« dolent », définition dans le dictionnaire Littré

dolent

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

dolent, ente

(do-lan, lan-t') adj.
  • 1Qui souffre et se plaint. Une femme dolente. Mais nonobstant l'effort, dolent en son courage…, Régnier, Élég. V. Mais si le sentiment de la misère humaine Vous fait avoir pitié d'une dolente reine, Mairet, Sophon. III, 4. …La trop dolente mère Fit dans l'abord force larmes couler, La Fontaine, Fauc. Mais j'avais, lui vivant, le teint d'un chérubin, L'embonpoint merveilleux, l'œil gai, l'âme contente, Et je suis maintenant ma commère dolente, Molière, Sganar. II. On ne voit plus sa fille, et la pauvre Isabelle Invisible et dolente est en prison chez elle, Racine, Plaid. I, 5. … Que ma fille Va ranimer ta dolente famille ! Voltaire, Enf. prod. I, 1.

    Qui exprime la douleur. Un langage dolent. Une mine dolente. Et vous êtes de celles Qu'un air triste et dolent rend encore plus belles, Mairet, Sophon. III, 2. [ Cette muse] Qui, le glaive à la main, du diadème ornée, Vient au peuple assemblé, d'une dolente voix, Pleurer les grands malheurs, les empires, les rois, Chénier, Élég. X. Ainsi, mon oncle, vous tenez toujours à ce mariage, dit le jeune homme d'une voix dolente, Ch. de Bernard, la femme de 40 ans, § V.

  • 2 Substantivement. Lauzun imagina, se portant à merveille, de faire le dolent et de demander la permission d'aller aux eaux d'Aix-la-Chapelle, Saint-Simon, 149, 173. Exceptez-en quelques vieilles dolentes, Des jeunes sœurs jalouses surveillantes ; Il était cher à toute la maison, Gresset, Vert-Vert, I. Messire Jean Chouart confortait le dolent, assistait le mourant, Courier, I, 192.

REMARQUE

Aujourd'hui, dans l'usage le plus ordinaire, dolent emporte une idée de moquerie ou du moins d'exagération dans la plainte.

HISTORIQUE

Xe s. E por els es doleants [tu es dolent pour eux], Fragm. de Valenc. p. 468.

XIe s. Franceis mourront, Charles en ert [sera] dolent, Ch. de Rol. LXXIV.

XIIe s. [Il] Fera maint cuer dolant, Ronc. p. 20. Tex [tels] as ocis, dont mere en ert [sera] dolente, ib. p. 76. [La flamme] Dont tantes fois [je] me claim dolent et las, Couci, X. Se nuls morist [mourut] pour avoir cuer dolent…, ib. XXII. De ce [je] sui au cuer dolente, Que cil n'est en cest païs, DAME DE FAIELE, dans Couci. Ensi en sunt chacié li parent saint Thomas, Vunt en autre païs dolent, chaitif e las, E portent lur enfanz, lur robes e lur dras, Th. le mart. 64. Por coi est doneie la lumiere al dolent, e vie à ceaz [ceux] ki en amertume d'aumes [d'âmes] sunt ? Job, 464.

XIIIe s. Si en furent moult dolent et moult irié, et moult en eurent grant pitié, Villehardouin, XCI. Car cil qui a le cuer dolent, Sachiés de voir [vrai], il n'a talent De dancier ne de karoler, la Rose, 333. Nus n'en est plus dolens que cil qui le cop dona, Beaumanoir, LXIX, 8.

XVe s. Tant lui deplut ce dolent departir, qu'onques mot ne sut dire, Louis XI, Nouv. XXII.

XVIe s. Robes de prix et joyaulx [nous] mismes bas, Pour prendre noir, la dolente couleur, Guidon d'ennuy et mortelle douleur, Marot, J. V, 211. Il veut que l'on applique la ventouse sus la partie dolente, Paré, XV, 68.

ÉTYMOLOGIE

Lat. dolens, de dolere (voy. DOULOIR) ; norm. douillant. Quant à la forme doleant, qui est dans un très ancien texte, et qui est confirmée par doléance, elle suppose un verbe doloier ou doleier, dérivé de douloir.