIe s. Li vallet toiserans doivent lessier oevre de tistre sitost que le premier cop de vespres sera sonés ; mès il doivent ploier leur oevres puis ces vespres, Liv. des mét. 125. Un arbre tuert [se tord] et freint de trop souvent ploier, La folle et la sage.

XVe s. Son oncle le duc de Bourgogne, qui le menera et ploiera du tout à sa volonté, Froissart, II, II, 161. … Qui voelt la saucelle Ployer aise, il la prend vergelle, Froissart, Espinette amoureuse. Car rompre vault pis que ployer, Et esbranlé mieulx que cheü [tombé], Chartier, Poésies, p. 514.

XVIe s. Bienheureuse est la main qui la ploya [une lettre], Marot, I, 372. Bref il congneut que toute nation Ployoit soubs luy comme au vent le sion, Marot, I, 160. Non pas l'innovant [la langue], tant comme l'estirant et ployant, Montaigne, III, 353. La faveur me ploye, la crainte me roidit, Montaigne, IV, 68. Il feinct, il ploie, il differe, selon le besoing des occasions, Montaigne, IV, 153. Ilz ne le contrefaisoient [Alexandre] sinon en une façon de ployer un peu le col, et de parler haultainement, Amyot, Pyrrhus, 115. Un genoil ployé en terre, Amyot, Anton. 58. La capitulation se fit aussitost à bagues sauves, enseigne desploiée et la meche allumée, sept jours de terme pour ployer bagage, D'Aubigné, Hist. II, 59. Puisque tant de fleaux qui te playent l'eschine N'arrachent un soupir de ta dure poitrine, Dubartas, 1re semaine.

ÉTYMOLOGIE

Autre forme de plier ; Berry, pleyer, pléger.