« bouter », définition dans le dictionnaire Littré

bouter

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

bouter

(bou-té) v. a.
  • 1Mettre. Quelle fantaisie s'est-il boutée là dans la tête ? Molière, Méd. malgré lui, I, 5. Vieux.
  • 2 Terme de corroyeur. Nettoyer avec le boutoir.
  • 3 Terme d'épinglier. Placer les épingles sur des papiers.
  • 4 Terme de vénerie. Bouter la bête, la lancer. Vieux.
  • 5 Terme de serrurier. Limes à bouter, limes qui servent pour les pannetons des clefs.
  • 6 En termes de marine, bouter au large, pousser une embarcation au large.
  • 7 V. n. En parlant d'un vin qui pousse au gras. Les vins de ce cru sont sujets à bouter.

HISTORIQUE

XIe s. Il les a prises, en sa hoese les butet, Ch. de Rol. XLIX.

XIIe s. Dedans le corps sou espié [il] lui bouta, Ronc. p. 138. En ces laz le voleient li cardenal buter, Th. le mart. 105. Et quand cil seront fors bouté de leur baillie…, Sax. XXXII. Cil ki après vont lo bottent et trabuchent, Saint Bernard, p. 567.

XIIIe s. Ensi dura li assaus mout longucment, tant que nostre sires fist lever un vent qu'en apele byse, qui bouta les nes et les vessiaus plus près que il n'estoient devant seur la rive, Villehardouin, CIV. Dont bouterent le feu entr'ex et les Grieus, Villehardouin, LXXX. De la chambre [elle] l'en boute ; [à] Berte vint mout à gré, Berte, X. Touailles eschaufées [ils] lui boutent en son sein, ib. XLIX. Et en a li uns l'autre tout coiement bouté [touché], ib. LXXXI. En un trou de tariere [ils] lui boutent erramment Les deux pols [pouces], et les coignent mout angoisseusement, ib. XCV. Mauvès hoste en ton hostel as ; Por ce te lo [conseille] que hors le boutes, Qu'il te tost les pensées toutes Qui te doivent à preu torner, la Rose, 4626. Assez i feri et boutai Et par maintes fois escoutai Se j'orroie venir nulle arme [âme], ib. 523. Car jonesce boute homme et fame En tous peris de corps et d'ame, ib. 4449. Car povre chose, où qu'ele soit, Est adès boutée et despite, ib. 459. Ne demora pas demi an que li fus fu boutés en cele grange, Beaumanoir, XXXIV, 14. Quant j'oï ce, je bouté m'escuele arieres, Joinville, 241. Nous voulons que les foles femmes soient boutées hors des mesons, Joinville, 295. Tout li tavernier de Paris pueent vendre tel vin comme il voelent, cras ou bouté, et à tel fuer comme il voelent, Liv. des mét. 29. Je vos fais asavoir qu'il [les vers] viennent de diverses viandes reschaufées et de ces vins enfuteiz et boteiz, Rutebeuf, 257.

XIVe s. Ceulx qui se boutent es perilz des guerres impetueusement, Oresme, Eth. 81. Et s'au roi tu ne pues parler à ton commant, Bureau de la Riviere tu m'iras saluant ; Et lui baille ma letre ; il vaudra autretant ; Car, voir, qui boute l'un, il va l'autre boutant, Guesclin. 1710717111.

XVe s. [Le sire de l'Esparre] eut une fortune de vent sur mer qui le bouta en la mer d'Espaigne, Froissart, II, II, 4. Les hommes de la ville bouterent lors leurs testes ensemble et commencerent à murmurer et à parler, Froissart, II, III, 42. Tous les autres archers se bouterent au hahay, et navrerent de commencement tout plein de garçons des Hainuyers, Froissart, I, I, 31. Ils vinrent en Hainaut, et se bouterent dedans le bois de Blaton, Froissart, I, I, 79. Et n'estoient point les troux entre les barreaulx plus grans que à y bouter ung bras à son aise, Commines, IV, 9.

XVIe s. Mon cœur serré au large boute : De ta pitié ne me reboute, Mais exauce mon oraison, Marot, IV, 231. Mais qui a il ? voicy merveilles ; De rire tant, et qui vous boutte [excite] ? Saint-Gelais, 42. Boutte à moy sans eaue, Rabelais, Gar. I, 5. Boutons, boutons, passons oultre, Rabelais, Pant. V, 36. Alors la terre s'ouvre, et les germes des plantes et des herbes commencent à bouter et sortir dehors, Amyot, Num. 31. Les vertus boutent et florissent en cest aage là, et prennent pied ferme par les louanges que l'on leur donne, Amyot, Agis et Cléom. 2. Les anciens tiennent estre en toutes plantes trois divers mouvements ; assavoir, bouter, fleurir, meurir, De Serres, 176. Le couldrier sera planté de bonne heure, à cause de son avancé bouter, De Serres, 680.

ÉTYMOLOGIE

Bourguig. bôttai ; provenç. et espagn. botar ; ital. bottare ; du moyen allemand bôzen, heurter, frapper. Il y a aussi le kymri bot, bôth, corps rond. Ces mots tiennent les uns aux autres (voy. BUT et BUTTE). Bouter, en parlant du vin, est le même mot employé comme nous employons aujourd'hui pousser : du vin poussé au gras.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

BOUTER. Ajoutez :
8Boutez dessus, mettez dessus, et, quand la situation restreint et particularise le sens, mettez votre chapeau, s'est dit dans le langage populaire du XVIIe siècle. Valère à Sganarelle : Mais, monsieur, couvrez-vous, s'il vous plaît ; le soleil pourrait vous incommoder. - Lucas à Sganarelle : Monsieu, boutez dessus, Molière, Méd. malgré lui, I, 6.

ÉTYMOLOGIE

Ajoutez : D'après M. D'Arbois de Jubainville (Revue celtique, t. II, p. 126), bouter vient non pas du moyen-allemand bôzen, qui a subi la seconde substitution de la dentale, mais d'un mot franc bautan et par contraction botan, qui avait échappé à cette substitution, comme le vieux scandinave bauta et l'anglo-saxon beátan, dont l' égale au.