« gain », définition dans le dictionnaire Littré

gain

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

gain

(ghin ; l'n ne se lie pas : un ghin excessif ; au pluriel, l's se lie : des ghin-z excessifs) s. m.
  • 1Ce que l'on gagne, ce que l'on obtient en fait d'argent ou de valeurs. Mettre en commun le gain et la perte. Il risque de nouveau le gain qu'il avait fait ; Mais rien, pour cette fois, ne lui vint à souhait, La Fontaine, Fabl. VII, 14. L'espérance du gain n'est pas ce qui me flatte, Molière, l'Ét. I, 10. Travaillez pour la gloire, et qu'un sordide gain Ne soit jamais l'objet d'un illustre écrivain, Boileau, Art. p. IV. Un vil amour du gain, infectant les esprits, De mensonges grossiers souilla tous les écrits, Boileau, ib. IV.
  • 2 Fig. Avantage, succès, réussite dans une entreprise, une affaire. Je tire un double gain d'un si petit dommage, Régnier, Élég. II. Il [Dieu] nous assure en notre peur, Et nous donne gain de nos pertes, Régnier, Hymne. Mourir c'était un gain selon son estime, parce que c'était passer dans le sein de Dieu et arriver au terme du salut, Bourdaloue, Pensées, t. I, p. 46. Comme si sauver son âme ne valait pas mieux que le gain du monde entier, Massillon, Panég. St-Benoît.
  • 3 Terme de droit. Gains nuptiaux ou mieux gains de survie, avantages qui se font entre époux en faveur du survivant.

    Gains et épargnes, acquisitions que font les enfants en dehors des biens paternels et maternels.

  • 4Le gain d'une bataille, l'action de remporter une victoire. Montrez-lui comme il faut s'endurcir à la peine… Et ne devoir qu'à soi le gain d'une bataille, Corneille, Cid, I, 3.
  • 5Gain d'un procès, avantage dans un procès obtenu par sentence des juges.

    Gain de cause, l'avantage que l'on obtient dans un procès, et, par extension, dans un débat quelconque. Vous venez d'entendre ses propres paroles [de Jurieu], et il donne gain de cause aux tolérants, qui ne sont que des sociniens déguisés, Bossuet, 1er avert. 46. Un jour, Louis XIV jouant au trictrac, il y eut un coup douteux… Eh sire [dit le comte de Grammont qui donna trot au roi, sans avoir vu le coup], ne voyez-vous pas que, pour peu que la chose eût été seulement douteuse, tous ces messieurs vous auraient donné gain de cause ? Voltaire, S. de Louis XIV, 28.

  • 6Le gain d'une partie, l'avantage obtenu dans une partie de jeu.

    Se retirer sur son gain, quitter le jeu lorsqu'on a gagné.

HISTORIQUE

XIIe s. De tout vostre gaaing ne vous demant-je mie, Sax. VII. Al jour del jugement, quant Dex tiendra ses plais, Or ont li pecheor grant gaain de lor fais [actions], ib. X.

XIIIe s. Et li empereres Henris ot rassemblés ses os [armées] qui orent amené leur guains à garison tresques en l'ost [qui avaient ramené leur butin en sûreté jusqu'à l'armée], Villehardouin, CLXVI. À meschief l'ai nourry [un cheval] cest yver de mon gain, Berte, LXXIII. Fui laid gaaing comme perte, Latini, Trésor, p. 362. Plusors gaains et plusors pertes avienent souvent par compaignie [association], selonc nostre coustume, Beaumanoir, XXI, 1. Li autre oir n'emporteront point gaaing du plet, Beaumanoir, XII, 24.

XIVe s. Le gaaing doit estre appellé perte, qui sa bonne fame [réputation] ne garde. Ménagier, I, 9.

XVe s. Nous defendons que nul creancier ne face renouveler lettres de creance et obligations de sa debte, par quoy le gain se convertisse en sort ni en autre maniere d'usure ou interest, Ordonn. des rois, t. II, p. 311.

XVIe s. Un hardi cueur aymeroit mieux mourir, Quand ennemy il voit en la campaigne, Qu'il n'y allast, soit à perte ou à gaigne, Marot, J. V, 108. Elle feit si bien qu'elle gaigna [une partie de jeu], et demanda Mesabates pour son gaaing, Amyot, Artax. 21. Ce qui est donné par forme de gain nuptial (qu'on appelle au pays de Lognes), en traicté de mariage ne gist point en restitution, Coust. gén. t. II, p. 518. D'injuste gain, juste daim [dommage], Leroux de Lincy, Prov. t. II, p. 131. Du gain l'odeur a bonne saveur, Leroux de Lincy, ib.

ÉTYMOLOGIE

Voy. GAGNER ; wallon, wâgn ; provenç. gazanh, guazanh, gazainh, guazaing, gaanh, gaaing ; anc. catal. gazagn, guadagn ; ital. guadagno. Il y a dans l'ancien français gaaing, et gaing ou vain, qui signifie herbe de pâturage, et, par extension, automne, qui est en italien guaime, en wallon wayen, en lorrain veyen, en normand vouin, et qui se trouve dans le français re-gain (voy. REGAIN) ; c'est le sens propre du mot, correspondant au sens propre de gagner ou gaagner.