« usurper », définition dans le dictionnaire Littré

usurper

Définition dans d'autres dictionnaires :

Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

usurper

(u-zur-pé) v. a.
  • 1S'emparer, par violence ou par ruse, des biens, de la dignité, du titre d'un autre. La Rapinière était dans une maison à deux lieues de là, qu'il avait usurpée sur une pauvre veuve, Scarron, Rom. com. II, 13. Il usurpe une autorité que Dieu ne lui a pas donnée, Pascal, Prov. XI. Dédaignant les trônes qui peuvent être usurpés, elle attacha son affection au royaume où l'on ne craint point d'avoir des égaux, Bossuet, Reine d'Anglet. La force nous est donnée pour conserver notre bien, et non pas pour usurper celui d'autrui, Bossuet, Hist. III, 6. Huit ans déjà passés, une impie étrangère Du sceptre de David usurpe tous les droits, Racine, Athal. I, 1. L'impie Achab détruit, et de son sang trempé Le champ que par le meurtre il avait usurpé, Racine, ib. I, 1. De nos plaideurs manceaux les maximes m'étonnent : Ce qu'ils n'usurpent pas, ils disent qu'ils le donnent, Dufrény, Réconcil. norm. I, 5. Le père de Charlemagne usurpa les Gaules sur les rois francs ; les gouverneurs sous la race de Charlemagne usurpèrent tout ce qu'ils purent, Voltaire, Mœurs, 33. Cilon, allié de Théagène, tyran de Mégare, forma le projet d'usurper la tyrannie, et se rendit maître de la citadelle, Condillac, Hist. anc. I, 16.

    Fig. C'est moi qui trouble votre repos, qui usurpe votre liberté, qui ne veut pas que vous ayez du loisir, Guez de Balzac, liv. IV, lett. 23. Venez, venez, madame, Faire voir quel pouvoir j'usurpe sur votre âme, Corneille, Sertor. III, 3. Dans le calme odieux de sa sombre paresse, Tous les honteux plaisirs, enfants de la mollesse, Usurpant sur son âme un absolu pouvoir, De monstrueux désirs le viennent émouvoir, Boileau, Épît. X.

  • 2 Fig. Obtenir quelque chose par fraude, sans droit légitime. Usurper la réputation, la gloire, l'estime. Il défendait les découvertes d'autrui contre ceux qu'il soupçonnait de vouloir les usurper ou les nier, Condorcet, Bertin.
  • 3 V. n. Usurper sur, s'emparer au détriment de… Vous usurpez sur mes droits. Moins le gouvernement peut usurper sur le souverain…, Rousseau, Contr. III, 8.

    Ce laboureur tâche toujours d'usurper sur ses voisins, d'accroître son terrain en poussant sa culture sur la leur.

HISTORIQUE

XIVe s. La commune renommée disoit qu'il vouloit usurper et avoir le royaume, Bercheure, f° 30, recto.

XVIe s. On ne doit nullement souffrir qu'en s'usurpant faussement l'honneur, ils violent la sainte institution de Jesus-Christ, Calvin, Instit. 875. Pour un mot il ne faudroit point esmouvoir noise, encore qu'il fust mal usurpé [employé], Calvin, ib. 1163. Nous usurpons si volontiers sur la maistrise…, Montaigne, I, 59. Les privileges fantastiques que l'homme s'est usurpé, de …, Montaigne, II, 235. Il y en a aucuns qui, à faulses enseignes, usurpent le nom d'historiens, Amyot, Préf XII, 39.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. et espagn. usurpar ; ital. usurpare ; du latin usurpare, proprement s'emparer par l'usage, par la possession, sans droit à l'acquisition, de usus, possession par usage, et rapere, ravir, par l'intermédiaire d'une forme, telle que usurapus.