« port », définition dans le dictionnaire Littré

port

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

port [1]

(por ; le t ne se prononce pas et ne se lie pas ; au pluriel, l's ne se lie pas ; cependant quelques-uns la lient : des por-z avantageux) s. m.
  • 1Lieu sur une côte où la mer s'enfonce dans les terres et offre un abri aux bâtiments. Vous voyez le grand gain, sans qu'il faille le dire, Que de ses ports de mer le roi tous les ans tire : Or l'avis dont encor nul ne s'est avisé, Est qu'il faut de la France, et c'est un coup aisé, En fameux ports de mer mettre toutes les côtes, Molière, Fâch. III, 3. Le vent qui nous flattait nous laissa dans le port, Racine, Iphig. I, 1. La vue du port donne une nouvelle vigueur aux matelots lassés d'une longue navigation, Lesage, Gil Blas, IV, 11. Les Grecs d'Égypte purent faire un commerce très étendu ; ils étaient maîtres des ports de la mer Rouge, Montesquieu, Esp. II, 9. Amsterdam, malgré les incommodités de son port, devint le magasin du monde, Voltaire, Mœurs, 187. Voyez Aigues-Mortes, Fréjus, Ravenne, qui ont été des ports et qui ne le sont plus, Voltaire, Mœurs, introd.

    On dit souvent port de mer pour le distinguer des ports sur des rivières.

    Port militaire, celui où stationnent d'ordinaire les bâtiments de guerre d'un État.

    Port marchand, celui qui reçoit les bâtiments marchands.

    Port fermé, port garanti de la violence du vent et des lames. On dit par opposition : port ouvert.

    Port de toute marée, celui où les bâtiments peuvent entrer en tout temps.

    Port de marée, petit port où l'on ne peut entrer que lorsque le flot a acquis une certaine hauteur.

    Port de barre, celui dont l'entrée est fermée par une barre.

    Port franc, celui où les marchandises ne payent point de droits, tant qu'elles n'entrent pas dans l'intérieur du pays.

    Port franc se dit aussi d'un édifice situé près du port, dans lequel on entrepose les marchandises étrangères.

    Avoir un port sous le vent, se trouver en position de se réfugier dans un port voisin.

    Prendre port, surgir au port, entrer dans un port. Il [Pompée] ne vient que vous perdre en venant prendre port, Corneille, Pomp. I, 1. L'onde s'enfle dessous, et d'un commun effort Les Maures et la mer montent jusques au port, Corneille, Cid, IV, 3.

    Fig. Prendre port, atteindre son but, réussir dans ce qu'on a entrepris.

    Fermer un port, fermer les ports, empêcher qu'il n'en sorte aucun bâtiment.

    Faire naufrage au port, périr en arrivant au port.

    Fig. Manquer de réussir ou périr, au moment où l'on touchait au succès ou au salut. Le plus souvent on fait naufrage au port, Tristan, Panthée II, 2. Je n'en saurais douter, je péris dans le port, Corneille, Cid, II, 3.

    Arriver à bon port, atteindre heureusement le terme d'une navigation. Sur tous ses compagnons Atropos et Neptune Recueillirent leurs droits, tandis que la Fortune Prenait soin d'amener son marchand à bon port, La Fontaine, Fabl. VII, 14.

    Fig. Arriver à bon port, arriver heureusement et en bonne santé au lieu où l'on voulait aller.

    Arriver à bon port, signifie aussi achever, terminer, réussir. Afin que l'aventure… aille à bon port, La Fontaine, Mandr. Je ne vous dis point… si je souhaite que toute la barque arrive à bon port, Sévigné, 3. Jamais ceci n'ira à bon port jusqu'à dimanche, Sévigné, 12. Je suais sang et eau pour voir si du Japon Il viendrait à bon port au fait de son chapon, Racine, Plaid. III, 3.

    Capitaines et officiers de port, fonctionnaires chargés de surveiller les ports de commerce.

  • 2Endroit, dans une rivière, où l'on embarque et débarque les marchandises.

    Bas port, se dit, à Paris, de certaines parties des quais de la Seine, qui sont assez peu élevées pour qu'on y débarque et embarque commodément les marchandises.

  • 3Ville bâtie autour d'un port. Brest est un beau port.
  • 4 Fig. Lieu de refuge, de repos. Venez-vous m'annoncer le naufrage ou le port ? Mairet, Sophon, v, 2. Après un long orage il faut trouver un port ; Et je n'en vois que deux : le repos ou la mort, Corneille, Cinna, IV, 4. Ne reconnaît-on pas en cela les humains ? Dispersés par quelque orage, à peine ils touchent le port, Qu'ils vont hasarder encor Même vent, même naufrage, La Fontaine, Fabl. X, 15. Je m'assure un port dans la tempête, Racine, Brit. I, 1. Quand on est arrivé au port, qu'il est doux de rappeler le souvenir des orages et de la tempête ! Massillon, Avent, Mort du péch. Ici viennent mourir les derniers bruits du monde ; Nautonniers sans étoile, abordez ! c'est le port, Lamartine, Médit. la Semaine sainte.

    Il est arrivé au port, il est dans le port, se dit d'un homme de bien qui est mort et que l'on croit jouir du bonheur éternel. Il est dans le port, il est hors des atteintes de l'injustice et de l'envie, Patru, Lett. à Olinde, dans RICHELET.

    Fig. Port de salut, lieu où l'on se retire à l'abri d'une tempête. Cette rade a été pour lui un port de salut.

    Port de salut, se dit aussi de tout lieu où l'on se retire loin des embarras du monde, où l'on se met à l'abri de quelque danger

HISTORIQUE

XIe s. Souz Alixandre [Alexandrie], ad un port juste mer, Ch. de Rol. CLXXXV.

XIIe s. Or le [mon cœur] doinst Diex à droit port arriver ; Car il s'est mis en mer sans aviron, Couci, X. Tuz les porz funt guaitier e de jur e de nuit, Qu'il n'i puisse passer…, Th. le mart. 63.

XIIIe s. Li pors est teus [tel] desor [dessous] le mur, Que bien mil nés [navires] tot à seür Y puent [peuvent] estre et sejorner, Partonop. v. 801. Li sainz espiritz est cunfort à tuz dolens, as peris port, E lumere est as tenebrus, Édouard le confesseur, v. 3121. Et Dieu, à cui il s'atendoit, nous saulva en peril de mer bien cinq semaines, et venimes à bon port, Joinville, 193.

XVe s. Que nullement ils ne laissassent le roi d'Angleterre repasser, ni prendre port en Flandre, Froissart, I, I, 106.

XVIe s. Au premier port faire bris, Leroux de Lincy, Prov. t. II, p. 146.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. port ; esp. puerte ; ital. porto ; du lat. portus, qui se rapporte à πόρος, passage.