« spiritualité », définition dans le dictionnaire Littré

spiritualité

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spiritualité

(spi-ri-tu-a-li-té) s. f.
  • 1 Terme de métaphysique. Qualité de ce qui est esprit. La spiritualité commence, en l'homme, où la lumière de l'intelligence et de la réflexion commence à poindre, Bossuet, Connais. v, 13. On sait que la preuve de la spiritualité de l'âme, apportée par Descartes, le conduit nécessairement à croire que les pensées de l'âme ne peuvent être causes physiques des mouvements du corps, Fontenelle, Malebranche. Nous sommes prévenus que l'esprit humain est une substance indépendante du corps, laquelle n'y fait qu'une habitation passagère ; après quoi elle jouira sans lui de tous les avantages de la spiritualité, Boulainvilliers, Réfut. de Spinosa, p. 168. Ce fut lui [Platon] qui, le premier chez les Grecs, essaya de prouver par des raisonnements métaphysiques l'existence de l'âme et sa spiritualité, Voltaire, Phil. Établ. chr. 3.
  • 2 Terme de vie dévote. Tout ce qui a rapport aux exercices intérieurs d'une âme dégagée des sens, qui ne cherche qu'à se perfectionner aux yeux de Dieu. Il est presque toujours arrivé aux sectes d'une spiritualité outrée de tomber de là dans ces misères [les débauches sexuelles], Bossuet, Ét. d'orais. x, 3. Sans nous piquer aujourd'hui d'une spiritualité plus sublime que celle qui nous est enseignée par ce maître adorable [Jésus-Christ], Bourdaloue, Sur la récomp. des saints, 1er avent, p. 2. Ne vous figurez pas une dévotion de spiritualités imaginaires, qui se nourrit de réflexions, et qui laisse les saintes pratiques, Fléchier, Duc de Montaus. Je vous crois assez versée dans la spiritualité pour savoir que ce n'est pas le goût qu'on trouve dans la dévotion qui en fait la solidité, Maintenon, Lettre à Mme de la Viefville, 23 fév. 1706.

    La nouvelle spiritualité, le mysticisme de Mme de Guyon et de Fénelon. Il est certain que la nouvelle spiritualité rejette généralement les réflexions de tout l'état des contemplatifs ou des parfaits, Bossuet, Ét. d'orais. v, 2. Fénelon ne douta pas de lui faire bientôt [à l'évêque de Chartres] perdre terre par la nouvelle spiritualité de Mme Guyon, Saint-Simon, 34, 136. Devenue veuve dans une assez grande jeunesse, avec du bien, de la beauté et un esprit fait pour le monde, elle [Mme Guyon] s'entêta de ce qu'on appelle la spiritualité, Voltaire, Louis XIV, 38.

  • 3En général, caractère de ce qui est dégagé de la matière et des sens. La même raison de spiritualité, qui avait fait permettre le célibat, imposa bientôt la nécessité du célibat même, Montesquieu, Espr. XXIII, 21. C'est encore au christianisme que l'on doit ce sentiment perfectionné [l'amour] ; c'est lui qui, tendant sans cesse à épurer le cœur, est parvenu à jeter de la spiritualité jusque dans le penchant qui en paraissait le moins susceptible, Chateaubriand, Génie, II, III, 2.

HISTORIQUE

XIIIe s. Bonne coze est et porfitavle, et selonc Dieu et selonc le siecle, que cil qui gardent le [la] justice esperituel se mellassent de ce qui apartient à l'esperitualité tant solement, Beaumanoir, I, 1.

XIVe s. Aussi comme il n'est au monde que un solail qui signifie l'esperitualité, ne que une lune qui denote la temporalité, semblablement doivent estre seulement deux princes souverains, un espirituel et l'autre temporel, Oresme, Thèse de MEUNIER.

XVe s. Le recteur, les maistres et les clercs solennelz… [Charles V] mandoit souvent… usoit de leur conseilz de ce qui appartenoit à l'esperituaulté, Christine de Pisan, Charles V, III, 12.

XVIe s. Selon qu'ils [les esprits] se sont plus ou moins esloingnez de leur spiritualité, Montaigne, II, 291. Quand prestres sans iniquité En l'eglise Dieu serviront, Quand en spiritualité Simonie plus ne feront, Jean Bouchet, Ballades, Annales poét. t. III, p. 171.

ÉTYMOLOGIE

Lat. spiritalitatem ou spiritualitatem, de spiritalis ou spiritualis, spirituel.