« malade », définition dans le dictionnaire Littré

malade

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

malade

(ma-la-d') adj.
  • 1Qui a quelque altération dans sa santé. Il était déjà malade de la maladie dont il est mort. Qui ne sent point son mal est d'autant plus malade, Corneille, Rodog. III, 6. Flavie, au lit malade, en meurt de jalousie, Corneille, Théod. I, 1. Qui fait le plus de bruit n'est pas le plus malade, Corneille, Perthar. III, 3. Mais, monsieur, mettez la main à la conscience : est-ce que vous êtes malade ? Molière, Mal. imag. I, 5. Quand je vous écris de grandes lettres, ma chère enfant, vous avez peur que cette application ne me fasse malade, Sévigné, 30 juill. 1877. Je vous dirai que nous regardons la fatigue de venir par les chaleurs et par la diligence comme une chose terrible, et qui pourrait vous faire malade, Sévigné, 8 juill. 1676. Que me sert, en effet, qu'un admirateur fade Vante mon embonpoint, si je me sens malade ? Boileau, Ép. IX. Je suppose qu'une belle princesse, qui n'aura jamais entendu parler d'anatomie, soit malade pour avoir trop mangé, trop dansé, trop veillé, trop fait tout ce que font plusieurs princesses, Voltaire, Dict. phil. Maladie. J'aimerais mieux qu'il fût quelquefois malade que sans cesse attentif à sa santé, Rousseau, Ém. II.

    Malade de, qui a telle ou telle partie affectée. Malade de la poitrine. Malade de corps et d'esprit.

    Malade à mourir, extrêmement malade. Quoi ! vous n'êtes point malade à mourir comme je vous ai vue ! ah ! ma bonne, je suis trop heureuse, Sévigné, 21 juin 1671.

    Avoir l'air malade, paraître malade.

    Ironiquement et fig. Le voilà bien malade, se dit de quelqu'un qui souffre ou se plaint de quelque mal léger. Vous voilà tous bien malades d'avoir un méchant rôle à jouer, Molière, Impromptu, 1. Ce ne sont plus rien que des idées ou des fantômes, des façons de chevaux. - Les voilà bien malades ! ils ne font rien, Molière, l'Avare, III, 5. Comment ! elle consent à t'épouser ? - La voilà bien malade ! Marivaux, Jeux de l'am. et du has. III, 7. Vous voilà bien malade ; il faut servir les grands ; On amuse souvent plus par son ridicule Que l'on ne plaît par ses talents, Voltaire, Prude, prol.

  • 2Il se dit, au même sens, des animaux. Un cheval malade de la morve. Mon chien est malade. Les vers à soie sont malades cette année.

    Les plantes, étant vivantes, sont malades comme les animaux. La vigne est malade. Les cerisiers ont été, à différentes reprises, malades dans les environs de Paris.

    Les fruits et les produits végétaux sont malades aussi. Pommes de terre malades. Tomates malades.

    Enfin on l'applique à certains produits végétaux altérés. Ce vin est malade, a la couleur malade.

  • 3Qui a subi quelque altération pathologique, en parlant des parties du corps. Les climats chauds rendent facilement le foie malade. Il a les poumons malades. Appliquer le remède à la partie malade. Ne me touchez pas la main droite, c'est la main malade.
  • 4Avoir l'esprit malade, être un peu fou. Fais quelque chose enfin pour mon esprit malade, Corneille, Théod. I, 1. Un fou rempli d'erreurs, que le trouble accompagne, Et malade à la ville ainsi qu'à la campagne, En vain monte à cheval…, Boileau, Ép. V.
  • 5Malade se dit quelquefois, dans le langage familier, pour exprimer qu'une chose a reçu quelque atteinte, est en mauvaises conditions. Cette entreprise est bien malade ; les fonds manquent. On dit que le ministère a un fort parti contre lui et qu'il est malade. Amour fit une gambade, Et le petit scélérat Me dit : pauvre camarade, Mon arc est en bon état, Mais ton cœur est bien malade, La Fontaine, Imit. d'Anacréon.

