« rebours », définition dans le dictionnaire Littré

rebours

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

rebours [1]

(re-bour) s. m.
  • 1Le contre-poil des étoffes. Prendre le rebours d'une étoffe pour la mieux nettoyer.
  • 2 Fig. Le contre-pied, le contraire de ce qu'il faut. Le P. Castel a peu de méthode dans l'esprit ; c'est le rebours de l'esprit de ce siècle, Voltaire, Lett. en vers et en prose, 59.
  • 3À rebours, loc. adv. à contre-poil. Vergeter du drap à rebours.

    En sens contraire. Lire à rebours. Un homme d'esprit de ma connaissance voudrait qu'on étudiât et qu'on enseignât l'histoire à rebours, c'est-à-dire en commençant par notre temps et remontant de là aux siècles passés ; cette idée me paraît très juste et très philosophique, D'Alembert, Mél. litt. Œuv. t. III, p. 169, dans POUGENS.

    Fig. Tout ce que vous avez été durant vos jours, C'est-à-dire un esprit chaussé tout à rebours, Molière, l'Ét. II, 14. Les esprits à rebours, comme le sien, ne veulent jamais ce qu'on veut et veulent toujours ce qu'on ne veut pas, Brueys, Grondeur, I, 4. Vous prenez toujours les conseils à rebours, Th. Leclercq, Prov. t. IV, p. 44, dans POUGENS.

  • 4Au rebours, loc. adv. Au contraire, au contre-pied Le vrai secret pour avoir de la santé est que le corps soit agité et que l'esprit se repose… pour l'ordinaire il nous arrive tout au rebours : lorsque nous pensons nous reposer, nous nous travaillons le plus, Voiture, Lett. 44. Car je doute à présent si vous aimez Lucrèce, Et vous vois si fertile en semblables discours [mensonges], Que, quoi que vous disiez, je l'entends au rebours, Corneille, Ment. V, 4. Ils usent leurs souliers, et conservent leur âne ! Nicolas, au rebours ; car, quand il va voir Jeanne, Il monte sur sa bête, et la chanson le dit, La Fontaine, Fabl. III, 1. Un père d'ordinaire à son fils, tout au moins, fournit le nécessaire ; Ici, tout au rebours, le fils depuis dix ans…, Destouches, Phil. mar. III, 13.
  • 5À rebours de, au rebours de, loc. prép. Contrairement à. Tout au rebours de la bonne donzelle, La Fontaine, Gag. Je sortirai d'une maison où tout va au rebours du sens commun, Diderot, Père de famille, III, 4. Je me sens là-dessus tout à rebours des autres hommes, Rousseau, Prom. 7.

HISTORIQUE

XIIe s. Qar issir [sortir] les ferai de lor paix à rebors [je les ferai écorcher], Sax. XXVII.

XIIIe s. U il aura hastif securs, U li esteut [il lui faut] vivre à reburs, Marie de France, Gugemer. Trestout me vient arrebours, Tout adès sui esmaiiés, Que tous jours sui pourlongniés [éloigné] De joie avoir et secours, Mätzner, p. 61. On doit plaindre, et s'est honte à tous bons trouveours, Quant bonne matere est ordenée à rebours, Adam de la Halle, le Roi de Sezile, dans RUTEBEUF, t. I, p. 428. Dont evient que là où la lune est l'an prime, elle sera l'an après xj jors plus arrieres au rebours dou calendrier, Latini, Trés. p. 143. Ainsi se departi la cours ; Cele feste fu à rebous, Il i ot plus ploure que ris, Bl. et Jehan, V. 3436. Et demeure li cuers [le cœur] au cors de l'home à rebous ; car li chiés [la tête] demeure par devers les piés, et li rachine [la racine] par devers le chef, Alebrand, f° 40, verso.

XVe s. Mais j'ai tousjours au par aller Le rebours de ma voulenté, Orléans, Ball. 17.

XVIe s. Je suis au rebours des aultres, car…, Montaigne, I, 31. Considerer et juger de dangier est auculnement le rebours de s'en estonner, Montaigne, IV, 3. Ceste espreuve leur tourna tout au rebours de l'esperance de ceulx qui y furent envoyés pour cest effect, Amyot, Péric. 61.

ÉTYMOLOGIE

Bourg. rebor ; bas-lat. reburrus, rebursus, hérissé. D'après Diez, ce mot vient de re et de l'allem. Borste, poil, soie, dont le radical se trouve dans brosse, broussaille.