« débris », définition dans le dictionnaire Littré

débris

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débris

(dé-bri ; l's se lie : un dé-bri-z affreux) s. m.
  • 1Reste d'une chose brisée. Du débris d'un vieux vase, autre injure des ans, La Fontaine, Phil. et Baucis. Tout à coup elle aperçut les débris d'un navire qui venait de faire naufrage, des bancs de rameurs mis en pièces, des rames écartées çà et là sur le sable, Fénelon, Tél. I. Aussitôt sous leurs pieds les tables renversées Font voir un long débris de bouteilles cassées, Boileau, Sat. III. Quel débris parle ici de votre résistance ? Racine, Iphig. IV, 4. Les pilotes qui se formèrent sous ses yeux, découvrirent en 1419 Madère, que quelques savants ont voulu regarder comme un faible débris de l'Atlantide, Raynal, Hist. phil. I, 1. Sur un débris épars d'armes étincelantes, Lebrun, Odes, I, 5. Quoi ! ces monuments chéris, Histoire De notre gloire, S'écrouleraient en débris ? Béranger, Gaul.
  • 2 Fig. Ce qui reste de ce qui a été détruit. Et cet asile ouvert aux illustres proscrits Réunit du sénat le précieux débris, Corneille, Sertor. I, 1. Il règne sur le débris et sur les ruines de sa fortune, Fléchier, II, 48. Le triste débris d'une réputation que vous lui avez arrachée, Fléchier, Serm. I, 338. Vous, réduit à vivre tristement du débris de l'héritage de vos pères, Fléchier, Serm. II, 202. Il avait recueilli trois cents écus d'or du débris de son patrimoine, Fléchier, Vie de Commendon, I, 5. Non, je ne prétends point, cher Arbate, à ce prix, D'un malheureux empire acheter le débris, Racine, Mithr. I, 1. [Il] Fondait sur trente États son trône florissant Dont le débris même est un empire puissant, Racine, ib. III, 1. Une vieillesse endurcie qui, dans le débris d'un corps usé et à demi mort, nourrit des passions encore toutes vivantes, Massillon, Or. fun. M. de Villars. L'insensibilité s'y élève sur les débris de votre culte, Massillon, Car. Mélanges. Ce prince [Valérius], après avoir mis le feu à ses vaisseaux, retourna par terre en Macédoine, menant avec lui les tristes débris de ses troupes presque entièrement désarmées et dépouillées, Rollin, Hist. anc. Œuvres, t. VIII, p. 109, dans POUGENS. J'ai forcé le débris de leurs armées de s'enfermer dans leurs places, Vertot, Révol. rom. liv. III, p. 251. J'ai resté plus d'un an en Italie, où je n'ai vu que les débris de cette ancienne Italie si fameuse autrefois, Montesquieu, Lettr. pers. 112. Misérables débris de la grandeur humaine, Voltaire, Triumv. I, 1. Déïphobe soudain frappa ses yeux surpris, De la race des rois misérable débris, Delille, Énéide, VI. Les Vestales traînèrent encore quelque temps dans l'indigence et dans la douleur le débris de leur considération, Hist. des Vest. dans DESFONTAINES. À cela Davoust répliquait par son horreur naturelle pour toute espèce de désordre : elle l'avait d'abord porté à vouloir régulariser cette fuite ; il s'était efforcé d'en couvrir les débris, craignant la honte et le danger de laisser à l'ennemi ces témoins de notre désastre, Ségur, Hist. de Nap. IX, 9.

    Absolument. S'il eût fallu périr sous un fameux débris, Je l'eusse appris de vous, ou je vous l'eusse appris, Corneille, Sophon. III, 6. Et pour lui la grandeur n'est pas d'assez haut prix, S'il ne s'y voit monter par un fameux débris, Brébeuf, Phars. I.