    Cet habit, ce livre est bien malade, c'est-à-dire est en mauvais état.

  • 6 Fig. Qui est affecté de quelque trouble, de malaise moral. Nous sommes dans la corruption des siècles et dans la caducité de la nature ; tout est faible, tout est malade dans les assemblées des hommes, Guez de Balzac, De la cour, 6e disc. Et, contents d'avoir connu nos plaies, nous en sommes, ce semble, plus tranquillement malades, Massillon, Orais. fun. Villars.

    Un cœur malade, cœur troublé par quelque passion. Ainsi le cœur malade des mortels compte toujours pour rien ce qu'il a le plus désiré dès qu'il le possède, Fénelon, Tél. XXIV.

    L'âme malade, l'âme pécheresse. Les figures de l'Évangile pour l'état de l'âme malade sont des corps malades, Pascal, Pens. XXV, 189, éd. HAVET.

  • 7 S. m. et f. Celui, celle dont la santé a subi quelque altération. Et lorsque le malade aime sa maladie, Qu'il a peine à souffrir que l'on y remédie ! Corneille, Cid, II 5. Voilà, monseigneur, une grande obligation que vous aura le doyen des malades de France, Scarron, Virg. II, épître. Le médecin Tant-pis allait voir un malade Que visitait aussi son confrère Tant-mieux, La Fontaine, Fabl. V, 12. Voilà une malade qui n'est pas tant dégoûtante, et je tiens qu'un homme bien sain s'en accommoderait assez, Molière, Méd. malgré lui, II, 6. Lorsque le médecin fait rire le malade, c'est le meilleur signe du monde, Molière, ib. Est-il possible qu'on laisse comme cela un pauvre malade tout seul ? Molière, Mal. imag. I, 1. Je parlerai à Duchesne de votre petit médecin, à qui nous donnerons dans notre quartier quelques malades à tuer pour voir un peu comme il s'y prend, Sévigné, 1er nov. 1679.

PROVERBES

Il n'en mourra que les plus malades, se dit quand on se moque d'un danger commun qui menace plusieurs personnes.

On dit à peu près dans le même sens : Est bien malade qui en meurt. Il est fort malade, rien ne lui demeure à la bouche [par ironie, il se porte fort bien], Leroux de Lincy, Prov. t. I, p. 263.

HISTORIQUE

XIIe s. Et les malades reposer et baigner, Ronc. p. 159. Malabde, Passion de J. C. 116.

XIIIe s. Comme cil qui rapareille le lit du malade por reposer, Psautier, f° 51. Et vint tout droit en Acre, et first le malade et le mesaisié, et chemina dusques al hospital, Chr. de Rains, p. 107.

XIVe s. Celui qui est malade, il n'est pas en sa volenté d'estre sain quant il lui plaira, Oresme, Eth. 74.

XVe s. Le disent ainsi : que mallade riant meurt, et le plorant gharist, Chastelain, Chr. des ducs de Bourg. I, 67. Quant il amende au malade, il empire au mire [médecin], Leroux de Lincy, Prov. t. I, p. 263.

XVIe s. Vespasien estant malade de la maladie dont il mourut, Montaigne, III, 89. À l'œil malade la lumiere nuit, Cotgrave La mort n'a point d'ami, le malade n'a qu'un demy, Cotgrave

ÉTYMOLOGIE

Bourguign. mailaide ; wallon, malâd ; provenç. mal apte, malaut ; anc. catal. malaut ; catal. mod. malalt ; anc. espagn. et anc. ital. malato ; de la combinaison latine male aptus, mal apte (voy. APTE). On a objecté que l'italien devrait être malatto ; mais il y a en effet malattia, et malato a été formé sur le verbe emmalare, rendre malade. On a objecté encore que le français devrait> être malate ; mais malade est une contraction facile de malabde. La formation de malade est analogue à celle de l'ancien français rade, du lat. rapidus, d'où rabde, puis rade, comme malabde, puis malade.