  • 3Les restes d'une chose consommée. Les débris d'un repas, d'un pâté. Au moment où sa bouche, Comme un gouffre profond, revomit sur sa couche Parmi des flots de sang la chair des malheureux, Effroyable débris de son festin affreux, Delille, Énéide, III.
  • 4Action de briser, perte, destruction, ruine ; en ce sens il ne s'emploie qu'au singulier. Si peu, que la moindre chose De son débris serait cause [serait cause que lui, pot de terre, serait brisé], La Fontaine, Fabl. V, 2. Qui de la créature embrasse les appas Trébuchera comme elle et suivra pas à pas D'un si fragile appui le débris infaillible, Corneille, Imit. II, 7. Et sauve ma maison du débris de Carthage, Mairet, M. d'Asdrub. II, 1. Ni le commun débris de toute la nature Ne m'étonnerait pas comme cette aventure, Rotrou, Bélis. IV, 8. Hélas ! souhaitez-vous le débris de l'empire, Et, s'il se peut encor, quelque chose de pire ? Rotrou, ib. IV, 6. Qui pourrait sans frémir voir le débris du monde, Voir la confusion de la terre et de l'onde ? Brébeuf, Pharsale, II. Bientôt de notre fourbe on verra le débris, Si vous continuez des sottises si grandes, Molière, l'Étour. IV, 5. Il donne comme dans un écueil dans les erreurs sociniennes, il s'en retire avec peine tout brisé pour ainsi dire, et ne se remet jamais de ce débris, Bossuet, dans le Dict. de DOCHEZ. Les royaumes sortis du débris de ce premier empire, Bossuet, Hist. III, 4. C'est [l'état monastique] un moyen de faire fortune, de vivre dans une honorable oisiveté, de se sauver du débris de sa famille, Fléchier, I, p. 119. On verra les abus par ta main réformés, La licence et l'orgueil en tous lieux réprimés, Du débris des traitants ton épargne grossie, Boileau, Ép. I. Je fondais mon bonheur sur le débris des lois, Racine, Bérén. II, 2. Il n'a point détourné ses regards d'une fille, Seul reste du débris d'une illustre famille, Racine, Brit. II, 3. Convenons qu'au milieu de la dépravation et de la décadence des mœurs publiques, le monde a encore sauvé du débris, des restes d'honneur et de droiture, Massillon, Petit car. Gloire. Il est resté à l'homme, du débris de son innocence, certains penchants de gloire, de plaisirs, de vérité, qui sont comme les espérances de son rétablissement, Massillon, St Thomas d'Aquin. Nous nous hâtons de profiter du débris les uns des autres, Massillon, Car. Mort. Au milieu du débris de tout ce qui nous environne, nous nous sauvons encore dans l'avenir, Massillon, Or. fun. Dauphin. Sa gloire seule [de Dieu] s'élèvera sur le débris de toutes les grandeurs humaines, Massillon, Prof. rel. 3. Cet enfant sauvé du débris, qui lui rappelle [à Louis XIV] la perte encore récente de tant de princes, Massillon, Or. fun. Louis le Grand. Sur tout ce qui regarde cette passion chérie que nous avons comme sauvée du débris de toutes les autres, Massillon, Avent, Épiph. Établir sur le débris des idoles la connaissance du Dieu véritable, Massillon, Avent, Le jour de Noël.
  • 5 Poétiquement, les restes mortels de l'homme. Là reposent les débris de nos aïeux. Ce potentat jadis si grand, si vénérable, N'est plus qu'un tronc sanglant, qu'un débris déplorable, Delille, Énéide, II.
  • 6Anciennement, dommage, ce qui se casse et se brise en une maison où beaucoup de monde aborde. Quand le roi logeait quelque part, il faisait payer tant pour le débris.

REMARQUE

Lamartine a écrit débri pour la rime : Et les peuples, poussant un cri, Comme un avide essaim d'esclaves Dont on a brisé les entraves, Se sauvent avec un débri, Harm. IV, 14. C'est une faute ; débris venant de briser ne peut perdre l's.

HISTORIQUE

XVIe s. Le but de tant que nous sommes qui voulons avoir part au debris du roiaume, est…, D'Aubigné, Hist. III, 44. Le butin fut grand, pource que, sur le debris de l'armée, plusieurs qui voioient plier leurs drapeaux…, D'Aubigné, ib. 45.

ÉTYMOLOGIE

Dé… préfixe, et bris.